Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

L’art contemporain libanais et italien sous un même Dôme

Zéna ZALZAL Bâtir des passerelles entre art contemporain italien et libanais : tel est l’objectif de l’exposition Hopes & Doubts (Espoirs et Doutes) qui met en connexion des œuvres d’artistes libanais et italiens. Organisé par l’Institut culturel italien de Beyrouth et la Fondation Merz de Turin, le projet Hopes & Doubts réuni, sous la houlette du curateur Constantino d’Orazio, 8 artistes libanais et 8 artistes italiens dans une même exposition, qui ouvrira ses portes demain samedi 20 décembre, à 18h00, au Dome City Center à Beyrouth, où elle se tiendra jusqu’au 23 décembre. Puis, c’est à Turin qu’elle sera présentée du 22 janvier au 1er mars à la Fondation Merz, offrant ainsi une visibilité internationale aux talents émergents de la scène artistique libanaise. Car c’est vers la nouvelle vague d’artistes libanais que s’est orienté le curateur italien. Lequel voudrait, assure-t-il, privilégier, à travers cette exposition, les rencontres et les échanges entre artistes contemporains libanais et italiens de la même tranche d’âge, c’est-à-dire, à quelques exceptions près, les 20-30 ans. « En dépit de leurs références culturelles différentes, les jeunes artistes libanais partagent avec leurs condisciples italiens des langues, des styles et des vecteurs d’expressions communs », constate-t-il. « Et même si les œuvres italiennes sont beaucoup plus inspirées de l’histoire individuelle de leurs créateurs que celles des Libanais, plus évocatrices d’un contexte sociopolitique, elles gardent des préoccupations communes », indique Constantino d’Orazio. Décrire l’instabilité du monde actuel Les artistes contemporains se concentrent sur la vie de tous les jours et transforment leurs émotions en toiles, photos, sculptures ou installations. « Si la guerre reste un thème récurrent chez les Libanais, la nouvelle génération porte néanmoins un regard plus distancié, plus ironique sur les événements que leurs aînés qui ont vécu la guerre civile. Quant aux artistes italiens, ils partagent avec les Libanais cette forte propension à décrire l’instabilité du monde actuel », signale encore le curateur italien. C’est cette situation de balancement entre « doute et espoir » vécue par toute une génération d’artistes des deux côtés du bassin méditerranéen que met en évidence l’exposition éponyme du Dome City Center, à travers des œuvres présentées en duo. Ces « couples » exprimant les corrélations thématiques ou stylistiques des pièces libanaises et italiennes. Dialogues en duos Ainsi, les toiles de style néo-impressionniste d’Andrea Salvino, dépeignant des scènes de violentes manifestations de rue en Italie dans les années 70, dialoguent avec les « murs de la mémoire de la guerre à Beyrouth », peints en techniques mixtes par Rima Saab comme des paysages impressionnistes modernes. Dans son installation-enregistrement du cri d’un corbeau évoquant ironiquement les bruits d’un garage, Elisabetta Benassi traite de la méprise des apparences, tandis que dans le même registre sonore, Pascal Hachem a élaboré une installation qui lance des marteaux sur un mur et reproduit ainsi le son de la déconstruction et la reconstruction, typique de Beyrouth durant ces dernières décennies. Cartes de Beyrouth Corrélations de cartes urbaines interactives chez Marwan Rechmaoui et Giuseppe Pietroniro. Le premier a sculpté un plan de Beyrouth dans un caoutchouc noir formant un épais tapis sur lequel les visiteurs peuvent identifier les quartiers et les grandes rues de la capitale, tandis que l’artiste italien invite les visiteurs de l’exposition à marquer d’une épingle colorée leurs lieux de résidence ou de travail sur la carte de Beyrouth qu’il a dessinée ! La vie et la mort des plantes et des hommes figurent