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Actualités - CHRONOLOGIE

CINÉMA Salim al-Turk a produit et réalisé un court-métrage qui en dit long « 16-05 », ou les noces de sang

16 mai 1989, l’attentat contre le mufti Khaled, une date parmi tant d’autres, inscrite désormais dans l’histoire du Liban et dans la mémoire des Libanais. Mais combien d’autres dates se sont succédé par la suite ? Funestes ou heureuses, elles demeureront mémorables. À sa façon , le cinéaste Salim al-Turk a voulu en images, dans un court-métrage intitulé « 16-05 », ressusciter cette date, et rendre hommage aux oubliés et aux dommages collatéraux comme on les appelle en jargon politique. Pas plus de quatorze minutes pour faire revivre ce jour où une voiture piégée a coûté la vie au mufti Hassan Khaled ainsi qu’à un nombre de civils présents sur les lieux de l’explosion. Quatorze minutes pour faire revivre ces moments tragiques. Salim el-Turk, dont le père faisait partie du nombre des fatalités, a réussi à construire une œuvre personnelle, amère et réaliste car elle touche la grande majorité des Libanais. La mémoire individuelle du cinéaste s’est effacée, laissant place à une mémoire collective globale. « C’est par un curieux hasard que le titre du film porte une date, affirme-t-il. Les Libanais sont devenus soudainement très attachés aux dates comme si elles veillaient à la marche de leur destin. ». Bienfaisantes ou malfaisantes, elles deviennent des Parques présidant ingénieusement à leur sort. Comment conjurer ce sort qui s’acharne injustement depuis trente ans sur un peuple qui, finalement, ne cesse de se laisser influencer par de grands mots, de grandes idées toutes creuses. « Du vide, mais qui n’en est pas moins meurtrier, voire saccageur », dit Salim al-Turk. Depuis le décès de son père, le jeune homme, qui a poursuivi des études d’audiovisuel à l’Iesav, n’a cessé de réfléchir à la manière de lui rendre hommage, mais aussi au millier de victimes qui s’en vont sans faire de bruit mais dans un immense fracas. Ayant signé jusqu’à présent plusieurs clips, et jouissant de la reconnaissance du public libanais et étranger ainsi que de plusieurs prix pour ses créations, Salim al-Turk opère un tournant dans sa vie de cinéaste et signe ce court-métrage de quatorze minutes. De l’humour noir et un ton acerbe dans ce film, qui mêle fiction et documentaire. Les images d’archives (retrouvées chez le fils de feu le mufti) sont traitées comme une fiction, sur fond sonore, tandis que la partie fictive est traduite dans un langage de documentaire dans un plan-séquence unique sans musique, au dialogue cruel et absurde. Un homme parcourt les rues de Beyrouth à la recherche d’un singulier personnage, qu’incarne Roger Assaf, qui fournit des voitures de cérémonie (des limousines de mariage). En employant cette technique particulière (caméra accrochée au front), le cinéaste parvient à introduire le spectateur dans le film. Il devient ainsi lui-même acteur. Traversée par un rythme rapide, frénétique, à la limite du vertige, l’œuvre entraîne le public dans les méandres de la folie et de l’absurdité de la mort, et rappelle aux centaines de Libanais que l’histoire ne cesse de se répéter. L’art suffirait-il à arrêter la machine de mort débrayée il y a déjà une trentaine d’années ? Colette KHALAF
16 mai 1989, l’attentat contre le mufti Khaled, une date parmi tant d’autres, inscrite désormais dans l’histoire du Liban et dans la mémoire des Libanais. Mais combien d’autres dates se sont succédé par la suite ? Funestes ou heureuses, elles demeureront mémorables. À sa façon , le cinéaste Salim al-Turk a voulu en images, dans un court-métrage intitulé « 16-05 »,...