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Actualités - OPINION

Génocide et crimes de guerre

Peut-on qualifier l’agression israélienne de «génocide» ? Le Liban pourra difficilement prouver un génocide au sens de l’article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948, ou plutôt une «tentative de génocide» conformément à l’article III de la convention. Ces articles ont été inspirés de la première définition du terme «génocide» de la résolution 96 (1) du 11 décembre 1946 de l’Assemblée générale qui déclarait que «le génocide est le refus du droit à l’existence de groupes humains entiers, de même que l’homicide est le refus du droit à l’existence à un individu; un tel refus bouleverse la conscience humaine, inflige de grandes pertes à l’humanité qui se trouve ainsi privée des apports culturels ou autres de ces groupes, et est contraire à la loi morale ainsi qu’à l’esprit et aux fins des Nations unies». Cette définition a d’ailleurs été rappelée par la CIJ dans l’ordonnance du 8 avril 1993 opposant la Bosnie-Herzégovine à la RFY dans l’affaire relative à l’application de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide. Si l’objectif d’une plainte à la CIJ est de prouver qu’Israël est «génocidaire» au sens de la Convention de 1948, le Liban va certainement perdre cette affaire, ce qui aura un effet clairement contre-productif. Dans ce cas, il vaudrait mieux se contenter des calicots brandis lors des manifestations et, ce faisant, éviter à l’État libanais le ridicule dans les sphères internationales. Cependant, s’il ne s’agit pas d’un «génocide», il est incontestable qu’Israël, ses dirigeants et son armée ont commis des crimes de guerre. Il est évident qu’Israël a eu un comportement criminel qui, sans le moindre doute, viole les Conventions du 12 août 1949, particulièrement la quatrième convention relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, ainsi que les Protocoles additionnels du 8 juin 1977. Cependant, cela n’a rien de neuf concernant le comportement israélien au Liban. À cet égard, la «bible» en droit de la guerre, à savoir l’ouvrage du professeur Eric David (qui d’ailleurs devrait être consulté par le Liban), puise sa source d’exemples d’actes «à ne pas faire» en temps de guerre dans l’invasion israélienne de 1982. S’il est vrai que la clause compromissoire de l’article 9 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) répond à l’obligation de réciprocité nécessaire pour que la CIJ soit compétente, tel n’est pas le cas des conventions de Genève. Dès lors, à défaut de clause compromissoire, la seule solution serait de trouver un lien de réciprocité, par la clause facultative de juridiction obligatoire (art. 36, n° 2 du Statut), soit une déclaration unilatérale d’un État (par écrit au secrétaire général de l’ONU) signifiant accepter une juridiction obligatoire de la CIJ. À cet égard, l’affaire Nicaragua vs USA est très éclairante sur les questions de compétences de la CIJ. Je doute qu’il soit possible d’établir un lien de réciprocité utile avec Israël. Je pense qu’il faut éviter de jouer au démagogue et donner des illusions au peuple en prétendant qu’une action devant la CIJ pour génocide permettrait d’engager la responsabilité d’Israël et, dès lors, réclamer des dommages. C’est non seulement mauvais comme image auprès de la communauté internationale, qui semble clairement être imperméable aux discours qualifiant Israël de génocidaire (surtout du côté occidental, premier visé par le message politique), mais plus dramatique, cela ne sert pas à relever le niveau du discours actuel sur la scène politique libanaise. Georges CHEBIB
Peut-on qualifier l’agression israélienne de «génocide» ? Le Liban pourra difficilement prouver un génocide au sens de l’article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948, ou plutôt une «tentative de génocide» conformément à l’article III de la convention. Ces articles ont été inspirés de la première définition du...