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Les «  gens du voyage » subissent depuis des siècles persécutions et discriminations Les Roms à la recherche d’une réhabilitation au sein de l’Union européenne Antoine AJOURY

Les amateurs de Tintin se souviennent certainement de l’album intitulé « Les bijoux de la Castafiore » dans lequel les Tsiganes sont injustement accusés du vol des parures de la célèbre cantatrice, alors que le vrai malfaiteur n’est autre qu’une pie voleuse. Comme un grand nombre d’ouvrages d’Hergé, ce livre met en évidence les préjugés d’une société et d’une époque qui, malheureusement, restent toujours valables aujourd’hui.Suscitant toujours la méfiance, subissant persécutions et discriminations, les Roms espèrent enfin leur réhabilitation au sein de l’Union européenne. Les Roms, appelés également «  gens du voyage », forment actuellement une population d’environ 10 millions de personnes parsemées dans presque tous les pays de l’Union européenne. Ils sont ainsi considérés comme la plus importante minorité transnationale du vieux continent, mais aussi celle qui subit les plus graves discriminations au sein de l’UE. Présents en Europe depuis le XIVe siècle, les Roms ont de tout temps souffert des persécutions et du rejet de la population locale, du fait de leur style de vie nomade. Sur le plan social, il y a toujours eu une grande méfiance mutuelle entre les gens du voyage et les habitants des villes et villages. On les traitait de voleurs, de vagabonds, de marginaux ou même de porteurs de la peste. On les accusait d’être incapables d’avoir un travail sédentaire et, de ce fait, d’être acculés à la mendicité ou à la prostitution. À cause de ces croyances, toujours d’actualité dans beaucoup de pays, les Roms furent et sont l’objet d’une suspicion et d’un mépris constants. Le rejet des gens du voyage a eu pour résultat qu’une large partie d’entre eux vivent dans des conditions très difficiles, souvent en marge de la société, dans les pays dans lesquels ils se sont installés. Aujourd’hui, la majorité des Roms se sont en effet sédentarisés. Cette situation s’est souvent traduite sur le plan légal par une série de mesures et de lois très discriminatoires et extrêmement injustes à l’égard des Roms. Dès le XVe siècle, beaucoup de villes leur ferment les portes. Indésirables, ils tombent sous le coup de décrets qui vont de l’expulsion pure et simple à l’emprisonnement, aux mutilations ou même aux exécutions. Réduits en esclavage en Moldavie et en Valachie, traités comme des traîtres à la solde des Turcs par le Reichstag, la persécution des Roms atteint son apogée sous le IIIe Reich, durant la Seconde Guerre mondiale, avec l’extermination de près d’un demi-million d’entre eux. Signe de l’indifférence totale à l’encontre de cette minorité, le sort des Roms n’a même pas été évoqué au procès de Nuremberg. Aujourd’hui encore, les mouvements d’extrême droite en Europe stigmatisent les gens du voyage et leur font porter la responsabilité du chômage ou de l’insécurité. Les Roms sont le parfait bouc émissaire en temps de crise. Pire, les différents sondages qui ont eu lieu récemment mettent en évidence le rejet des Roms, aussi bien en Europe de l’Ouest qu’en Europe de l’Est. L’ex-commissaire aux droits de l’homme en Europe, Alvaro Gil-Robles, constate ainsi dans son rapport, en 2006, que «  les sentiments anti-Roms sont si profondément ancrés que la discrimination à leur encontre semble généralement tolérée et ne pas être considérée comme illégale ». Fin 2007, le sentiment anti-Rom a atteint son paroxysme en Italie quand un Rom agressa mortellement une Italienne, entraînant une vague de réactions racistes et xénophobes digne des plus virulents discours nazis. Le rapport de la Commission contre le racisme et l’intolérance (ECRI) pointe également régulièrement le doigt vers les violations que subissent les Roms dans les pays européens. Ainsi, en Lettonie, les communautés roms sont discriminées dans l’accès à l’emploi, au logement et à l’éducation, estime le dernier rapport de l’ECRI concernant ce pays, publié en février 2008. Les Roms font aussi l’objet de discrimination de la part de la police, en particulier lors des contrôles d’identité et en matière de lutte contre les stupéfiants, selon des informations recueillies par l’ECRI. Le rapport épingle également l’Ukraine, où la situation des Roms est tout aussi déplorable. «  La malnutrition reste un problème, seule la moitié des Roms ayant les moyens de manger chaque jour », affirme l’ECRI qui fait par ailleurs état d’une hausse des maladies infectieuses et cardio-vasculaires au sein de cette communauté. Dans ce contexte, le Conseil de l’Europe, qui a pris conscience des risques que représente le problème rom à long terme pour la cohésion sociale des pays membres de l’UE, tente depuis 1993 d’améliorer leur situation. La question des gens du voyage se trouve au cœur des trois priorités établies par le Conseil de l’Europe, à savoir, la protection des minorités, la lutte contre le racisme et l’intolérance, et le combat contre l’exclusion sociale. Afin d’introduire ces questions dans un cadre institutionnel, l’UE a mis sur pied un groupe de spécialistes chargés de conseiller les États membres pour tout ce qui concerne les Roms. Toutefois, Rudko Kawczynski, fondateur de l’Union des Roms et des Sintis, et membre du European Roma Rights Center (ERRC), estime que l’exclusion qui affecte la population rom vient du fait que les pays européens sont fondés sur l’idée de l’État-nation. «  La pauvreté, le manque d’éducation, le chômage… sont les conséquences d’une société hostile aux Roms. Ce sont donc les symptômes et non pas le fond du problème », explique-t-il. M. Kawczynski estime néanmoins que «  les Roms (en tant que minorités) doivent reconnaître que la responsabilité n’incombe pas uniquement à la majorité. Tous les deux sont responsables. Il convient donc aux Roms de prendre leur destin en main, car eux seuls peuvent influencer leur avenir ». Les efforts effectués par les gouvernements européens et par les institutions de l’UE doivent rencontrer en face une volonté des populations roms de mieux se faire comprendre, d’offrir une meilleure image et d’afficher une détermination à s’intégrer qui soit plus courageuse.
Les amateurs de Tintin se souviennent certainement de l’album intitulé « Les bijoux de la Castafiore » dans lequel les Tsiganes sont injustement accusés du vol des parures de la célèbre cantatrice, alors que le vrai malfaiteur n’est autre qu’une pie voleuse. Comme un grand nombre d’ouvrages d’Hergé, ce livre met en évidence les préjugés d’une société et d’une...