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Actualités - REPORTAGE

ENTRETIEN - Pour le directeur général de Dar el-Fatwa, si le hijab est une « obligation religieuse », le port du niqab est un « obstacle » entre la femme et le reste du monde

Cheikh Nokkari : Pour le monde occidental aujourd’hui, le nouvel ennemi c’est l’islam Le débat sur le voile islamique reprend aujourd’hui avec force en Europe, presque deux ans après l’interdiction par la France du port de signes religieux ostentatoires à l’école publique, dont évidemment le hijab. Dans une entrevue accordée à « L’Orient-Le Jour », cheikh Mohammad Nokkari, directeur général de Dar el-Fatwa et membre du Groupe de recherche islamo-chrétien, explique que la « bataille » contre le voile est en réalité une campagne politique orchestrée par le lobby sioniste et que le port du hijab est une « une obligation religieuse pour toutes les musulmanes ». • Depuis quelques semaines, de plus en plus de dirigeants européens rentrent dans le débat sur le port du niqab et du voile, et s’interrogent par conséquent sur l’intégration des musulmans dans leur pays. Comment analysez-vous ces déclarations et le timing de ce débat ? « La bataille contre le voile est clairement une campagne politique contre l’islam, orchestrée par le lobby sioniste en Europe et dans le monde. Ce débat a commencé en France, en mars 2004, avec l’adoption d’une loi qui interdit le port du hijab dans les écoles publiques, ce qui constitue pour nous une offense évidente à la liberté individuelle et religieuse. Avant la chute de l’Union soviétique, le monde occidental combattait le communisme, aujourd’hui, le nouvel ennemi, c’est l’islam. Je connais beaucoup de musulmanes qui résident aujourd’hui en Europe et qui craignent de sortir voilées dans la rue. L’islam est une religion qui prône le respect d’autrui. Il est évidemment recommandé à tous les musulmans de respecter les lois instaurées dans le pays d’accueil, mais les gouvernements européens ne doivent pas limiter la liberté religieuse. Comment expliquez-vous la tolérance des Européens envers la consommation du cannabis et, en même temps, leur rejet des signes religieux dans les écoles ? » • Mais qu’en est-il alors des pays arabes, comme la Tunisie ou l’Égypte, qui mènent également une campagne contre l’expansion du voile et du niqab ? « Le niqab est une toute autre affaire. Le voile islamique est une obligation religieuse pour toutes les musulmanes croyantes dans les instructions du Coran, mais pas le niqab. Le Conseil des ulémas ne recommande le port du niqab que lors des pèlerinages. Lorsque la femme couvre complètement son visage, ne laissant apparaître que ses yeux, elle crée un véritable obstacle entre elle et le reste du monde. Il est essentiel de voir son visage si elle veut travailler, partir en voyage ou même passer des examens universitaires. C’est d’ailleurs le cas en Égypte où des étudiantes qui le portaient ont été exclues du foyer de l’Université de Helwan. Le niqab ne protège pas la femme, bien au contraire. Quant à la Tunisie – où les contrôles sont devenus stricts contre le foulard –, je ne vois pas où est le problème. Je pense que ce sont les politiciens laïcs qui veulent créer une polémique. C’est d’ailleurs le problème de la Turquie, pays laïc dont la majorité de la population est musulmane, qui fait face à de nombreuses pressions afin d’adhérer à l’Union européenne. » • Nous constatons aujourd’hui que beaucoup de femmes se voilent avec un foulard de plus en plus frivole et de couleur vive. Que pensez-vous de cet effet de mode qui conjugue islamisation et mondialisation ? « Il n’y a pas de couleur sacrée en islam. La femme peut porter le foulard qu’elle veut tant qu’il encadre bien son visage et cache sa chevelure et son front. La bonne apparence physique est importante pour toutes les femmes, qu’elles soient musulmanes ou pas. » • La semaine dernière, la presse internationale a rapporté les déclarations de cheikh Taj Aldin al-Hilali, le mufti d’Australie, qui a comparé les femmes légèrement vêtues à de la « viande à l’air ». Ces commentaires ont été perçus par les autorités australiennes comme une « incitation au crime ». Quel est votre jugement sur ces remarques ? « Les déclarations du mufti d’Australie sont complètement inappropriées. Tout d’abord, il vit dans un pays non musulman où ce n’est pas la femme légèrement vêtue qui attire les regards, mais celle qui est voilée. Ensuite, ses remarques portent atteinte à toutes les femmes non musulmanes. Le respect d’autrui est essentiel dans notre croyance. Ce n’est qu’à travers le dialogue, le respect et l’amour que nous pourrons dépasser la crise entre l’Orient et l’Occident. » Propos recueillis par Rania MASSOUD
Cheikh Nokkari : Pour le monde occidental
aujourd’hui, le nouvel ennemi c’est l’islam

Le débat sur le voile islamique reprend aujourd’hui avec force en Europe, presque deux ans après l’interdiction par la France du port de signes religieux ostentatoires à l’école publique, dont évidemment le hijab. Dans une entrevue accordée à « L’Orient-Le Jour », cheikh...