Rechercher
Rechercher

Culture - Exposition

La luxuriante joie de vivre de Michel Harmouch

Passionné, sincère et toujours au service du beau, Michel Harmouch, à travers ses récentes œuvres, invite le regard à pénétrer dans les pinèdes et les clairières de son intimité. À partir de ce soir, 18h00, et jusqu'au 27 mars à la galerie Aïda Cherfan*.
Le carton d'invitation de son exposition, une idée à lui, est déjà une œuvre en soi. Quant à la scénographie de ses toiles sur chevalets, également conçus par lui, elle résume tout le parcours de cet artiste esthète. «Je suis revenu à la peinture par la force des choses», avoue sans ambages ce petit homme à la vitalité débordante. Michel Harmouch, un nom déjà célèbre dans le milieu de l'art et qui côtoie aujourd'hui sous une autre casquette le monde des couleurs.
Ayant commencé à peindre à l'âge de huit ans, ce sont des décennies plus tard et surtout les accidents de la vie qui l'ont installé derrière le chevalet après avoir poursuivi une longue carrière de décorateur et caracolé de maison en maison. Dans les chambres de ses enfants transformées en atelier, l'artiste se dit heureux. Heureux de se réveiller et de dormir à l'heure qu'il veut et de saisir ses pinceaux quand il le désire. «Je vis dans mon cocon et je peins», dit-il avec ses yeux pleins d'étincelles. Et de poursuivre: «C'est ma cinquième exposition et je crois que le décorateur qui m'a fait vivre pendant cinquante ans tend aujourd'hui à s'effacer, laissant la place au peintre. » Et pourtant. Sur ses toiles qu'il a peuplées d'arbres, ses espaces sont encore bien architecturés, sauf que le compas qui les traverse (devenu pinceau) est devenu plus souple, plus libre et plus fou. C'est dans cette évasion vers les grands espaces, vers les sous-bois, les futaies, vers ces troncs d'arbres qui «parlent», selon l'artiste, ou les feuillages bien serrés, que Harmouch retrouve sa tranquillité, son coin de paradis.
Pourquoi les arbres? «J'ai douze mille mètres de terrain à Fakra que j'ai plantés de différents arbres, répond-il tout simplement. Ils ont bien grandi depuis. En travaillant dans le jardin, je ne cesse d'admirer ces troncs aux multiples visages qui évoquent tant de choses. Il ne faut jamais passer à côté de ce qui est beau. » «Frêne hautain, forestier et champêtre, l'arbre premier de tant d'arbres divers...» disait le poète. L'artiste renchérit: «Par contre, à la vision du laid, je mets mes œillères et détourne vivement le regard.» Ce sont ainsi des silhouettes de bois longilignes, robustes et aux allures japonisantes, mais toujours fières, qui semblent sortir du cadre.

Absorber la lumière
Avec sa palette vivante et riche, Michel Harmouch, à l'énergie débordante, tellement qu'elle devient contagieuse, fait exploser une myriade de couleurs et redonne vie à la nature.
«L'Oriental.» C'est par ce nom que l'appelait Fernand Léger, chez qui il avait travaillé durant quelques mois à Paris. Oriental par ses couleurs fraîches, mais aussi authentique et courageux. Outrageusement et passionnément. Il osera ainsi associer les couleurs agressives, comme ce rose qui se marie en toute harmonie avec l'orange, éclabousser de bleu les feuillages denses des arbres. Mais l'artiste s'amuse aussi à assainir ces camaïeux de verts par des îlots de noir et de blanc, et à mélanger les harmonies aquatiques à d'autres teintes de terre et de sable. Il osera également transgresser les règles premières de l'art plastique, à savoir, poser un axe central risquant de partager la toile en deux. «Moi, mon arbre, affirme-t-il avec entêtement, je veux le planter là où je veux dans la toile.»
Chez Michel Harmouch, toutes les cendres deviennent braises et les couleurs se déclinent en diverses harmonies. Vert chlorophylle, gris transpercé de noir, en passant par ces jaunes couleur or. Même ses arbres dénudés en hiver, au crâne échevelé, sentent bon la joie de vivre. Une sarabande de teintes qui recréent les atmosphères chez ce chantre de la nature, ivre de beauté, capable de s'enflammer pour une œuvre et ne s'arrêter que lorsqu'elle est terminée. À d'autres moments, il pourrait revenir sur son travail, s'il n'en est pas convaincu, l'effacer pour en refaire un autre.
Dans cette série d'huiles, Arpenter les allées de Fakra lumineuses et fauves, s'extasier devant un Morning Glory aux couleurs bleuâtres, s'imprégner de l'Aurore, ou encore lézarder dans les sous-bois entre les chênes et les bouleaux sont autant de moments de la nature que magnifie Michel Harmouch. Dans ces cycles de vie, où lascivité se marie avec exubérance, sérénité avec mouvement, il y règne toujours un espoir de perpétuel renouveau. Ces troncs qui s'enracinent dans cet espace pictural et ces bois millénaires parlent de pérennité, de survie et surtout du bonheur d'être là.
Ne serait-on pas tenté de dire, à la manière de Prévert: «Quand la vie est une forêt, chaque jour est un arbre; quand la vie est un arbre, chaque jour est une branche; quand la vie est une branche, chaque jour est une feuille»?
Pour Michel Harmouch, produire le beau n'est-il pas ainsi le meilleur témoignage de son passage dans cette vie terrestre ? Avec panache.

* Galerie Aïda Cherfan, place de l'Étoile. Tél. : 01/983111-222. Ouverte du lundi au samedi, de 10h30 à 19h30.
Le carton d'invitation de son exposition, une idée à lui, est déjà une œuvre en soi. Quant à la scénographie de ses toiles sur chevalets, également conçus par lui, elle résume tout le parcours de cet artiste esthète. «Je suis revenu à la peinture par la force des choses», avoue sans ambages...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut