Fondée en 1972, la rébellion contrôlait en 2006 un tiers des 65 000 km2 de cette île de l'océan Indien, dans le Nord et l'Est, où elle luttait pour un État séparé. « Ils se battaient pour un "Eelam" (un État tamoul indépendant) qu'ils n'auraient jamais pu obtenir. Cela n'a été qu'un gâchis de vies », a estimé le général Nanayakkara.
Mais pour Colombo, la victoire ne sera totale qu'avec la capture du chef du LTTE, Velupillaï Prabhakaran. Il est invisible depuis 18 mois, peut-être toujours avec ses affidés, en fuite à l'étranger, ou mort. « Nous n'avons aucune information à propos de Prabhakaran », a assuré le ministère de la Défense. Toutefois, le responsable des relations internationales des Tigres a affirmé hier tard dans la soirée que le chef du LTTE se trouvait toujours dans la petite zone de combats. Le chef des Tigres veut arrêter la guerre et démarrer un processus de paix, a ajouté Selvarasa Pathmanathan, interrogé par la chaîne de télévision britannique Channel 4 et qui s'exprimait depuis un endroit inconnu d'Asie du Sud-Est. Dans la matinée, l'armée avait affirmé avoir « sauvé » la totalité des « 50 000 civils otages » des rebelles dans leur enclave. Depuis des semaines, le Sri Lanka assurait que les Tigres retenaient de 15 000 à 20 000 civils tamouls. Ils étaient au moins 50 000 piégés dans les combats, selon l'ONU, après que 115 000 habitants eurent fui le théâtre du conflit fin avril.
La « défaite militaire des terroristes » avait déjà été annoncée samedi par le président nationaliste Mahinda Rajapakse, architecte depuis trois ans - avec son frère Gotabhaya au ministère de la Défense - d'une guerre à outrance et d'une offensive « finale » lancée en janvier dans le Nord-Est. L'ONU estime que 6 500 civils ont probablement été tués entre la fin janvier et la mi-avril.
Le chef de l'État devrait annoncer demain au Parlement la fin officielle du conflit, bien que la fête batte déjà son plein dans le pays.
En raison de la brutalité de cet ultime coup de boutoir, Colombo s'est mis à dos les pays occidentaux. Gordon Brown, Premier ministre de Grande-Bretagne, l'ex-puissance coloniale, l'a averti de « conséquences pour ses actions ». Londres s'est déclaré favorable à une enquête pour « crimes de guerre », visant tant l'armée que les Tigres.
Ces jours-ci, les rebelles ont accusé les militaires d'avoir massacré des milliers de civils. Colombo a rétorqué que la guérilla tirait sur ces « boucliers humains ». Mais aucune information fiable ne filtre d'une région à laquelle seule la Croix-Rouge a accès. Celle-ci s'est dite impuissante face à « une catastrophe humanitaire inimaginable ».
Pour la première fois, le Conseil de sécurité de l'ONU avait sommé mercredi les belligérants d'épargner les civils. Le secrétaire général Ban Ki-moon a dépêché samedi au Sri Lanka son chef de cabinet, Vijay Nambiar. Ce pays de 20 millions d'âmes - dont 74 % de Cinghalais et 12,5 % de Tamouls -, colonisé durant près de 450 ans par les Européens, est sourcilleux sur sa souveraineté. Fort du soutien de la Chine, du Japon ou de la Russie, Colombo a rejeté tous les appels de l'Occident à un cessez-le-feu.