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Actualités - CHRONOLOGIE

SALONS La Foire du livre du Caire submergée par l’édition islamique

La Foire du livre du Caire, la plus importante du monde arabe, semble submergée par l’édition islamique, réduisant aux marges la littérature et les ouvrages scientifiques. Sitôt passées les portes d’accès du parc d’exposition, 1400 stands proposent jusqu’à dimanche, sur 80000 m2, livres, cassettes et CD à dominante religieuse, dans une atmosphère de kermesse populaire. Près de 2 millions de personnes, selon les organisateurs, auront visité la 39e édition d’une foire qui surclasse, par sa taille, celles de Beyrouth, Casablanca et Abou Dhabi. À l’instar de la foire de Francfort, la grande référence internationale, le principe d’un pays «invité d’honneur» a été institué, avec l’Italie cette année, après l’Allemagne l’an dernier. Des rencontres entre écrivains égyptiens – Gamal Ghitani, Alaa al-Aswany, Ahmad al-Aïdi – et italiens – Claudio Magris ou Antonio Tabucchi – ont été organisées, au Centre culturel italien. Pour l’ambassadeur d’Italie au Caire, Antonio Badini, il y a «encore du chemin à faire, mais ce sont des signes encourageants du dialogue des cultures et cela passe par plus de traductions réciproques». «C’est vrai que les éditeurs hors du monde arabe sont peu nombreux et nous essayons de les faire venir», affirme le patron de la foire, Nasser al-Ansari, ancien directeur de l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris. Directeur de l’Organisation générale du livre égyptien (OGLE), la plus grande maison d’édition publique, il se félicite de la présence de l’auteur turc Orhan Pamuk, bête noire de nationalistes turcs. La place d’honneur a été réservée à l’œuvre du prix Nobel de littérature, Naguib Mahfouz, décédé en août. «Je crois que ses livres seront les grands succès de la foire, à part les livres religieux», estime al-Ansari. Parmi 700 éditeurs présents, égyptiens ou d’autres pays arabes, la grande majorité offre des livres religieux. «Nous leur réservons un quart de notre catalogue», dit M. Ansari. Outre d’innombrables éditions subventionnées du Coran, certaines richement reliées avec dorures, ou recueils de fatwas figurent à profusion livres, cassettes ou CD de prédicateurs conservateurs ou islamistes. Les défunts prédicateurs tels les cheikhs égyptien Charaoui et saoudien Ibn Baz tiennent toujours la vedette, mais ils subissent une offensive marketing du jeune « télécoraniste » Amr Khaled, à la morale piétiste «new look». «C’est devenu un vrai business, mais ce fondamentalisme venu d’Arabie saoudite a été et reste encouragé cyniquement par le pouvoir», estime Alaa al-Aswani, auteur du best-seller L’immeuble Yacoubian. Des ouvrages antichrétiens sont en rayons, comme la Vérité sur Jésus de l’éditeur jordanien Dar al-Fallah, qui taille en pièces les croyances chrétiennes et ne voit qu’une solution: la conversion à l’islam. Plusieurs éditions du Mein Kampf d’Hitler sont aussi en vente. «Il fait partie de nos succès, surtout dans la tranche des 18-25 ans», affirme Mahmoud Abdallah, de la maison d’édition syro-égyptienne Dar al-Kitab al-Arabi. Parmi d’autres ouvrages du même genre figure Les gens du Shabat et les singes, de l’éditeur égyptien Dar al-Iman, qui explique que les singes descendent des juifs, et non le contraire, comme tous les autres hommes, selon Darwin. «Laisser vendre Mein Kampf est un scandale absolu», estime Mohammad Arkoun, professeur émérite d’histoire de la pensée islamique à la Sorbonne, pour qui la production culturelle arabe, vue à travers la Foire du Caire, «reflète surtout un vide». Plusieurs livres, dont Zorba le Grec de Nikos Kazantzakis et des œuvres du Français d’origine tchèque Milan Kundera traduits en arabe ont été saisis en douane, empêchant leur présentation à la foire, a affirmé leur éditeur libanais Dar al-Adab. Alain NAVARRO (AFP)

La Foire du livre du Caire, la plus importante du monde arabe, semble submergée par l’édition islamique, réduisant aux marges la littérature et les ouvrages scientifiques.
Sitôt passées les portes d’accès du parc d’exposition, 1400 stands proposent jusqu’à dimanche, sur 80000 m2, livres, cassettes et CD à dominante religieuse, dans une atmosphère de kermesse populaire.
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