Le futur Musée de l’homme à Paris sort des caisses

Le Musée de l’homme, qui doit faire l’objet d’une ambitieuse rénovation à compter de l’an prochain, ouvre ses réserves et présente nombre d’objets rarement montrés jusqu’ici à l’occasion d’une nouvelle exposition préfigurant les thématiques du futur établissement. «La saga de l’homme - épisode 1: l’homme exposé» accueille le public depuis hier (mercredi) dans le vieillissant palais Art déco de Chaillot. «C’est un moment émouvant: pour la première fois, le nouveau Musée de l’homme est en train d’apparaître, avec cette expo-laboratoire qui va permettre de tester sa nouvelle approche», souligne devant la presse Zeev Gourarier, à la fois commissaire de l’exposition et directeur du Musée de l’homme. Chargé de réinventer un établissement qui a perdu une partie considérable de ses collections à l’occasion de la création du Musée du Quai Branly, M. Gourarier concède que cette exposition est encore «embryonnaire». «Une fois inaugurée, l’exposition sera modifiable pendant les deux ans qui vont précéder la rénovation du musée, en fonction des interrogations du public et des avancées de la science, car aucun autre secteur de la science ne progresse aussi rapidement que les sciences humaines», ajoute-t-il. Un tâtonnement assumé et accentué par une signalétique de chantier – des bornes rouges et blanches – pour les sections «en travaux». La muséographie aussi accentue le côté expérimental, avec ses objets présentés dans des caisses de bois, comme s’ils sortaient directement des caves du musée. «Le futur musée n’aura pas forcément l’allure de ce que vous pouvez voir, mais les thématiques esquissées ici y seront présentes. Cette exposition est une sorte de table des matières de ce qu’on pourra voir», précise M. Gourarier. Le futur Musée de l’homme ambitionne de montrer l’homme, à la fois dans son unité et sa diversité, loin de l’approche colonialiste qui l’a longtemps caractérisé. En s’appuyant pour cela sur les prestigieuses collections du Muséum national d’histoire naturelle – les anciennes collections des rois de France – dont le Musée de l’homme constitue l’une des composantes. «La Grande galerie de l’évolution (du Jardin des plantes) présente la biodiversité de la planète. Le Musée de l’homme présentera son “humano-diversité” à travers les mêmes collections», avance M. Gourarier. L’exposition porte à la fois sur «l’homme qui a exposé et celui qui a été exposé: ces étonnements réciproques seront au cœur du futur musée». Ont été ainsi ressortis des cartons ossements humains, dessins et bustes de peuplades primitives collectés dans un esprit de recherche, mais regardés depuis avec suspicion pour avoir servi d’alibi scientifique au racisme. On peut voir côte à côte les crânes originaux de l’homme de Cro-Magnon et du philosophe René Descartes (décoré d’un poème en latin et de la signature de ses propriétaires successifs), ainsi que le moulage de celui du footballeur Lilian Thuram. Un spectaculaire «cube à bustes» rassemble 220 moulages de peuples du monde – où l’Irlandais voisine avec le Maori – pour certains réalisés lors de l’expédition de l’Astrolabe de l’explorateur Dumont d’Urville. À la façon d’un cabinet des curiosités, l’exposition donne aussi à voir des monstres, réels (un squelette de fœtus de siamoises) ou imaginés. La fin de l’exposition s’attache à dresser un parallèle entre l’homme et les grands singes. «Les diverses communautés de chimpanzés ont des gestes et des cultures qui leur sont propres», souligne Sabrina Krief, la responsable de cette section. «Si vous rencontrez un chimpanzé qui fait la danse de la pluie ou donne une poignée de main lors de l’épouillage, vous pouvez être certain qu’il vient de Côté d’Ivoire», relève la scientifique. Frédéric GARLAN (AFP)