Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

L’Union européenne juge insuffisante l’offre turque sur Chypre Ankara prend un risque politique pour éviter une crise avec les 25

En dépit d’un « geste » de dernière minute pour honorer ses obligations commerciales envers Chypre, la Turquie n’a pas réussi à écarter le risque que l’UE mette un frein à ses négociations d’adhésion. En même temps, cette initiative est risquée sur le plan intérieur à la veille d’une année électorale chargée. L’offre d’Ankara a surpris les pays de l’UE, qui se montrent divisés avant de se prononcer lundi sur la suite à donner aux pourparlers d’adhésion de la Turquie. Le Premier ministre finlandais Matti Vanhanen, dont le pays préside l’UE, a jugé l’offre insuffisante. Il a ajouté que, vu le flou de l’offre, les 25 discuteraient comme initialement prévu d’une éventuelle suspension des négociations avec Ankara. De son côté, la Commission européenne attend toujours des « clarifications » sur l’offre, a déclaré hier son président José Manuel Durao Barroso, en soulignant qu’au-delà de ce point, Ankara devra satisfaire à d’autres exigences pour adhérer à l’UE. Chypre l’avait rejetée dès jeudi et le ministre grec des Affaires étrangères, George Koumoutsakos, a estimé hier qu’il s’agissait « d’une vieille formule dans un nouvel emballage ». Toutefois, le président américain, George W. Bush, a assuré hier le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, de son « ferme soutien » à l’accession de son pays à l’Union européenne, a indiqué la Maison-Blanche. Par son offre, Ankara tente un premier pas vers la normalisation – requise – de ses relations commerciales avec les nouveaux États membres de l’UE. La Turquie propose d’ouvrir pendant une année un port de mer aux bateaux chypriotes. Elle offre en outre d’ouvrir un aéroport turc aux avions chypriotes, mais réclame parallèlement l’ouverture dans la République turque du nord de Chypre – exclusivement reconnue par Ankara – du port de Famagouste et de l’aéroport d’Ercan au trafic international. La Turquie ne reconnaît pas le gouvernement chypriote grec, qui représente l’ensemble de Chypre au sein de l’UE. « C’est une initiative risquée, mais cela pourrait devenir un but en or si l’on considère que le commissaire européen Olli Rehn a exhorté la Turquie à essayer de marquer », déclare Semih Idiz, chroniqueur diplomatique de la chaîne privée CNN Turk et spécialiste de l’UE. « Si l’offre est rejetée en bloc par l’UE, cela affaiblira le gouvernement sur le plan intérieur et rendra plus difficile de faire adopter des réformes à l’avenir », a-t-il dit. Les Turcs ont eux aussi été surpris par la proposition qu’a annoncée le gouvernement Erdogan, moins d’un an avant des élections présidentielle et législatives. Des partis d’opposition ont dénoncé l’offre gouvernementale, parlant de capitulation devant Chypre et l’UE. L’opposant Deniz Baykal y voit une reconnaissance politique du sud de Chypre. Précédemment, la position d’Ankara consistait à ne pas bouger avant que l’UE traduise en actes sa promesse de mettre fin à l’isolement des Chypriotes turcs. Le gouvernement cherchait de toute évidence à s’en dégager. La proposition a d’autre part irrité la toujours très influente armée turque, qui voit ses pouvoirs s’effriter en conséquence des réformes inspirées par l’UE. « Le chef d’état-major des forces armées turques ne devrait pas apprendre une telle décision par la télévision », a déclaré le général Yasar Buyükanit en parlant de lui-même. « Est-ce que l’institution qui déploie 40 000 soldats (dans le nord de Chypre) ne devrait pas être avisée d’une décision aussi importante et consultée à ce sujet ? » M. Erdogan a pris un risque de taille, car s’il lui faut préserver la candidature de son pays à l’UE, élément-clé pour l’économie en plein essor de la Turquie et pour l’action politique du parti AKP au pouvoir, il ne peut pas se permettre de s’aliéner les électeurs nationalistes. Selon des analystes, M. Erdogan cherche à s’arroger un rôle moral sur la question de Chypre, en mettant l’UE et Chypre au défi de présenter un compromis. « La Turquie veut démontrer que ce n’est pas elle qui fait preuve d’intransigeance en s’accrochant de façon négative à une vieille position officielle », note un universitaire. « Elle ébranle le statu quo mais sans le modifier, parce que les Chypriotes grecs disposent toujours du droit de veto au sein de l’UE. »

En dépit d’un « geste » de dernière minute pour honorer ses obligations commerciales envers Chypre, la Turquie n’a pas réussi à écarter le risque que l’UE mette un frein à ses négociations d’adhésion. En même temps, cette initiative est risquée sur le plan intérieur à la veille d’une année électorale chargée.
L’offre d’Ankara a surpris les pays de l’UE, qui se...