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Actualités - OPINION

Lettre ouverte aux désenchantés : le Liban joue sa renaissance et sa vie

Perfide Albion : tout sauveur de la patrie qu’il ait été, Winston Churchill (W.C. pour les intimes) a été viré comme un malpropre par les Grands-Bretons, lors des législatives de 45. Mais c’était après la guerre, et la démocratie, avec son cortège d’avanies politiciennes, reprenait ses droits. Sur le sentiment, le sentiment national, souverain en temps d’hostilités. Cela nous rappelle deux choses. D’abord, pendant l’abominable guerre de la Montagne, des spécialistes de l’écoute affirment avoir intercepté un échange de messages entre Walid Joumblatt et ses hommes qui lui signalaient avoir été surpris de nuit. Il leur aurait rétorqué en substance : « Celui qui se bat ne dort pas. » Aujourd’hui, le Liban de l’indépendance se bat encore. Et moins que jamais il ne doit dormir sur une couronne de lauriers encore trop mal fixée sur sa tête. Ensuite, les aounistes ont justifié leur récente participation à la partielle du Metn par la primauté de la démocratie sur le sentiment. Confirmant ainsi que, contrairement à leurs anciens camarades de lutte anti-tutelle, ils ne croient pas que le pays soit encore en guerre. Faites ce qu’ils disent, ne faites pas ce qu’ils font… C’est la consigne du Seigneur par rapport à l’obéissance due aux préceptes des religieux, pour faillibles qu’ils soient dans leur comportement d’hommes. Or les évêques maronites ont tranché net. D’abord en frappant d’un anathème à peine voilé, pour ne pas dire d’excommunication, les députés qui trahiraient le devoir, national, d’élire un président. Puis en définissant les qualifications requises. Probité, compétence, expérience, facultés de rassembleur. Mais, surtout, attachement aux constantes nationales bien comprises de souveraineté, interne et externe, d’État de droit seul armé, de libre décision, d’intégrité territoriale, de coexistence et d’indépendance. Partant de là, cet arbitre d’autorité morale incontestée qu’est Bkerké met un point final à la vaine controverse sémantique sur un choix commun. Un président d’entente, de consensus ou de compromis ? Peu importe, pourvu qu’il soit vraiment (et constamment…) libanais. En ses tréfonds. En sa foi. L’engagement revêt donc une dimension quasi spirituelle. Mais aussi de lutte pour la survie nationale éminemment temporelle, totalement concrète. Un cadre de guerre de défense, car nous y restons en plein, où les considérations tactiques sont non seulement permises, mais encore hautement souhaitables. À condition qu’elles servent une stratégie découlant de la fidélité aux fondamentaux précités. Cela pour dire qu’il est bon d’avoir en garnison des modérés et des radicaux, de jouer l’ouverture ou le tour de vis. Mais en prenant garde de ne pas glisser hors de son camp, comme l’ont fait certains après la révolution du Cèdre. Cela pour dire aussi deux choses complémentaires. D’abord, que les tièdes, le Seigneur les vomit. Et la patrie aussi, quand il s’agit d’enfants prodigues, de quasi-renégats. Ce terme englobant essentiellement le ventre mou du pays, cette masse informe qui répète chaque jour, sans se lasser, qu’elle est lasse des querelles politiques. Qu’il faut renvoyer dos à dos dans leurs foyers privés défenseurs de l’autonomie et attaquants télécommandés. Sans vouloir comprendre que la bataille, c’est, d’une part, contre un ennemi mortel du dehors. Et même deux. Et, d’autre part, contre le projet d’un autre Liban, fascisé autant que théocratisé à l’iranienne. Ou si l’on veut, pour faire plus court, contre la dislocation, la partition. Que certains souhaitent d’ailleurs. En faisant valoir que la formule a dramatiquement échoué et qu’il vaut mieux divorcer à l’amiable. En ignorant cette question toute bête : comment l’un ou l’autre des mini-États projetés pourrait-il survivre, non seulement face à ses difficultés économiques, mais aussi et surtout face aux divisions politiques certaines qui le rongeraient. Pour ne pas rester dans le flou, et pour citer au hasard quatre exemples, qu’adviendrait-il de la portion dévolue aux chrétiens, soumise au conflit Aoun-Geagea ? Chez les chiites, quid d’Amal face au Hezbollah ? Pour les sunnites, où irait l’allégeance, au Beyrouth de Hariri ou au Tripoli-Saïda de Karamé et Saad ? Enfin, que ferait Joumblatt avec Arslane ou même avec ses chrétiens ? Le second point concernant la vague de désenchantement est que le 14 Mars ne s’en préoccupe pas assez. Alors que le 8 Mars trouve là un terreau inespéré d’alliés objectifs, puisque passivité et négativisme sont proches cousins. Bref, il faut éveiller, ou réveiller, chez tout bon Libanais le sens de l’urgence dans laquelle nous sommes plongés. Or actuellement, il n’y a pratiquement plus que Joumblatt pour clamer que la guerre n’est pas finie, loin de là. Et que son évolution, peut-être même son issue, dépend de la présidentielle. Jean ISSA
Perfide Albion : tout sauveur de la patrie qu’il ait été, Winston Churchill (W.C. pour les intimes) a été viré comme un malpropre par les Grands-Bretons, lors des législatives de 45. Mais c’était après la guerre, et la démocratie, avec son cortège d’avanies politiciennes, reprenait ses droits. Sur le sentiment, le sentiment national, souverain en temps d’hostilités.
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