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PORTRAIT D’ARTISTE Le plus dandy des ténors Ian Bostridge : de la philosophie au belcanto…

Un dandy doublé d’un intellectuel à la voix de porphyre. Physique de play-boy à la Adrian Brody, Ian Bostridge est de ces ténors qui ont à la fois étonné et séduit l’auditoire. Nez en épervier à la Chopin, cheveux auburn drus, lèvres sensuelles, regard fiévreux, silhouette fine de jeune homme tourmenté (les jaloux diront de sous-alimenté), voilà un personnage nimbé d’un ténébreux romantisme. Né à Londres le 25 décembre 1964, Ian Bostridge ne semblait guère prédisposé à une carrière placée sous le signe des gammes et des vocalises. Au contraire, après des études à l’école de Westminster, sa double formation d’historien et de philosophe à Oxford et Cambridge le prédestinait plutôt aux chaires universitaires, aux cours ex cathedra et au monde de la pensée. Sans crier gare, sa voix, celle qui triomphe aujourd’hui de Purcell et Monteverdi à Haendel, fait surface et s’impose. Grand virage en 1991 lorsqu’il enlève, haut la main, en grandes envolées d’airain, de sa voix coulée dans du bronze, un concours pour jeunes chanteurs. Avec son physique avantageux, les richesses d’un timbre exceptionnel, la palette d’une culture variée, les contours d’une personnalité complexe (un livre qu’il écrit sur La sorcellerie et ses transformations le place dans la catégorie des originaux), Ian Bostridge débute avec éclat en 1993 au Wigmore Hall avec du Purcell. Et comme dans un rêve, évoluant naturellement dans la blonde Albion et dans un milieu aisé et intellectuel (sa femme et son frère font partie des milieux de la critique britannique), le jeune ténor décroche des rôles de plus en plus ambitieux et enregistre, sans coup férir, dans de grandes maisons tels Hyperion records, Deutsche Gramaphone et Erato. Il est applaudi de Paris à Stockholm en passant par Francfort, Bruxelles, Amsterdam, Venise, Lyon, Cologne et Édimbourg. Outre-atlantique, il fera une tournée couronnée de succès en Amérique du Nord. De Haendel à Britten en passant par Schubert… Son répertoire ? Assez surprenant, il faut en convenir, car il allie l’opéra aux récitals en jetant des ramifications qui vont des partitions du baroque aux contemporains en passant par les grands romantiques. En bon sujet de Sa Gracieuse Majesté, on le croise d’abord dans Le Songe d’une nuit d’été de Benjamin Britten, il s’illustre ensuite dans les lieders de Schumann et Schubert (dont le fabuleux Winterreise), pointe dans L’enlèvement du sérail de Mozart, fait son tour de magie avec le Tamino de La flûte enchantée, émeut dans les Cantates de Bach, chante du Wagner et campe un impitoyable Néron à Munich dans Le couronnement de Poppée… Il tourne un film avec David Alden pour Le Voyage en hiver de Schubert et reçoit en 1996 le Gramophone, un prestigieux prix-récompense pour solo vocal. Pour certains, Ian Bostridge est un vrai provocateur dans l’agencement de ses programmes (concilier F. Poulenc et H. Wolf, par exemple, a été très contesté), pour d’autres, il devrait perfectionner davantage sa diction en français sous l’influence d’accents très « british » et, last but not least, les puristes du bel canto voient d’un mauvais œil son attachement à la philosophie, à l’histoire et aux phénomènes de sorcellerie. Peu importe tous ces commentaires au jeune ténor qui a donné, entre-temps, la réplique à des musiciens du calibre de Rostropovitch, sir Charles Mackerras, Colin Davis, sir Simon Rattle, sir Neville Marriner… Tout en poursuivant sa carrière de chanteur d’opéra, Ian Bostridge a le luxe de pouvoir choisir ce qui convient le mieux à la chaleur et la lumière de sa voix. Tout en s’adonnant au plaisir d’écrire, car il signe régulièrement des articles sur la musique et le chant, dans des revues tels le Supplément littéraire du Times, le BBC Magazine Music et bien d’autres tribunes pour s’exprimer sur la culture. À quarante-trois ans, la discographie d’Ian Bostridge, tout en étant assez fournie et impressionnante, ne semble pas avoir livré les dernières notes d’un chanteur atypique à qui tout semble réussir… Pour mieux le retrouver, pour le moment, ce magnifique Voyage en hiver de Schubert, où malgré le froid immense d’une saison glacée, sa voix a toute la chaleur du monde. Edgar DAVIDIAN
Un dandy doublé d’un intellectuel à la voix de porphyre. Physique de play-boy à la Adrian Brody, Ian Bostridge est de ces ténors qui ont à la fois étonné et séduit l’auditoire. Nez en épervier à la Chopin, cheveux auburn drus, lèvres sensuelles, regard fiévreux, silhouette fine de jeune homme tourmenté (les jaloux diront de sous-alimenté), voilà un personnage nimbé d’un...