JOURNÉE INTERNATIONALE DE L’ALPHABÉTISATION - Message du directeur général de l’Unesco Koïchiro Matsuura : « L’alphabétisation, un outil puissant du développement »

À l’occasion de la Journée mondiale de l’alphabétisation, M. Koïchiro Matsuura, directeur général de l’Unesco, lance le message suivant : La célébration annuelle de la Journée internationale de l’alphabétisation le 8 septembre est une occasion de rappeler au monde l’importance de l’alphabétisation pour les individus, les familles, les communautés et les sociétés tout entières. Elle est aussi l’occasion de ne pas oublier que l’alphabétisation est un droit qui est encore dénié à environ un cinquième de la population adulte dans le monde. Le défi de l’alphabétisation à l’échelle mondiale est de montrer concrètement l’importance que l’alphabétisation revêt, de façon à donner espoir aux millions de femmes, d’hommes et d’enfants qui ne peuvent ni lire ni écrire ne serait-ce que leur nom. Des résultats considérables ont été obtenus dans de nombreux pays pauvres. Le Rapport mondial de suivi sur l’Éducation pour tous (2006) montre que les effectifs du primaire ont augmenté tant en Afrique subsaharienne qu’en Asie du Sud et de l’Ouest, chacune des deux régions comptant près de 20 millions de nouveaux étudiants. Quarante-sept pays ont réalisé l’éducation primaire universelle et 20 autres devraient y parvenir d’ici à 2015. De même, les effectifs de filles à l’école primaire ont augmenté rapidement, grâce à l’introduction de mesures relatives à l’égalité des sexes et à la qualité de l’éducation dans les plans d’éducation nationaux. La réalisation de l’éducation primaire universelle s’avère essentielle pour contenir le nombre de jeunes qui arrivent à l’âge adulte sans avoir acquis les connaissances de base en lecture, écriture et calcul. Des progrès ont également été accomplis grâce aux programmes d’alphabétisation des adultes et d’éducation non formelle dans de nombreux pays, mais d’énormes problèmes subsistent. On estime que 771 millions d’adultes ne savent ni lire, ni écrire, ni compter et que les deux tiers d’entre eux sont des femmes. Plus de 100 millions d’enfants, dont plus de la moitié de filles, ne sont toujours pas inscrits à l’école primaire. En outre, la durabilité de l’alphabétisation n’est pas garantie puisque les taux d’abandon scolaire restent élevés. À l’échelle mondiale, l’alphabétisation des adultes ne reçoit que 1 % des budgets nationaux de l’éducation. Par leur action, les gouvernements et les organismes d’aide montrent qu’ils n’accordent pas une priorité suffisante aux programmes d’alphabétisation des adultes et des jeunes. Les objectifs de la Décennie des Nations unies pour l’alphabétisation (2003-2012) et l’objectif d’alphabétisation de l’Éducation pour tous ne seront atteints que si les promesses se concrétisent. Si l’alphabétisation est importante en elle-même, elle est aussi, et chacun en convient, l’un des outils les plus puissants du développement, ce qui rend d’autant plus frustrante la négligence relative dont elle est l’objet. Dans le contexte de la Décennie des Nations unies pour l’alphabétisation et de la Décennie des Nations unies pour l’éducation au service du développement durable (2005-2014), il est évident que l’alphabétisation est non seulement un résultat positif des processus de développement, mais aussi un levier pour le changement et un moyen de favoriser le progrès social. C’est pourquoi la Journée internationale de l’alphabétisation a pour thème cette année « L’alphabétisation, levier du développement ». Le choix de ce thème vise à souligner que l’alphabétisation ne se limite pas à une aptitude cognitive – celle de lire, d’écrire et de compter – puisqu’elle facilite l’acquisition de connaissances et des compétences nécessaires à la vie quotidienne qui, utilisées et appliquées tout au long de la vie, conduisent à des formes de développement individuel, communautaire et sociétal durables. Les programmes d’alphabétisation établissent de plus en plus ce lien, comme le montre la façon dont l’alphabétisation est souvent associée étroitement à l’acquisition d’autres compétences liées aux moyens de subsistance, à la création de revenus, à la gestion de petites entreprises, à la protection de l’environnement, à la nutrition et à la santé (notamment à la prévention du VIH et du sida). Pour ces raisons, il est impératif que l’alphabétisation se fasse par des méthodes adaptées au contexte, identitaire, culturel et professionnel notamment. L’alphabétisation offre des possibilités de développer de nouvelles capacités et d’exercer de nouvelles libertés, qui peuvent transformer la vie. Pour exercer une influence durable, l’alphabétisation doit être cultivée et soutenue au moyen de livres, de journaux, de revues, d’ordinateurs et autres moyens de communication écrite. L’alphabétisation ne peut être le levier du développement si on la laisse dépérir et mourir faute de matériels. Le travail d’alphabétisation ne peut être effectué sans aide. C’est pourquoi, je rends hommage aujourd’hui au travail remarquable accompli par tous ces hommes et ces femmes – enseignants, moniteurs d’alphabétisation, travailleurs communautaires, parents, amis ou bénévoles, pour n’en citer que quelques-uns – qui, dans toutes les régions du monde, aident inlassablement autrui à s’exprimer par le mot écrit. Avec de petits moyens, au niveau local, ils font une grosse différence dans la vie des gens et méritent notre soutien et notre reconnaissance. À l’occasion de la Journée internationale de l’alphabétisation, que leurs efforts et leur engagement soient pour les autres un exemple lumineux du pouvoir de l’alphabétisation.