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Actualités - CHRONOLOGIE

LIVRE - «Un visa pour l’enfer» La guerre de Célhia de Lavarène contre les marchands du sexe

NEW YORK, de Sylviane ZEHIL Dans son ouvrage intitulé Un visa pour l’enfer – une femme combat les marchands du sexe –, paru aux éditions Fayard en octobre 2006, la journaliste Célhia de Lavarène, chargée de protection en mission de maintien de la paix des Nations unies, qui a collaboré à Jeune Afrique, Afrique Magazine, RFI et Radio Suisse Romande, connue pour son franc-parler, raconte, avec émotion et vigueur, le combat féroce qu’elle a mené, dans le cadre de son action onusienne, contre le trafic humain et l’esclavage sexuel, pratiqué en particulier sur les jeunes filles et adolescents. Ces enfants paumés, venus du Maghreb ou des pays de l’Est, sont les victimes silencieuses, sans illusions et «sans futur», qu’elle espère libérer des griffes des tenanciers de night-clubs. Avec un immense courage, elle pointe du doigt les abuseurs sexuels, au risque d’être emportée dans un dangereux engrenage. Après tout, comme l’a si bien dit Victor Hugo : «C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches.» Avec quatorze ans de guerre civile, le Liberia est l’un des pays les plus miséreux du continent africain qui semble être «oublié des dieux». C’est là où se trouve aussi «la lie de l’humanité», confie Célhia de Lavarène. L’exploitation sexuelle est généralisée et la «corruption un sport national… C’est hallucinant l’argent… Pour 300 dollars, on détruit toute une vie», répétera-t-elle, horrifiée. Les coupables? Les «marchands du sexe font partie de la classe dirigeante libérienne; des Libanais, des diplomates et des membres d’organisations humanitaires censés protéger la population sont également impliqués», dit-elle, écœurée. De Bosnie au Liberia, son combat restera le même. Une histoire qui finit mal Peine perdue d’avance. Son courageux défi semble cependant si difficile à réaliser. Aller en guerre contre les souteneurs du plus vieux métier du monde semble bien utopique, comme en témoigne la conclusion de son livre. À la tête d’une équipe de policiers internationaux, Célhia poursuit inlassablement, à Monrovia, les rondes de nuit, les repérages, la surveillance de l’aéroport, les raids et les interrogatoires. Ce livre est le récit émouvant d’une histoire vécue. Journaliste, elle «n’a jamais pris de notes». «C’était dans mon cœur et dans ma tête. Lorsqu’on m’a demandé de témoigner, à la fin de mon séjour au Liberia, je me souviens avoir pensé que j’allais réussir parce que la vérité est plus forte que tout. On ne peut rien contre la vérité. Elle n’était pas la mienne, mais la leur. J’ai accepté qu’on change des noms et des lieux à la demande de l’avocat de la maison d’édition, pour éviter un procès pour diffamation. En revanche, il n’y a pas un mot qui ait été changé en racontant l’histoire des victimes» a-t-elle expliqué, les yeux baignés de larmes. Cette histoire si émouvante finit mal. Pour quelle liberté? «Ce sont des gamins qui sont blessés à mort. Parce que des hommes, quelque part, ont eu envie de passer une nuit avec eux, pour 300 dollars», dit Célhia. Il y a ceux «qu’on n’a jamais revus» et ceux «qui ont disparu. Je sais pourquoi», assure-t-elle. Certaines victimes sont récupérées par les trafiquants. Elles représentent «beaucoup d’argent». Les deux Marocaines qui ont témoigné se cachent maintenant. Le jeune garçon qui avait été vendu par sa mère qui ne voulait pas de lui s’est retrouvé sans rien. Le jour même du départ de Célhia de Lvarène, «l’équipe s’est dispersée. Le trafic des êtres humains devenait une “non priority”. Les établissements que j’avais mis à l’index ont été retirés de la liste… Fatima et Rabia (les entremetteuses) ont repris leurs activités. Des hordes de jeunes Roumaines, Ukrainiennes, Marocaines, Thaïlandaises sont arrivées. Les clients se pressent», lit-on dans l’épilogue de son ouvrage. Célhia a rencontré des familles libanaises à l’ambassade des États-Unis à Monrovia. «Ce sont des familles bien. En revanche, il y en a quelques-uns, une dizaine, qui représentent la lie de l’humanité», ponctue-t-elle. «Loin de vouloir généraliser, au Ghana j’ai fait la connaissance de Libanais extrêmement généreux, courtois et hospitaliers. Ils m’ont confirmé cette impression. D’ailleurs, je le dis dans mon livre. Ceux que j’ai montrés du doigt me détestaient. Ils ont dû faire la fête lorsque je suis partie», confie-t-elle. À travers STOP (Stop Trafficking of People), une ONG qu’elle a fondée, Célhia de Lavarène, qui vit à New York, poursuit toujours son combat. Son objectif est de venir en aide aux victimes oubliées. «J’espère qu’avec le bureau qu’on va ouvrir, on pourra s’en occuper», conclut-elle avec une note d’espoir.

NEW YORK, de Sylviane ZEHIL

Dans son ouvrage intitulé Un visa pour l’enfer – une femme combat les marchands du sexe –, paru aux éditions Fayard en octobre 2006, la journaliste Célhia de Lavarène, chargée de protection en mission de maintien de la paix des Nations unies, qui a collaboré à Jeune Afrique, Afrique Magazine, RFI et Radio Suisse Romande, connue pour son...