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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - « Mémoire du franc » au Musée de la monnaie de Paris jusqu’au 22 octobre Mireille Honeïn transforme les francs en œuvres d’art

Il aura fallu une Libanaise, résidente en France depuis de nombreuses années, bouillonnant d’idées, de dynamisme et de créativité, pour consacrer trois ans de sa vie à transformer de simples billets, des francs français voués à la destruction et donc à l’oubli, en 381 sculptures et, ainsi, sceller la mémoire du franc. Il aura fallu une tempête Mireille Honeïn, que rien n’arrête, pour y croire et arriver au bout de cette belle mais aussi pénible aventure. Il est vrai que l’argent contribue à faire le bonheur. Mais dans le cas de Mireille Honeïn, ce bonheur fut totalement différent, plus abstrait, insaisissable et visuel. Car c’est lorsqu’il a perdu sa valeur monétaire qu’elle a commencé à le regarder et l’apprécier comme du papier, un papier magique. C’est à cet instant que l’idée a germé, s’est développée et a pris rapidement forme. Et Mireille Honeïn s’est écriée, comme à son habitude, impatiente: «Qui m’aime me suive!» «En 2002, raconte-t-elle, alors que je regardais le journal télévisé, j’apprends qu’à l’occasion du passage à l’euro, les billets de francs français allaient être vérifiés, comptés, neutralisés avant d’être éliminés.» Ce billet prend alors valeur de testament, les dernières lignes d’une page de l’histoire qui sera définitivement tournée. Il inspire alors un projet dans la tête de l’artiste, qu’elle s’empresse de partager avec son ami, le sénateur Serge Vinçon, alors vice-président du Sénat. Ensemble, ils réussiront à embarquer le gouverneur de la Banque de France, aujourd’hui gouverneur de la Banque européenne, Jean-Claude Trichet, dans ce superbe pari. «C’était bien la première fois de ma vie, poursuit-elle dans un grand éclat de rire, que je recevais autant d’argent, d’énormes sacs débordant de billets de banque transpercés!» Les 20, 50, 100, 200 et 500 francs ne se calculent plus entre ses mains, pressées de démarrer le travail. De même que les infinies possibilités d’en faire des boîtes, des sculptures, des personnages, des bas, des urnes, des têtes, des sacs, des pelotes de laine, des jeux de mots, des rebus et j’en passe… Un travail acharné de trois ans Ces longues nuits blanches teintées de vert, bleu, ocre – les couleurs des billets – vont garder Mireille Honeïn éveillée pendant trois ans. Son atelier voit s’accumuler des œuvres qui dialoguent entre elles, semblant même s’amuser follement. Des centaines de boîtes où chaque billet se caractérise par un pli, une forme, une courbe, laissant s’échapper une expression, un clin d’œil, un rire, une joie. Les portraits de Saint-Exupéry, Pierre et Marie Curie, Eiffel, Cézanne et Debussy sont caressés, froissés, triturés, embellis ou répétés à l’infini. Le résultat, une œuvre grandiose, à la limite de l’obsessionnel, un délire de formes et de couleurs, stimulées par les mots, l’humour et la fougue de l’artiste. Galerie de portraits, arbre de vie ou cactus, cerfs-volants ou drapeau français, graphique boursier ou poussah, le franc devient un prétexte pour assouvir une inspiration illimitée, sans jamais se prendre au sérieux ni même être rassasié. L’aventure se poursuit Alors, pour présenter tous ces visages du franc dans leur écrin idéal, c’est-à-dire le Musée de la monnaie de Paris, il suffisait d’un pas, franchi avec l’élégante audace de la dame, au bras de Dov Zerah, directeur des lieux… Cette exposition, qui est autant un hommage au franc qu’à Mireille Honeïn, s’accompagne d’un très bel ouvrage de plus de 250 pages, préfacé par Amine Maalouf. Un travail en soi qui aura demandé encore d’autres nuits blanches à l’artiste, partagées avec la graphiste Hana Khalaf, l’imprimeur Anis Commercial Printing Press et Léogravure pour les photogravures. «Les billets de banque, sécurisés pour ne pas pouvoir être reproduits, ont été très difficiles à imprimer. Je ne peux que féliciter l’équipe pour ce travail créatif.» Le livre sacré, achevé d’être imprimé le 10 juillet, est arrivé à temps à Paris, en bon ambassadeur d’un Liban qui se remet miraculeusement de ses blessures. Mireille Honeïn, perfectionniste, aura tout donné pour mener cette aventure à bon port. Elle en ressort épuisée, mais comblée. Après la terre, la pierre, le bois, le béton, le papier mâché, le métal, la cire, le plâtre et le bronze, où emmènera-t-elle son public? Qui l’aime la suive, avait-elle prévenu... Le vernissage a eu lieu hier. L’exposition se poursuivra jusqu’au 22 octobre, du mardi au samedi, de 11h à 17h30, et le dimanche de 12h à 17h30. Carla HENOUD

Il aura fallu une Libanaise, résidente en France depuis de nombreuses années, bouillonnant d’idées, de dynamisme et de créativité, pour consacrer trois ans de sa vie à transformer de simples billets, des francs français voués à la destruction et donc à l’oubli, en 381 sculptures et, ainsi, sceller la mémoire du franc. Il aura fallu une tempête Mireille Honeïn, que...