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ENVIRONNEMENT Quand les gorilles gabonais cohabitent avec les forestiers

Un camion chargé de bois file à toute allure sur la piste en latérite d’une concession forestière à Lastourville, au Gabon. À moins de dix mètres de ce vacarme poussiéreux, des chercheurs observent stupéfaits l’emplacement où neuf gorilles viennent de passer la nuit. « C’est la première fois que des “nids” de gorilles sont découverts aussi près d’une route en circulation », explique Max Hurdebourcq, l’initiateur d’une étude du comportement de ces grands singes dans une zone d’exploitation forestière. Ce photographe passionné de nature fait faire le tour du propriétaire. « Ici, désigne-t-il, c’est le nid principal du dos argenté, le grand mâle qui surveille toute la famille placée un peu plus bas ». Le « nid », c’est une sorte de matelas que le primate se construit à l’aide de plantes. Chaque matin, au réveil, le gorille quitte cet emplacement, et il se fabriquera une nouvelle couche, à un autre endroit, le soir suivant. Cette étude encore en cours, menée dans la concession de la Compagnie équatoriale des bois Precious Woods, une des plus grandes du Gabon, a déjà livré des résultats étonnants. D’après Alex Barroso, un primatologue de l’université de Barcelone, les familles de gorilles rencontrées comprennent des femelles avec leurs petits, ce qui suppose une certaine absence de stress. Au cours des trois premiers mois de recherche dans cette forêt dense du centre du Gabon, les contacts avec les gorilles ont été presque quotidiens. Plus fréquents en tout cas qu’initialement envisagé par le primatologue. « Ils semblent habitués aux bruits de la concession, au passage des forestiers », note Max Hurdebourcq. Non loin de la zone où il a trouvé les neuf nids, Gaëtan Ndjanda, jeune pisteur embauché pour ce projet, s’apprête à entrer une fois de plus en forêt en quête des grands singes. Il croise une équipe qui fait, à quelques dizaines de mètres de là, l’inventaire du bois, préalable à son exploitation. « Nous avons vu un gorille hier soir », confirme un forestier. Gaëtan s’avance, à l’aide de sa machette, dans une ancienne piste de débardage qui a servi, il y a quelques années, à extraire le bois coupé. Aujourd’hui, la nature a repris ses droits sur le sentier, recouvert par la végétation. Comme souvent, le pisteur, un ancien chasseur reconverti, sent l’odeur des gorilles. Rapidement, il en repère un perché sur un arbre, et qui, à l’approche de ces visiteurs humains, se laisse glisser le long du tronc. En le suivant, Gaëtan pointe ici une empreinte laissée dans la boue par la main du primate, là des selles fraîches qui permettent de confirmer qu’il s’agit bien d’un gorille. « On vient de voir un gorille, on suit sa trace », chuchote le jeune homme. « S’il nous charge, il ne faut surtout pas bouger. » Dans un pays où les projets visant à « habituer » les gorilles à la présence humaine peinent à décoller, les contacts nombreux enregistrés dans la concession sont encourageants. « Il y a une certaine facilité d’observation ici », fait valoir Max Hurdebourcq. « Les gorilles sont déjà “préhabitués” au passage des humains, et de plus la forêt est quadrillée par les pistes qui facilitent l’accès et où poussent les marantacées, des plantes qu’ils utilisent pour se nourrir et faire leur nid. » Un connaisseur du milieu forestier nuance toutefois cet enthousiasme. « Cette concession est une des plus respectueuses de l’environnement », dit-il. « Cela montre qu’exploitation et conservation de la faune peuvent faire bon ménage, pas forcément que les gorilles apprécient la présence des forestiers. »
Un camion chargé de bois file à toute allure sur la piste en latérite d’une concession forestière à Lastourville, au Gabon. À moins de dix mètres de ce vacarme poussiéreux, des chercheurs observent stupéfaits l’emplacement où neuf gorilles viennent de passer la nuit. « C’est la première fois que des “nids” de gorilles sont découverts aussi près d’une route en...