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Nos Lecteurs ont la Parole

Lettre à une inconnue

OLGA
pcc Dr Ziad HOURI
Chers vous,
Je ne sais pas pourquoi je vous écris cette lettre. Peut-être parce que, aujourd'hui, je suis moins fatiguée que les autres jours et ma tête plus claire, moins sens dessus dessous. Alors j'en profite pour vous raconter, en quelques mots, mon histoire.
Je m'appelle Olga, j'ai 20 ans et je suis Malgache. Dans mon village de bord de mer, tout le monde m'appelait « la sensitive » parce qu'un rien me faisait rire et, c'est vrai aussi, parce qu'un rien me faisait monter l'eau aux cils et bloquer les mots dans ma gorge.
J'étais heureuse dans mon village. Malheureusement, je n'avais pas grand-chose à manger. Je dormais tous les soirs avec un ventre qui hurlait de famine. Alors, j'ai décidé de partir, comme ma cousine, dans un pays riche où je peux manger à ma faim.
Je suis arrivée ici, dans un appartement qui est loin d'être enchanteur, chez une vieille dame autoritaire. Pourtant, j'aime beaucoup les vieux de chez moi, mais cette personne n'éprouve aucune sympathie pour les autres et, malgré tous mes efforts pour engager avec elle le dialogue, elle restait glaciale, impériale. Ses propos étaient formulés sur un ton dur et coupant comme la lame du couteau du boucher de mon village. Elle me surveillait du coin de l'œil, se méfiait et vérifiait constamment la qualité de mon travail. Elle était toujours en train de me hurler dessus, dans une langue que je ne comprenais pas.
Je savais avant de venir ici qu'il me fallait oublier ma vanité et mon orgueil, que j'allais devenir un vassal. Je ne savais pas que j'allais vivre dans la peur, la peur des colères et des réactions, sans pouvoir me justifier.
Je suis réveillée très tôt par les premiers rayons de soleil et les affreux bruits de la ville. Je me mets aussitôt au travail. Je travaille, je travaille et le monde s'efface devant moi ; je tourne, je tourne, et mes yeux ne voient que poussières et encore de la poussière. Je passe mon temps à essayer de comprendre les ordres de madame et à ne négliger aucun de ses souhaits. En vain. Cette langue est si difficile... J'ai quand même retenu deux mots : « Awem », qui veut dire vite, et « hemara », dont j'ignore toujours le sens...
Je n'aime pas les dimanches, pourtant Jour du Seigneur. C'est le jour où ma patronne invite ses enfants. La première fois, j'étais tellement surprise par la quantité de nourriture que ma patronne avait mis deux jours à préparer et que tout le monde a avalé en 10 minutes. Bien vite, j'ai compris que les repas ont beaucoup d'importance ici et surtout la quantité. Moi qui avait à peine deux bouchées de riz par jour...
Je n'aime pas non plus les fêtes ici. C'est vrai que je cours dans tous les sens et que je travaille beaucoup ce jour-là, mais j'avoue n'y rien comprendre : personne à cette occasion ne chante, ne danse, ne rit comme chez moi. Tout le monde s'empiffre. Les gens mettent leurs vêtements neufs, sauf moi qui garde mon hideux uniforme, que je déteste. Tous les enfants reçoivent des cadeaux et de l'argent, sauf moi. C'est vrai, je ne suis plus une enfant, mais personne n'a un regard pour moi. Pourtant chez moi, les garçons n'avaient d'yeux que pour moi, la « princesse ». Le « eid » est très cruel pour moi.
Je suis triste ; je ne connais plus la douceur de mon pays, la pureté de son air ; l'innocence de mes amis et l'amour de ce magnifique garçon qui avait illuminé ma triste vie. Tout ça me manque terriblement.
Je sais que je suis bavarde ; on me l'a souvent reproché chez moi. Mais ici, je ne parle à personne, tout le monde me prend pour une débile, ils ne connaissent pas ma vie, ma nature généreuse, mon amour de la nature, des animaux, des plantes et des humains.
Je sens mon cœur se briser et je ne suis pas sûre que les morceaux pourront se recoller un jour.
Je termine en m'adressant à toi mon Dieu : regarde ma souffrance, donne-moi la force de supporter cette vie. Le silence est le vrai malheur.

OLGA
pcc Dr Ziad HOURI
Chers vous,Je ne sais pas pourquoi je vous écris cette lettre. Peut-être parce que, aujourd'hui, je suis moins fatiguée que les autres jours et ma tête plus claire, moins sens dessus dessous. Alors j'en profite pour vous raconter, en quelques mots, mon histoire.Je m'appelle Olga, j'ai 20 ans et je suis Malgache. Dans mon village de bord de mer, tout le monde...

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