dans les œuvres de Francesco Gennari et Ginou Choueiri. L’arbre gelé de Gennari est un cyprès, l’arbre des cimetières, qui a été vidé de son sang. Dans ses veines a été réinjecté un liquide spécial pour qu’il reste vert et vivant. L’arbre, qui doit être mort, gît tel un cadavre humain, parce que sans racines ; mais ses feuilles sont vertes et moelleuses. Choueiri, pour sa part, peint sur des centaines de pommes de terre des visages souriant et criant, qui représentent des portraits humains. Les pommes de terre mourront bientôt faute d’avoir trouvé la terre pour y enfoncer leurs racines. Des œuvres qui grimpent au plafond pour Elisabetta Di Maggio et Zena el-Khalil. Les guerriers roses de cette dernière, munis de leurs fils barbelés, semblent faire une descente au Dôme, cet ancien cinéma dévasté par la guerre, alors que Di Maggio révélera une œuvre découpée sur papier blanc, aux formes abstraites évoquant, tout à la fois, des motifs orientaux et ceux, filamenteux, d’une toile d’araignée. Femmes, mémoire, Beyrouth Marzia Migliora et Joanne Issa choisissent l’identité de la femme et son contexte culturel. Migliora présente une série de 33 dessins dans lesquels une petite femme est peinte dans des situations surréelles entre le rêve et la fantaisie pour fuir la vie quotidienne difficile. Les photos d’Issa représentent trois jeunes femmes libanaises contemplant le vide et se cachant sous un arbre vert comme des nymphes modernes. Lina Hakim et Luisa Rabbia partagent leur intérêt pour l’utilisation de différents matériaux. « L’échelle de Jacob » de Hakim est une sculpture faite de tiroirs qui portent les stigmates de ses souvenirs personnels. Lesquels se confondent avec ceux de la ville de Beyrouth. Tandis que Rabbia présente une magnifique œuvre en porcelaine qui représente une végétation envahissant une maison abandonnée...Autre allégorie du souvenir. Michael Fliri et Randa Mirza se retrouvent dans l’absurde. Mirza ouvre une fenêtre surréelle sur un panorama impossible de Beyrouth, qui montre une juxtaposition de ruines et de bâtiments modernes en acier inoxydable. Fliri part de son autoportrait ironique pour penser les différents masques que nous portons tous les jours pour survivre en ces temps cruels. Une exposition intéressante sur plus d’un plan. Notamment parce qu’elle contribue à réfuter l’image parfois stéréotypée que l’on se fait, ici comme à l’étranger, de l’art libanais. * Dome City Center, près de la mosquée al-Amine, au centre-ville. Horaires d’ouverture : du 21 au 23 décembre, de 15h00 à 20h00. L’exposition beyrouthine est sponsorisée par la Banque Libano-Française et Magrabi Optical. * * * Inaugurée en 2004, un peu plus d’un an après la mort de Mario Merz, dans un ancien bâtiment industriel des années trente, la fondation abrite la collection d’œuvres du « père » de l’Arte Povera. La fondation Merz retrace l’histoire d’un peintre-sculpteur, assembleur-installeur, constructeur existentiel et conceptuel, qui perce en 1953 avec un langage pictural expressionniste abstrait. Un artiste-philosophe qui choisit la spirale – sa force, sa poussée, son évolution circulaire, son dynamisme continu, croissant et centrifuge – pour raconter le mouvement cosmique, le cycle continu et régénérant de la nature. La fondation, qui comprend parmi ses dirigeants le directeur du Tate Modern de Londres, s’est engagée à soutenir l’étude, la recherche et la promotion d’initiatives liées à l’art et à la culture contemporains.
Zéna ZALZAL


Bâtir des passerelles entre art contemporain italien et libanais : tel est l’objectif de l’exposition Hopes & Doubts (Espoirs et Doutes) qui met en connexion des œuvres d’artistes libanais et italiens.


Organisé par l’Institut culturel italien de Beyrouth et la Fondation Merz de Turin, le projet Hopes & Doubts réuni, sous la houlette du curateur...