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Législatives : juin 2009 - Tout le monde en parle

Ne nous décevez pas !

Bravo Ziyad Baroud ! Vous avez réussi un tour de force remarquable. Personne n'aurait osé parier une livre symbolique sur votre gageure.
Bravo aussi, et surtout, au président Sleiman qui vous a soutenu dans votre aventure, parce que s'en fut une, qui vous a donné les moyens d'organiser ces législatives en un seul jour.
Les résultats sont là, d'une clarté limpide : il y a un vainqueur et un perdant ; ce dernier a reconnu sa défaite mais a, semble-t-il, décidé de passer outre au verdict des urnes et d'imposer une fois de plus ses conditions.
Pour une fois, il faut appeler les choses par leur nom.
N'en déplaise à sayyed Hassan, le 7 juin fut une journée électorale par excellence dans tout le pays et non un plébiscite dans les régions monochromes ou frontalières pour que son parti garde et renforce son arsenal.
Les électeurs de ces régions, et de cette communauté, ont été transportés vers les urnes, ils ne se sont pas déplacés d'eux-mêmes. Qui donne ordonne. Il faut que cette tragi-comédie cesse, l'appauvrissement programmé de cette frange de la population - afin de mieux la tenir par des subsides savamment calculés - doit être endigué.
Découpage électoral oblige, il n'y avait pas de compétition dans ces régions, les indépendants ont été soigneusement muselés, voire tenus à l'écart de cette consultation, et il était dès lors aisé de travestir et de tirer les conclusions qui conviennent.
Mais nous sommes loin du compte. Je ne peux douter un seul instant du libanisme de sayyed Hassan ou de son parti. Les urnes ayant parlé, il n'est pas en droit de changer la donne et encore moins de soustraire du pays une frange très importante de sa population.
Accepter cette mentalité serait aller dans le sens de ces érudits en politique qui ont déjà découpé le pays en zones d'influence, Saad Hariri pour les sunnites, Walid Joumblatt chez les druzes, le Hezbollah pour les chiites, les chrétiens, eux, se voyant répartis entre trois ou quatre leaders antagonistes.
Nous sommes en 2009, pardi ! Il est plus que dégradant de retourner à l'ère médiévale ; ces clivages sont d'une autre époque ; nous parlons programme et non religion, nous disons demain et non hier. Accepter cette analyse, c'est faire comme en 2005, perdre des élections remportées haut la main.
Le 7 juin 2009, l'alliance du 14 Mars, pour hétéroclite qu'elle soit, a gagné les élections législatives avec 71 sièges contre 54 à l'opposition : les chiffres parlent d'eux-mêmes, si loi du nombre il y a, et le débat s'arrête là.
C'est ce qu'on appelle plus communément la démocratie.
Mais il est vrai qu'au Liban, nous avons la tentation de souvent nous tenir aux portes de la démocratie. Tout se règle par les demi-mesures, les arrangements foireux, quitte à ne pas faire de vagues dans l'immédiat, sans parvenir toutefois à empêcher l'orage qui, en toute connaissance de cause, se prépare, si encore une fois nous donnons dans le miroir aux alouettes.
Pour éviter les problèmes, nous avons tendance à atermoyer, à jouer le temps, à louvoyer, faire l'autruche sans résultats probants, et alors les ennuis ressurgissent de plus belle, éclatent et occasionnent des dégâts considérables.
Si l'accord du Caire avait, en son temps, été dénoncé comme le préconisait Raymond Eddé, nos souffrances auraient été sans nul doute abrégées. Et tout le moins nous aurions su immédiatement à quoi nous en tenir. Si en 2005 nous avions bien géré la victoire électorale, le Parlement n'aurait pas été fermé, ni le centre-ville squatté.
Inutile de remuer le passé et ses affres. Le gagnant des élections de 2009 doit savoir digérer sa victoire ; la configuration politique l'oblige peut-être à donner un bout du gâteau, mais attention qu'on ne lui happe pas un doigt ou toute la main.
Ce n'est pas en faisant des concessions à l'infini qu'on bâtit un État, qu'on renforce le sentiment d'appartenance nationale ou de sécurité, qu'on force le respect de l'autre même s'il se rebiffe, monte sur ses grands chevaux et se répand en menaces.
