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Actualités - CHRONOLOGIE

VIENT DE PARAÎTRE - «?Les obscurcis?» de Vénus Khoury-Ghata Le délire et la révolte des mots…

Trente-quatrième opus de Vénus Khoury-Ghata en devanture des librairies. Opus poétique bien entendu pour l’auteur de «?Bayarmine?» et de «?Sept pierres pour la femme adultère?» qui n’a jamais désavoué sa passion violente pour le monde du Parnasse. Même quand elle écrit des romans, l’amour des mots et la pulsion irrépressible d’un lyrisme exacerbé ne sont jamais loin du bout de sa plume… Aujourd’hui, retour en fanfare aux premiers lieux de son inspiration avec Les obscurcis, recueil de poésie libre, paru aux éditions de Mercure de France (189 pages). Titre bien paradoxalement sombre pour une poésie tout en légèreté et débordante d’images radieuses, souvent heureuses, magnifiant la nature et jetant des ramifications tentaculaires dans tous les sens, même ceux de l’origine et la vie des mots comme la savante recherche d’un linguiste chevronné… Images surréalistes et d’une décapante modernité avec un malicieux clin d’œil à un romantisme suranné, enrobées d’un humour presque noir et très pince-sans-rire. La poésie moderne, sans rimes (ni raison?!) ni corset de quatrains, a-t-elle encore droit de cité dans la littérature contemporaine rongée par une expression «?électronique?» de plus en plus envahissante?et expéditive ? Les amants des mots fins, des associations verbales insolites, des sonorités étranges, des musicalités incantatoires, des dictions magiques, de l’émergence de mondes lointains forment toujours un cercle élitiste (il est vrai assez étroit) qui maintient en vie l’inspiration des poètes de tous bords. Des poètes qui s’affranchissent de toutes prosodies contraignantes et de toutes frontières restrictives… C’est avec cet ardent esprit de liberté et de libération que Vénus Khoury-Ghata aborde le domaine des mots, ouvert brusquement à tous les vents…L’auteur de Au sud du silence et de Terres stagnantes, dans un bain mousseux jouissif et jubilatoire de vocables colorés et odoriférants, se fraye un chemin audacieux à travers un délicieux délire verbal soutenu par une grande musicalité et une débauche d’images saisissantes. Les obscurcis de Vénus Khoury-Ghata, malgré quelques dénonciations sociales et politiques bien évasives mais perceptibles, est aussi un livre d’amitié et d’estime pour des êtres à qui la romancière-poète dédie cette écriture finement ciselée et faussement échevelée. Le délire des mots De Claude Esteban à Dominique de Villepin, en passant par André Brincourt, Anne-Marie Mitchell, Jacques Lovicci, Pierre Brunel, Jean-Guy Pilon, la poésie est ici affaire de complicité littéraire et d’un «?club?» bien fermé où l’on savoure la teneur, la rareté et le goût des mots. Sans que cela frise la préciosité. Délire des mots pour une expression originale et inventive laissant adroitement le lecteur alerte et à l’écoute. Au hasard des pages, on retient cette citation qui en dit long sur le contenu d’une poésie au ton débridé affranchi, à l’impressionnisme encore séduisant :?«?Il est des mots de jardins pauvres qui croisent le fer avec les ronces. Des mots d’origines obscures qui sont l’ordinaire des morts. Les soleils rapides leur envoient des baisers jaunes. L’if silencieux les détourne des abeilles. Mots incolores qui dorment dans les huches avec le consentement du pain, se réveillent avec les miroirs, revêtent leur écho, s’aventurent dans les villes, traversent les bouches sans regarder, boitent des deux pieds, pourrissent au contact des lèvres, terminent leur parcours dans le caniveau avec les lunes qui ont épuisé toute leur réserve d’allumettes.?» Si la dévotion aux mots a la part léonine dans cet ouvrage aux détours capiteux, sinueux et capricieux, la femme, la nature, les parfums, les couleurs, les fleurs et les intermittences du cœur s’y calfeutrent aussi en toute subtile discrétion mais sans affèterie, pudibonderie, fausse délicatesse ou insolence démesurée… La poésie a dans ces pages un sens renouvelé, comme un vénéneux parfum d’Orient fémininement glissé dans la rigueur d’un français brusquement inondé de soleil, d’embrun et de verdure. Les obscurcis de Vénus Khoury-Ghata, habité par une imagination folle et des djinns ludiques, est à remettre entre les mains d’âmes sensibles et d’esprits éclairés, et non de personnes «?speedées?» et aveuglées par le courant strident d’un siècle dédaigneux de tout ce qui n’est pas science précise… Edgar DAVIDIAN
Trente-quatrième opus de Vénus Khoury-Ghata en devanture des librairies. Opus poétique bien entendu pour l’auteur de «?Bayarmine?» et de «?Sept pierres pour la femme adultère?» qui n’a jamais désavoué sa passion violente pour le monde du Parnasse. Même quand elle écrit des romans, l’amour des mots et la pulsion irrépressible d’un lyrisme exacerbé ne sont jamais...