EXPOSITIONS L’art contemporain français sous toutes ses coutures bientôt à Berlin

Pour la première fois, 150 artistes français contemporains vont exposer dans divers lieux de Berlin, officiels comme branchés : hommage à une ville en création permanente qui n’a pas encore vraiment rejoint le club élitiste des capitales du marché de l’art, de New York à Londres, en passant par Paris. À partir du 23 septembre et jusqu’en décembre, «Art France Berlin» va investir une vingtaine de lieux institutionnels et alternatifs: musées, espaces d’exposition off, galeries, ateliers, espace public. L’exposition va épouser le tissu urbain et inciter à la promenade, avec une volonté délibérée de présenter les œuvres – peintures surtout, mais aussi sculptures, vidéos, installations – dans des lieux de niveaux et statuts différents, ont expliqué les organisateurs. Les artistes s’étagent entre les seniors de 80 ans et les benjamins de 20 ans. Le plus âgé et l’un des noms les plus connus de la palette n’est autre que le peintre Pierre Soulages. Le plat de résistance sera, au Musée Martin-Gropius-Bau, un riche panorama de plus de trente ans de création en France, «Peintures/Malerei», présenté sous le commissariat de Laurent Le Bon, conservateur au Centre Pompidou à Paris. Le centre y présente pour la première fois des pièces maîtresses de ses collections: 80 œuvres de 80 artistes seront montrées par ordre alphabétique, avec un accrochage sur quelque 1500 m2 qui autorisera des regroupements inattendus. Certaines œuvres seront créées sur place. Ainsi, depuis début septembre, plusieurs artistes ont commencé à les réaliser dans des espaces à leur disposition. Dans les écuries de l’ancienne Poste de Berlin, près de l’ancienne Grande synagogue de l’Oranienburger Strasse, un des grands collectionneurs français d’art contemporain, Jean Mairet, va montrer quatre artistes dans son exposition «Hautnah» («À fleur de peau»), dont Gilles Barbier, avec son imposant nu sur canapé, La vieille dame aux tatouages. Le peintre Claude Lévêque va exposer son installation Hymne dans le hall d’entrée du Hamburger Bahnhof, «musée pour le présent» de Berlin, tandis qu’Adel Abdessemed présentera un gigantesque squelette humain de 17 m en suspension dans une ancienne église protestante, St-Jean-Baptiste. Dans le cadre de l’initiative «ateliers ouverts», 13 artistes français vivant à Berlin vont laisser le public venir sur leurs lieux de création. L’Institut culturel français, sur la grande avenue du Kurfürstendamm, accueillera cinq artistes, et l’ambassade de France elle-même, à la Porte de Brandebourg, qui recèle un certain nombre d’œuvres, ouvrira ses portes durant une heure les samedis. Par ailleurs, sept galeries françaises ou établies en France vont rejoindre la Foire de l’art contemporain de Berlin qui a lieu en même temps, «l’Art Forum Berlin». Pourquoi un tel regroupement d’artistes français très divers à Berlin, alors que le marché est loin d’y être aussi fort que celui du Bassin industriel de la Ruhr (ouest) par exemple, ou que ceux de New York, Londres ou Paris? C’est que Berlin est de plus en plus en vogue pour beaucoup de jeunes artistes français, pour qui la capitale allemande est presque un passage obligé. C’est une ville relativement peu chère, où l’on trouve de l’espace, des ateliers, et c’est la cité d’Allemagne qui concacre le plus d’argent à la culture. Le collectionneur Jean Mairet a toujours aimé Berlin, «ville qui a une présence et une chair historique extraordinaire». «Ici, dit-il, on vit encore au ralenti, à 16 images/seconde», dit-il. Le 23 septembre, jour de l’ouverture au public, la chaîne franco-allemande Arte présentera l’exposition dans son émission Métropolis. Jean-Louis de LA VAISSIERE (AFP)