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ÉVÉNEMENT - Colloque à Paris sur la parité et la diversité dans l’emploi Le Liban en vedette à l’Unesco PARIS, de Carole DAGHER

Le Liban avait une place de choix au colloque « Diversité, parité et emploi », organisé le mardi 29 janvier à Paris à l’Unesco par l’Association du dialogue interculturel et interreligieux (ADICR), et placé sous le haut patronage du directeur général de l’organisation, Koïchiro Matsuura. Une manifestation qui a pu avoir lieu grâce au soutien de la délégation du Liban auprès de l’Unesco et en collaboration avec diverses entreprises et organisations françaises. L’initiatrice du forum et présidente de l’ADICR, Samar Sassine, avait réuni des personnalités du monde des médias, de l’économie et de la politique pour prendre part aux deux séances prévues. Ainsi, on notait la présence de Jacques Attali, parrain du forum ; Sylvie Fadlallah, ambassadrice du Liban auprès de l’Unesco ; Hans d’Orville, sous-directeur général pour la planification stratégique de l’Unesco ; Marie-Françoise Colombani, éditorialiste au magazine Elle ; Édouard Pellet, chargé de la diversité à France-Télévision ; Élie Abboud, député de l’Hérault (Béziers) et d’origine libanaise ; Soumia Malinbaum, porte-parole « diversité » au Medef, qui regroupe le patronat français sous la présidence de Laurence Parisot, ainsi qu’un représentant de la Chambre de commerce de Paris… Les interventions ont été centrées sur l’importance de la diversité et de la parité dans la vie professionnelle et culturelle, le rôle des médias à cet égard, les moyens d’aider les jeunes issus des quartiers difficiles et de l’immigration à la création d’entreprises. Des témoignages de personnes ayant réussi ont illustré le colloque. Il y a eu le témoignage d’Anne-Dominique Toussaint, productrice du film de Nadine Labaki, Caramel, qui a évoqué l’impact de ce film dans la mesure où il constitue un témoignage des plus éloquents sur les femmes et la société au Liban. Celui du député Élie Abboud, médecin cardiologue ayant quitté le Liban à l’âge de dix-huit ans, profondément marqué par un film de Maroun Baghdadi sur la guerre. « J’avais besoin de m’engager dans la vie publique et c’est ce que j’ai fait en France », a-t-il précisé. D’autres témoignages de jeunes issus des banlieues et ayant créé leur propre entreprise ont clôturé les séances. Perspectives pour l’égalité dans l’emploi Les interventions de la journée ont été marquées par des réflexions sur le thème du colloque. Si Hans d’Orville devait mettre l’accent sur l’importance qu’attache l’Unesco à l’éducation afin de promouvoir l’égalité dans les différents pays, Jacques Attali, auteur des 316 propositions destinées à remettre l’Hexagone sur les rails de la croissance, a admirablement résumé son « formidable voyage » à travers la France de l’emploi et de l’économie : « Des centaines d’auditions, des dizaines de milliers de suggestions, des visites passionnantes. » Au bout de ce voyage, plusieurs observations ont été dégagées : « La désespérance croissante des plus fragiles (jeunes, femmes, seniors, minorités de toute nature), ensuite le fait que les femmes sont encore loin d’accéder aux postes de décision, tant dans les entreprises ou dans la politique. Et une conviction : la nécessité des quotas, même provisoires (durée de 15 ans) pour garantir la parité et la diversité dans l’emploi, mais aussi dans les lieux de pouvoir (partis politiques, syndicats, entreprises). Partout dans le monde, la ségrégation à l’emploi est jointe à une ségrégation au crédit. Or, au niveau des micro-crédits alloués aux petites entreprises, une constatation s’impose : quand une femme emprunte, sa première priorité est de rembourser, sa deuxième priorité est son enfant, sa troisième est son mari et la quatrième, enfin, c’est elle-même. Avec les hommes, c’est l’inverse. » Pour Jacques Attali : « Le potentiel de changement commence par les crèches. Tout ce qui n’est pas fait dans la prime enfance est perdu, d’où l’importance de l’assistance maternelle. » Le Liban avec Fadlallah Sylvie Fadlallah, ambassadrice du Liban près l’Unesco, devait évoquer la situation de la femme libanaise ainsi que les obstacles économiques, juridiques, sociaux et culturels qui se dressent face à l’égalité des hommes et des femmes. Soulignant les nombreuses discriminations qui existent dans le droit positif, comme l’accès à la terre, au crédit, les codes de la famille, Fadlallah a indiqué que depuis la IVe Conférence internationale des femmes