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Actualités - OPINION

Quand le mensonge se fait vertu divine

« Que m’apportez-vous ? » demanda l’outre pleine. On lui apportait le vide. Maxime du Vajrayana Dieu peut-Il mentir ? Dieu peut-Il se contredire ? Dieu peut-Il dire le contraire de ce qu’Il pense ou se contredire, ou se dédire, ou renier ce qu’Il vient de dire au vu et au su de toute sa création ? Ces questions peuvent paraître blasphématoires et sacrilèges, mais elles méritent d’être posées de manière aussi crue à Beyrouth où Dieu est supposé diriger un parti politique qui se réclame de lui par la force des armes, d’abord, mais aussi, n’en déplaise aux exaltés de la contradiction, par la pratique de la mauvaise foi. Nous sommes, à cet égard, une étrange société. Un de nos dictons les plus populaires proclame « al-Kizb Houwa Milh al-Rijal » dont la traduction littérale donnerait « le mensonge est le sel des hommes », ce qui signifie tout simplement « mentir est une preuve de vertu virile ». Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose, dit l’adage populaire. Mais, dans sa version libanaise, le mensonge se trouve être érigé au rang de catégorie de l’esprit. La fourberie paysanne acquiert, dès lors, le statut de synonyme de l’intelligence politique. Rassurez-vous, il ne s’agit pas de machiavélisme, loin de là. Machiavel était infiniment plus intelligent et plus subtil que les divins mensonges de la fourberie politicienne de l’opposition libanaise actuelle, qui s’autoproclame civilisée et démocratique. Il y a deux mille ans, un certain Jésus de Nazareth, parlant du « Prince de ce monde », dit : « Il est mensonge et père du mensonge. » Nous comprenons par là que tout mensonge avéré, intentionnel, de mauvaise foi, est un acte réfléchi, certes, et inspiré non par la conscience de l’homme, entièrement tournée vers le bien et le vrai, mais par le père de tout mensonge, c’est-à-dire l’esprit du mal en personne. Durant l’été 2006, le divin parti du juriste-théologien Hassan Nasrallah nous a clairement dit qu’il appuyait sans réserve et sans condition les fameux sept points décidés à l’unanimité des membres du gouvernement libanais avant la sortie des ministres démissionnaires pour cause de frustration communautaire. À l’époque, nous avions tous applaudi la sagesse du juriste-théologien en question et son sens aigu du bien commun. Nous espérions encore, nous voulions croire, nous refusions d’admettre l’impensable, à savoir que l’éminent juriste-théologien pouvait ne pas dire le fond de sa pensée. À peine 9 mois plus tard, soit le temps d’une gestation humaine, le même juriste-théologien et ses acolytes accouchent d’une nouvelle vérité et prétendent nous faire croire que leur « oui » d’hier était en fait un « non » en ce qui concerne les mêmes sept points. Aurions-nous mal entendu ? Avions-nous mal compris ? La langue arabe serait-elle l’unique idiome humain où dire blanc signifie dire noir ? Une telle dissociation schizophrénique du discours peut-elle servir de principe et de règle de notre vie publique ? Serions-nous obligés d’entrer tous en psychose afin de ne pas contrarier l’humeur capricieuse du juriste-théologien, de ses maîtres à penser et de ses acolytes-accessoires ? Le mensonge dissocie le mot de la réalité de la chose à laquelle il renvoie. Le mensonge n’est qu’une baudruche, une bulle. Le mensonge est comme l’outre pleine de ce vide, de ce rien, qui passe son temps à vouloir faire peur en menaçant d’exploser. Quand le mensonge atteint de telles proportions dans la mauvaise foi, il y a lieu de nous interroger s’il s’agit d’une forme de manœuvre typique de notre fourberie paysanne tellement virile. Une autre hypothèse, plus angoissante, consisterait à nous demander si ce ne serait pas plutôt la preuve d’une vertu morale, inspirée par cette divinité qui se dit « dieu » et qui s’octroie la prérogative de diriger des partis politiques, non en vue de la recherche du bien commun, mais pour le plus grand mal des adversaires qu’elle s’est choisis. Pr Antoine COURBAN
« Que m’apportez-vous ? » demanda l’outre pleine.
On lui apportait le vide.
Maxime du Vajrayana


Dieu peut-Il mentir ? Dieu peut-Il se contredire ? Dieu peut-Il dire le contraire de ce qu’Il pense ou se contredire, ou se dédire, ou renier ce qu’Il vient de dire au vu et au su de toute sa création ? Ces questions peuvent paraître blasphématoires et sacrilèges, mais...