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L’écrivain d’origine indienne craint que l’Occident ne finisse par abdiquer ses valeurs Salman Rushdie, infatigable pourfendeur du fondamentalisme islamique

Plus de dix-sept ans après que l’imam Khomeiny eut lancé une fatwa à son encontre, l’écrivain britannique Salman Rushdie reste inébranlable dans sa dénonciation des dérives fondamentalistes de l’islam, craignant que l’Occident ne finisse par abdiquer ses valeurs. «Nous vivons tous sous une fatwa maintenant », a ainsi dénoncé l’auteur d’origine indienne, âgé de 60 ans, dans une longue interview à cœur ouvert avec le quotidien britannique The Independent. « Vous pouvez voir la fatwa comme l’ouverture du 9/11 (les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis) », estime-t-il. « Ce n’est pas une ligne directe. Peut-être pourriez-vous dire que ce n’est pas la même pièce de musique. Mais d’une certaine façon, c’était un présage. » Le 14 février 1989, l’imam Khomeiny, guide de la révolution islamique iranienne, l’avait condamné à mort après la publication de son livre Les Versets sataniques, jugé blasphématoire. En 1998, le gouvernement iranien s’est engagé à ne pas faire appliquer la fatwa, mais divers groupes réaffirment régulièrement leur volonté de s’y conformer. « J’ai essayé très fort, avec toute ma volonté, de mettre ça derrière moi, parce que je ne veux pas porter ce poids avec moi », dit-il de ce décret religieux qui lui a fait prendre conscience de son « inutilité », et l’a longtemps contraint à vivre reclus et dans la peur constante. « Les deux moitiés en guerre du monde – l’Est et l’Ouest – étaient aussi les deux moitiés en guerre de mon âme », raconte Rushdie, né d’une famille musulmane riche et éduqué en Angleterre. L’auteur, qui a rejeté l’islam à l’adolescence, mais pour qui son grand-père, fervent croyant, reste un « modèle de tolérance », n’hésite pas à dénoncer le fanatisme religieux. La radicalisation de l’islam le préoccupe. Cette semaine, il est entré sans ménagement dans le débat sur le port du voile en Grande-Bretagne en déclarant : « Le voile c’est nul. » Pour lui, le voile n’est qu’un « moyen d’ôter tout pouvoir aux femmes ». Dans son entretien, il dit craindre que « les bons ne perdent la bataille au sein de l’islam. L’islam qui existe aujourd’hui n’est pas celui avec lequel j’ai grandi ». Il se désespère que trop de gens de sa sensibilité se refusent à voir la vraie nature des fondamentalistes musulmans et considèrent le terrorisme comme le juste retour du mal causé par l’Occident. « C’est une chose de critiquer la manière dont se comportent les gouvernements américain ou britannique, et j’ai beaucoup de critiques à leur adresser, je n’ai même que ça, dit-il. Mais c’est une autre chose de ne pas voir qu’un ennemi existe et est extrêmement sérieux sur ses intentions. » « Une solution en Palestine ne changerait rien à ses ambitions, assure-t-il. Ce n’est pas ce qu’ils veulent. Ce qu’ils veulent, c’est changer la nature de la vie humaine sur terre à l’image des talibans. (...) Ils ne représentent pas la quête de justice humaine. C’est, je pense, l’une des grandes erreurs de la gauche. » Il dit avoir été effrayé le 11 septembre 2001 en pensant : « C’est une honte que 3 000 personnes aient dû mourir pour quelque chose d’assez évident. » Les États-Unis ne sont pas pour autant pour lui le « sauveur » face à l’islamisme, car il n’a « jamais vu une grande puissance avoir une dimension morale ». Il craint que l’Occident ne regrette dans 25 ans s’être « rendu », en « se liant les mains et se coupant la gorge au nom de la tolérance » : une référence, par exemple, à la parution de caricatures représentant Mahammad dans un journal danois qui avait enflammé le monde musulman en octobre 2005. « Quand on me demande si l’Occident devrait s’adapter aux sensibilités musulmanes, je dis toujours que ce n’est pas la bonne façon de penser, rappelle-t-il. L’Occident devrait rester ce qu’il est. Il n’y a rien de mal dans ce qui a été accepté pendant des centaines d’années : la satire, l’irrévérence, le ridicule. » Cyril BELAUD (AFP)
Plus de dix-sept ans après que l’imam Khomeiny eut lancé une fatwa à son encontre, l’écrivain britannique Salman Rushdie reste inébranlable dans sa dénonciation des dérives fondamentalistes de l’islam, craignant que l’Occident ne finisse par abdiquer ses valeurs.
«Nous vivons tous sous une fatwa maintenant », a ainsi dénoncé l’auteur d’origine indienne, âgé de 60 ans,...