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Actualités - CHRONOLOGIE

Les majorations salariales dans le secteur public : deux signaux négatifs envoyés par la Chambre Tilda ABOU RIZK

« Le fait de légiférer est important en période électorale. » Telle est la boutade lancée par le président de la Chambre, Nabih Berry, à un Fouad Siniora perdu dans ses pensées, au cours des débats qui ont débouché, hier place de l’Étoile, sur les hausses salariales supplémentaires dans le secteur public. Même s’il a employé le ton de la plaisanterie, le président de l’Assemblée a au moins eu le mérite de reconnaître tout haut ce que les parlementaires pensaient tout bas et ce que les Libanais savaient déjà : à savoir que plus qu’une volonté de corriger une injustice, ce sont des considérations politiciennes liées strictement aux prochaines législatives qui motivent aujourd’hui la révision à la hausse des salaires des fonctionnaires. Les chiffres sont impressionnants : chaque année et sur une période de trois ans, l’État devra débourser 1 300 milliards de livres, soit l’équivalent de 800 millions de dollars, pour payer l’effet rétroactif de l’échelle des salaires adoptée en 1998. L’augmentation forfaitaire de 200 mille livres devrait coûter 850 milliards de livres par an, et la hausse de 5 % de l’échelon la bagatelle de 120 milliards de livres. Cerise sur le gâteau : la Chambre étend ses largesses aux officiers à la retraite. Avant les élections, il est effectivement important de n’oublier personne, car apparemment pour chaque livre débloquée, c’est une voix récoltée, et l’on sait l’importance que toutes les parties attachent aux voix des militaires, concentrées pour la plupart au Liban-Nord. Nul ne conteste le principe des augmentations décidées, notamment après une longue période de blocage de majorations salariales, pendant laquelle le pouvoir d’achat des consommateurs a été sérieusement érodé, mais on pouvait croire – on espérait – que la révision des salaires allait se décider dans le cadre d’un vaste projet de réforme administrative promis depuis des années. En ce faisant, le gouvernement, soutenu par le Parlement, aurait fait de deux pierres un coup : moderniser une administration lourde, vieille et pourrie, sans pour autant grever le Trésor, et accentuer l’inflation qui neutralisera l’effet des augmentations données. Mais bon, en temps d’élections, les priorités changent. Cela s’appelle peut-être le sens des responsabilités, la priorité des députés étant de revenir au Parlement pour pouvoir s’occuper, une fois élus pour un autre mandat, des affaires des Libanais. En votant les majorations, en dépit des réserves exprimées par un Fouad Siniora totalement impuissant face aux intérêts politiciens de la majorité et de l’opposition confondues, le Parlement a envoyé un signal négatif aux bailleurs de fonds arabes et occidentaux en montrant que la politique de l’État libanais s’inscrit dans la continuité et que les promesses formulées à la faveur de Paris III ne sont autres que des vœux pieux. Il y a moins d’un mois, l’ambassadeur de France, André Parant, affirmait dans ces pages, consécutivement à la visite du Premier ministre français, François Fillon, que les perspectives de développement des relations franco-libanaises seraient meilleures si des réformes se réalisaient. Un message on ne peut plus clair, mais que les autorités ont superbement ignoré. Avec les surenchères qui ont marqué la réunion parlementaire, la Chambre a envoyé un autre signal négatif, adressé cette fois à la population, en lui montrant, encore une fois, que ce sont les intérêts de ses membres qui priment. Peut-être que les Libanais devraient réfléchir deux fois avant de se rendre aux urnes, surtout qu’en janvier, à la faveur du débat budgétaire, le Parlement aura du mal à contester la politique fiscale du gouvernement si celle-ci prévoit de nouvelles taxes pour renflouer le Trésor. Il y a fort à parier aussi que dans le lot de taxes proposées, aucune mention ne sera faite des empiètements au domaine public maritime et fluvial, qui est censé drainer des sommes importantes au Trésor. Après tout, de nombreux contrevenants appartiennent à la classe politique.
« Le fait de légiférer est important en période électorale. » Telle est la boutade lancée par le président de la Chambre, Nabih Berry, à un Fouad Siniora perdu dans ses pensées, au cours des débats qui ont débouché, hier place de l’Étoile, sur les hausses salariales supplémentaires dans le secteur public.
Même s’il a employé le ton de la plaisanterie, le président de...