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Naissance d’une nation : le Liban indissolublement lié aux maronites

Le Liban et les maronites sont indissolublement liés, dans l’esprit de Martiniano Roncaglia. Il le dira dans un grand ouvrage de 500 pages, Les maronites, communauté, peuple, nation, publié en 1999 par la Notre-Dame University (NDU Press). L’interrelation entre une histoire civile et une conscience religieuse avait déjà fasciné bien des historiens. Nous avons rendu compte, à l’époque, de cet ouvrage écrit par un homme qui a été témoin de notre guerre civile. L’ouvrage est moins une histoire des maronites en bonne et due forme que « des pages d’histoire et de chronique ». Ce qui intéresse avant tout Roncaglia, c’est de comprendre le mécanisme qui a permis à la communauté regroupée autour du nom de saint Maron (car saint Maron, lui-même, n’a rien fondé), d’évoluer pour devenir un peuple et ensuite une « nation », c’est-à-dire un peuple avec un projet national et un territoire. L’ouvrage analyse le processus qui a fait des maronites le facteur principal de la conscience identitaire libanaise. L’auteur cite, à ce sujet, une phrase emblématique de Béchir Gemayel : « Attaqués comme chrétiens, nous nous sommes défendus comme libanais. » Pour comprendre ce mécanisme, l’historien doit se contenter de « beaucoup d’hypothèses » et de « peu de certitudes », assure Roncaglia, qui écrit : « L’Église maronite était déjà une communauté ecclésiale et monastique solidement structurée avant l’arrivée des croisés au XIIe siècle, grâce à sa fidélité à l’héritage syriaque et antiochien qui se transforma peu à peu en identité spécifique d’une catholicité orientale qui résistera à toutes les sollicitations extérieures. » Pour l’historien, l’une des clés de compréhension de cette évolution, c’est « l’esprit d’ouverture, d’acceptation et d’adoption des courants culturels (…) dans le changement des situations historiques » qui est, selon Roncaglia, confirmé dans ce point de vue par de nombreux observateurs de la société libanaise, « une caractéristique de l’identité culturelle maronite ». Selon l’orientaliste, c’est cette « malléabilité » qui permit aux maronites, après l’arrivée de l’islam dans la région, au VIIe siècle, « de s’emparer peu à peu du véhicule de toute civilisation : la langue ». Du syriaque à l’arabe « L’équilibre culturel rompu par les arabophones d’Arabie a été rétabli par les maronites, qui firent en douceur le passage de l’écriture syriaque à l’arabe », notamment grâce au « karshuni », l’arabe écrit avec des caractères syriaques, montre Roncaglia. Et de conclure sur ce point en affirmant : « D’une langue considérée comme essentiellement coranique par les musulmans et par les orientalistes, ils (les maronites) ont fait une langue parallèle chrétienne dans le plein respect des identités coraniques et biblico-chrétiennes (…) L’histoire montre que jamais les maronites n’ont essayé de dévaloriser la langue et la civilisation arabes (…) Il n’y a même pas de polémique contre les musulmans : ce genre de littérature leur est pratiquement étranger. » Au fil des pages, Roncaglia brosse un portrait des maronites : une communauté faite d’un mélange paradoxal d’ouverture – au VXIIe siècle, on disait à Rome « savant comme un maronite » –, et d’orthodoxie religieuse – Roncaglia estime que les maronites ont défendu la foi chalcédonienne. Cela s’inscrivant, à partir de l’an 745, et grâce à l’action de saint Jean-Maron, dans le cadre d’une structure socioreligieuse établie dans une base territoriale bien définie, la montagne libanaise. L’une des originalités des maronites étant d’être restés groupés : il n’y aura pas de maronites orthodoxes ou protestants. Bien entendu, ces données ne rendent pas compte de l’époque moderne. Roncaglia parle de l’évolution de l’identité maronite vers l’identité libanaise, tout en escomptant que cette évolution se fera pour tous les groupes socioculturels coexistant à l’intérieur de cette entité géographique et géopolitique appelée Liban, « qui leur permet d’exercer leur liberté religieuse en toute convivialité ». F.N.
Le Liban et les maronites sont indissolublement liés, dans l’esprit de Martiniano Roncaglia. Il le dira dans un grand ouvrage de 500 pages, Les maronites, communauté, peuple, nation, publié en 1999 par la Notre-Dame University (NDU Press). L’interrelation entre une histoire civile et une conscience religieuse avait déjà fasciné bien des historiens.
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