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EXPOSITION - À partir de ce soir, « Pourquoi faites-vous cette tête-là ? » à la galerie Alice Mogabgab Samir Tabet tombe le masque

Il est à la fois tous les personnages qui sortent de son imagination nostalgique. Ce philosophe à la recherche d’un monde meilleur et plus libre qui hante le tableau. Ce poète qui pleure encore Florence, cet artiste aussi pudique que l’œuf, le seul, qu’il a fait figurer sur une toile, auprès des visages sortis d’une autre époque. Et même cette coccinelle qui se balade dans sa composition « Hommage à Mobius ». Il est sans cesse en quête d’Harmonies, de Lumière, d’Ombre diffuse ou saturée et, son rêve ultime, d’une Composition blanche. Samir Tabet, dans cette exposition-promenade de la Renaissance au XXIe siècle, continue, lui-même surpris, à surprendre. À 85 ans, le gentleman peintre commence à se trouver. Le résultat est puissant, maîtrisé, épuré, pour ne garder que l’essentiel d’une toile. « Sa simple expression : l’amour ». « Pourquoi faites-vous cette tête-là ? » Drôle de question, qui se pose à ces têtes d’illuminés figurant sur les 12 portraits. Elle se pose, nous dit-on, aux amis de Samir Tabet, qui en font une tête, ces derniers temps. Et on les comprend, hélas ! Ou, peut-être, ce sont tout simplement ses compagnons d’atelier qui partagent la solitude et l’inspiration du peintre, avant de s’exprimer sur la toile, et qui lui demandent pourquoi fait-il, une fois de plus, cette tête d’éternel insatisfait ? Car le peintre-à-plein-temps, qui n’a rien de mondain, qui peint tout le temps, tous les jours, depuis qu’un 7 janvier 1985 il a « retrouvé sa liberté » et son rêve de jeunesse, reste toujours à la recherche de ces rares états de grâce ou, « Pfeut ! », tout est dit avec un coup de pinceau. Cérébral, carré, l’esprit cartésien, Samir Tabet ne s’est jamais perdu dans les maladresses de l’improvisation, dans les dédales d’une passion qui lui ferait perdre la tête. C’est avec l’amour, ce sentiment supérieur, mêlé à la spiritualité, qu’il peut aspirer au bonheur. Même si les portraits restent une torture permanente, qu’il a, comme il l’avoue en s’emportant, comme il le pense à tort, « fait beaucoup et raté souvent ». « Je donne mes excuses, poursuit-il, avec cette élégance qui le distingue, à tous ceux, toutes celles, surtout, qui ont posé pour moi. Sans doute ai-je toujours été très impressionné par la beauté des femmes, au point de ne plus contrôler la situation ! » Dans cette exposition, Tabet affiche une douzaine de portraits entre lesquels une femme, Béatrice, s’est glissée en intruse. Beauté grecque, parmi des hommes, prophètes, ermites, alchimistes, que l’artiste a voulus « moins européens et plus proches de nous. Je les ai voulus noirs, noirauds, le nez crochu, un peu comme moi ! » N’en déplaise à Samir Tabet, son coup de pinceau nerveux, qui ne pardonne aucune erreur, qui ne camoufle aucune maladresse, a donné naissance à des portraits puissants, monochromes pour la plupart, inspirés par Fayoum et par les maîtres florentins qui lui avaient tout appris, dans le passé. Et dont il n’a rien oublié. Compositions Le deuxième volet de cette exposition est constitué d’une vingtaine de surprenantes compositions géométriques. Décomposition de formes, de carrés, délicates fentes, voiles soulevés, lentement, pour découvrir un univers de pureté. Maturation d’un travail longuement pensé, composé, qui ne retient plus que la forme ultime, la couleur autosuffisante. Tabet a jeté le masque, abandonné le compas, les pommes, poires, les natures mortes. Le scientifique ne revendique plus que ses angles droits et ses carrés. « Ce n’est pas une incapacité de faire autre chose, précise-t-il. Je connais le métier et surtout le respect du métier. Il en faut beaucoup et beaucoup de méditation pour réduire une toile à sa plus simple expression. La toile est belle en elle-même, plus on appose des détails, plus on la salit. Il faut réussir à produire quelque chose d’agréable, qui transmette de l’émotion, avec le minimum de signes et de couleurs. » L’objectif est atteint dans cette superposition de plans, ce jeu d’ombres et de lumière, ces toiles magiques que l’on peut regarder et apprécier dans tous les sens. Et qui posent des questions dans une ambiance de grande sérénité. « Je peins par amour et non par nécessité, rappelle Samir Tabet, qui continue d’offrir, dans la plus grande discrétion, l’intégralité des bénéfices de ses expositions au profit de bourses d’étudiants. Je peux me permettre d’être à contre-courant de ce qui se passe, je l’ai d’ailleurs toujours été. Je suis un homme libre. Maintenant, je cherche autre chose, une étude très poussée de la simplification et du dépouillement. Un tableau entièrement blanc sur une toile en lin, l’absolue vérité… ! » Et de conclure, lui qui n’a jamais exposé une de ses œuvres dans sa maison : « Ce tableau, je l’encadrerai sûrement chez moi ! » Carla HENOUD * L’exposition se poursuivra jusqu’au 30 novembre.
Il est à la fois tous les personnages qui sortent de son imagination nostalgique. Ce philosophe à la recherche d’un monde meilleur et plus libre qui hante le tableau. Ce poète qui pleure encore Florence, cet artiste aussi pudique que l’œuf, le seul, qu’il a fait figurer sur une toile, auprès des visages sortis d’une autre époque. Et même cette coccinelle qui se balade dans sa...