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SOCIÉTÉ - Le phénomène reste encore marginal dans ce pays rural Au Tadjikistan, des jeunes musulmanes défient la tradition avec le football

Sur un terrain de foot de Douchanbé, capitale de Tadjikistan, de jeunes Tadjikes s’entraînent sans relâche, certaines rêvant de devenir des footballeuses professionnelles, défiant ainsi les traditions musulmanes de ce pays d’Asie centrale. «Ma mère était contre mon choix, mais mon père lui a dit de me laisser jouer », confie parmi elles Sitora Rakhimova, 14 ans. « Maintenant mes parents viennent me voir jouer. Et à la maison, nous regardons ensemble les matches de foot à la télé. Même ma mère y prend goût ! » ajoute l’adolescente, membre de l’équipe de football féminin Hirondelle. Cette équipe, créée en avril avec le soutien de la Fédération internationale de football (FIFA), fait cependant encore office de précurseur dans le pays, même si la Fédération tadjike envisage de créer dans les régions, avec le soutien financier de la FIFA, des écoles de foot féminin. Touchant essentiellement la population urbaine et éduquée, le phénomène reste encore marginal dans ce pays très rural, comme dans toute l’Asie centrale, avec seulement cinq équipes féminines au Tadjikistan. La sociologue tadjike Sabokhat Alimova souligne les blocages dans une société où les femmes restent une minorité à faire des études, malgré une politique de discrimination positive, avec un quota de places à l’université pour les femmes originaires de régions reculées du pays. Il y a certes quelques femmes députées ou vice-ministres, des femmes médecins. Mais dans les campagnes, où vivent les deux tiers des sept millions de Tadjiks, l’heure est encore aux mariages arrangés. « Ce sont les jeunes filles modernes, des villes, qui font du sport. Mais dans les campagnes, leurs parents leur interdisent formellement de faire du sport, ils ne veulent pas que leurs filles puissent être vues par des hommes en tenue de sport », short et tee-shirt, souligne la sociologue. Le développement du football féminin bute aussi sur la tradition qui veut que les adolescentes se préparent à leur mariage en se consacrant à la cuisine ou la couture plutôt qu’à un sport encore largement perçu comme masculin. L’entraîneur de l’équipe Hirondelle, Soulaïmon Bobokalonov, 47 ans, ancien footballeur de l’équipe tadjike Pamir, a dû faire la tournée des écoles de la capitale pour convaincre des volontaires. Parmi elles, Djonona Rakhimova, qui à 13 ans s’entraîne trois fois par semaine avec Hirondelle, rêve de « devenir une footballeuse célèbre ». « Moi, je préfère les jeux d’équipe où je peux sentir l’épaule de mes camarades », s’enthousiasme la jeune footballeuse. Plusieurs de ses camarades ont cependant déjà déserté les rangs de l’équipe depuis avril. Cédant aux pressions de la société, regrette l’entraîneur. Les instances représentatives de l’islam dans ce pays, peuplé à 99 % de musulmans sunnites et divisé entre religieux pratiquants et jeunes plus tournés vers l’Occident, ne voient pas le football féminin d’un bon œil. « Je suis contre la présence d’hommes sur le terrain quand les femmes s’entraînent. Elles doivent rester entre elles », critique un représentant du Centre islamique du Tadjikistan, instance représentative de l’islam, souhaitant garder l’anonymat en raison du soutien de l’État, laïc, à ce programme. Le religieux s’appuie sur le fait que les jeunes musulmanes ne doivent pas être en contact sur le terrain avec des hommes « susceptibles de devenir leurs époux ». « Le football féminin s’enracinera chez nous, malgré les préjugés », estime quant à lui l’entraîneur Bobokalonov, qui va jusqu’à organiser des matches mixtes, opposant ses jeunes footballeuses à des garçons. « Lorsque ces footballeuses atteindront la majorité, elles devront faire un choix : le mariage, les études ou le sport », confie, plus sceptique, le secrétaire général de la Fédération tadjike de football, Cherali Davlatov.
Sur un terrain de foot de Douchanbé, capitale de Tadjikistan, de jeunes Tadjikes s’entraînent sans relâche, certaines rêvant de devenir des footballeuses professionnelles, défiant ainsi les traditions musulmanes de ce pays d’Asie centrale.
«Ma mère était contre mon choix, mais mon père lui a dit de me laisser jouer », confie parmi elles Sitora Rakhimova, 14 ans. « Maintenant mes...