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Nadine Labaki et Danielle Arbid, présentes à la Quinzaine des réalisateurs Insolence et pudeur de l’Orient féminin au Festival de Cannes

L’Orient des femmes, partagées entre désirs d’émancipation et contrainte sociale, inspire les films de deux réalisatrices libanaises présentés à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes. Un institut de beauté de quartier, ses clientes de tout âge qui livrent leurs grandes joies et petites peines aux employées à l’oreille attentive : le cadre du film Caramel de Nadine Labaki n’est pas sans rappeler le Vénus Beauté Institut de la réalisatrice française Tonie Marshall. Mais les Vénus de Labaki vivent à Beyrouth, dans une société libanaise toujours corsetée, où le salon de beauté devient, plus qu’ailleurs, le lieu où la condition des femmes se dévoile. « Même si le Liban paraît moderne et ouvert, l’attachement aux traditions reste très fort. Le regard de l’autre demeure pesant, tout comme le poids du remords, de la culpabilité. Les femmes cherchent leur identité. J’ai voulu parler de ce combat », a expliqué la réalisatrice de 32 ans dont c’est le premier film. Le salon « Si belle » emploie Layale, 30 ans, célibataire vivant chez ses parents qui se débat dans une relation avec un homme marié. Son amie Nisrine prépare son mariage avec un garçon musulman qui ignore qu’elle n’est plus vierge. Rima, 24 ans, découvre son trouble pour une mystérieuse cliente brune. Jamale, effrayée à l’idée de vieillir, ruse pour faire croire qu’elle n’est pas ménopausée. « Ce ne sont pas des femmes tristes, elles essaient de surmonter les situations dramatiques par la dérision. Pour moi, ce sont des battantes», témoigne la cinéaste qui adopte le ton de la comédie douce-amère. À la rébellion, ses héroïnes préfèrent la souplesse, quitte à en passer par la soumission. « Elles s’adaptent, elles rusent, elle essaient intelligemment de faire ce qu’elles ont envie de faire. Dans ces pays-là, je ne crois pas que la révolte soit toujours une solution », estime Labaki qui applique le précepte à son propre travail : sa caméra ne saisit que regards, caresses, frôlements, pudique face à tout geste plus explicite. Autant de précautions dont ne s’embarrasse pas Danielle Arbid, 37 ans. Elle signe avec Un homme perdu, son deuxième long métrage après de nombreux documentaires et films courts. La révolte, une rageuse quête de soi mènent la réalisatrice depuis son départ, à 17 ans, d’un Liban où elle se sentait « enfermée ». Son film s’attache aux pas de deux hommes eux aussi en rupture de ban : Thomas est photographe. Il parcourt les bars à filles de toute la planète, le sexe comme approche charnelle du réel. En route pour la Jordanie, il croise Fouad, amnésique en errance qu’il entraîne dans ses vagabondages nocturnes. Danielle Arbid révèle l’Orient underground, celui des boîtes de nuit, des bars louches, des hôtels de passe où les hommes s’enivrent et les femmes se donnent sans tabou. « Certains se diront “tiens, on n’imaginait pas qu’il y a là-bas ce genre de femmes qui couchent la première fois”. Tant mieux si je casse une image d’Épinal », a confié la réalisatrice. Pour tourner les scènes de sexe, crues, tendues, parfaitement maîtrisées, la réalisatrice a fait appel à une actrice du cinéma porno, Yasmine Lafitte, mais s’est laissé surprendre par l’aisance de ses deux actrices libanaises qui « n’avaient jamais tourné nues », progressivement délivrées de leurs appréhensions. Loin de toute vision exotique du monde arabe, Danielle Arbid filme des « filles de là-bas qui baisent comme partout. Au lit, tout finit par se ressembler ». Sophie MAKRIS (AFP)
L’Orient des femmes, partagées entre désirs d’émancipation et contrainte sociale, inspire les films de deux réalisatrices libanaises présentés à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes.
Un institut de beauté de quartier, ses clientes de tout âge qui livrent leurs grandes joies et petites peines aux employées à l’oreille attentive : le cadre du film...