Ce comportement est somme toute normal, même si nous connaissons de l'Autre son potentiel de nuisance. Mais devant le concert des nations qui ont applaudi la tenue de ces élections, leur résultat sans appel, il lui est interdit, même impossible, de mettre ses menaces à exécution, surtout à l'approche de la saison estivale qui s'annonce prometteuse.
Les électeurs de Jbeil, du Metn, du Kesrouan ou de Baabda sont-ils prêts à cautionner des aventures comme en juillet 2006 ou mai 2008 ?
C'est précisément contre ces errements que le patriarche maronite a donné de la voix, que les Libanais ont attendu de longues heures sous un soleil de plomb pour glisser leurs bulletins dans l'urne. Et le verdict est on ne peut plus clair et sans appel.
Qu'on ne se leurre pas : rares sont les électeurs qui auront porté leur voix sur un nom. Dans leur majorité, ils se sont mobilisés non sur un programme, il n'y en avait pas, mais sur une conception d'avenir et de devenir qui a pour titre indépendance, liberté, souveraineté.
Le mandat donné aux représentants du 14 Mars ne leur permet pas des attitudes seigneuriales dilapidant les acquis de cette journée du 7 juin. Par contre, ils ont l'obligation de veiller à la réintégration de tous dans le giron de la patrie, à commencer par ceux-là mêmes qui ont été tentés de vouloir imposer leur propre république.
J'aime parfois à simplifier les choses, surtout en politique, domaine dans lequel tout bon Libanais qui se respecte pense tout savoir, mais qui, de vous à moi, n'y entend rien. Je présume que quelque part, le problème de sayyed Hassan et de son parti, puisque c'est d'eux qu'il s'agit, ne réside ni dans son armement ni dans la volonté qu'on lui prête d'iraniser le Liban. Il est peut-être, ce problème, dans  ces camps palestiniens surarmés situés aux portes du Liban-Sud. Or ni lui, ni son parti, ni sa communauté - nous itou - ne sont prêts à renoncer une fois de plus à cette profondeur verdoyante, fertile et riche en beautés naturelles dont ils (et tous les Libanais avec eux) ont été privés des années durant à cause de ces mêmes visiteurs devenus inamovibles avec le temps.
Désamorcer ce fusible n'est pas une mince affaire. Il faut s'y atteler au plus tôt, déjà qu'un accord entre toutes les parties existe pour démilitariser les camps palestiniens et leurs  alentours. Ce sera un pas en avant ; l'humanitaire suivra dans la foulée.
Il ne faut pas laisser ces îlots de misère et de rancœur à ciel ouvert, mais rendre à leurs habitants leur dignité humaine, les retirer du circuit des surenchères régionales qui finiront un jour prochain par prendre des proportions dont nul ne peut prévoir les incidences.
D'une pierre deux coups, les Palestiniens resteront en instance de départ et le problème des arsenaux illégaux prendra la voie de règlement, sous l'égide du gouvernement libanais et de sa seule armée.
Reste le volet social, la sempiternelle ritournelle de justice pour tous, l'écolage, les hôpitaux, les soins médicaux, la vieillesse protégée, les routes, l'électricité, les espaces verts, les parkings que nos nouveaux élus auront quatre bonnes années pour résoudre.
Magnifique pour les crédules de ma trempe lesquels, même en pleine canicule de juin, croient toujours au père Noël et n'ont pas désespéré de leurs compatriotes. Bien au contraire, cette consultation dans l'état où elle s'est déroulée, l'affluence, la mobilisation qu'elle a engendrées, conforte mes espérances : les électeurs et les électrices ont mûri, les mentalités ont évolué, je sens déjà dans le scrutin de 2013 un air de sanction.
7 juin 2009, les urnes ont parlé, le mandat est sans équivoque, il y a du pain sur la planche. Au travail messieurs, dames, tout en vous (et nous) souhaitant le meilleur, vous ne nous décevrez pas.
Bravo aussi, et surtout, au président Sleiman qui vous a soutenu dans votre aventure, parce que s'en fut une, qui vous a donné les moyens d'organiser ces législatives en un seul jour.Les résultats sont là, d'une clarté limpide : il y a un vainqueur et un perdant ; ce dernier a reconnu sa défaite mais a, semble-t-il, décidé...