qui s’est déroulée à Pékin en 1995, les violences fondées sur le sexe n’ont pas reculé de manière significative et la mondialisation sans régulation a pu affecter la situation des plus faibles, notamment des femmes. Elle a souligné que dans les pays arabes, la progression la plus significative dans la situation des femmes s’inscrit dans les domaines de l’éducation et de la santé. Quant à la proportion des femmes parlementaires, elle y est la plus faible au monde : 6,4 % en 2004. En 2005, les Nations unies ont procédé à l’évaluation de la plate-forme d’action de Pékin, dix ans après, et ont ainsi relevé qu’il existe dans de nombreux pays des dispositifs ouvertement discriminatoires dans les domaines du statut personnel, du droit pénal, du droit du travail et du droit commercial, des lois qui régissent le mariage et les relations familiales et de la loi sur la nationalité. « La situation de la femme au Liban apparaît fortement contrastée, explique encore Fadlallah. Le nombre de femmes médecins, journalistes, avocats, ingénieurs augmente régulièrement. Cependant, malgré leurs diplômes, les femmes libanaises n’exercent pas toujours une activité économique. Elles étaient 14,7 % en 1997, elles sont aujourd’hui 23 % (…) C’est dans l’enseignement que le taux de féminisation est le plus élevé : 70 % des enseignants (public et privé confondus) sont des femmes. Après l’enseignement, c’est dans la magistrature que les filles d’Ève ont trouvé une place active, puisque leur taux est de 30 %. Mais curieusement, elles ne représentaient en 2000 que 8,5 % des fonctionnaires de l’Administration publique. » En 2003, il n’y avait que 4 femmes ambassadeurs, précise encore Mme Fadlallah. Mais « chez les jeunes diplomates qui seront les ambassadeurs de demain, le taux de féminisation est beaucoup plus important ». De même « dans l’Administration, il n’y avait que six directrices générales. Et aujourd’hui, il y a une seule ministre et 6 députés femmes sur 128. On comprend alors qu’en 2007, le Liban occupe la 117e place sur les 189 Parlements recensés par l’Union interparlementaire pour ce qui est de la parité au Parlement. Et encore ! La plupart des femmes députés ne doivent leur élection qu’à un père, un époux ou un frère décédé ou assassiné. Comme on dit chez nous : “Les femmes entrent en politique en habit de deuil”. » L’ambassadrice a également évoqué les obstacles discriminatoires sur le plan légal, notamment le code de la famille ou le droit de succession où, dans certaines communautés, la fille reçoit la moitié de la part du garçon, ou encore le code pénal qui retient les circonstances atténuantes pour les crimes dits « d’honneur », ou enfin le code de la nationalité, où seul le père peut transmettre à ses enfants la nationnalité. Si le Liban a ratifié en 1996 la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes, il reste que la situation économique qui se dégrade et la priorité allant aux préoccupations sécuritaires et politiques empêchent des avancées significatives vers l’abolition des textes discriminatoires. Dans le monde arabe, si les résistances à l’égalité invoquent la tradition et les croyances, certaines approches visent à instrumentaliser la situation des femmes en vue d’objectifs politiques qui n’ont rien à voir avec leur libération. « Il n’y a pas de modèle unique » pour promouvoir l’égalité et « l’on ne saurait faire progresser l’égalité en stigmatisant telle ou telle culture ». Concert Ce colloque devait être couronné, en soirée, par un concert donné par le grand pianiste Abdel Rahman el-Bacha. Une manifestation organisée dans le grand auditorium de l’Unesco et dont les recettes serviraient à octroyer des bourses scolaires aux jeunes filles des milieux défavorisés au Liban. Au programme de ce concert : Beethoven, Chopin, Albéniz et Stravinsky. Présentés par Mme Samar Sassine, le directeur général de l’Unesco, M. Matsuura, et Jean-Marie Bockuel, secrétaire d’État chargé de la Coopération et de la Francophonie, devaient prononcer chacun une brève allocution sur le rôle de l’Unesco dans la promotion de l’égalité des chances et du soutien au Liban en cette période délicate qu’il traverse.
Le Liban avait une place de choix au colloque « Diversité, parité et emploi », organisé le mardi 29 janvier à Paris à l’Unesco par l’Association du dialogue interculturel et interreligieux (ADICR), et placé sous le haut patronage du directeur général de l’organisation, Koïchiro Matsuura. Une manifestation qui a pu avoir lieu grâce au soutien de la délégation du...