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Actualités - CHRONOLOGIE

CRISE - Les supermarchés ont au moins triplé leurs ventes les premiers jours du blocus Après l’affluence du début, la tension sur la grande distribution se relâche un peu

La panique des premiers jours du blocus a cédé la place à un quasi-retour à la normale. C’est en tout cas ce qu’affirment la plupart des propriétaires ou gérants de supermarché interrogés. « Au début de la guerre, la demande a été multipliée par trois », affirme Patrick Ogden-Smith, propriétaire du supermarché Smith’s, situé à Hamra. « Avec le commencement des opérations d’évacuation, elle est redescendue au double de ce qu’elle était en temps de paix, avant de retrouver son niveau initial », ajoute-t-il. « Nos ventes sont revenues à la normale après avoir triplé les quatre premiers jours de l’offensive », confirme Ahmad Itani, PDG de l’enseigne Shopper’s et ancien président du syndicat des supermarchés. En revanche, à Saïda, le supermarché Bsat, qui fournit 60 % du marché de la ville et de ses environs, a vu ses ventes multipliées par sept la première semaine du conflit. Par la suite, la demande a diminué pour se situer aujourd’hui autour de deux fois et demie son niveau normal. Yéhia Bsat, le propriétaire du supermarché, explique cette évolution : « Les gens se sont précipités dès l’éclatement de la guerre pour faire des stocks et ont épuisé leurs revenus. » La distribution des aides aux réfugiés de la part des associations et du Haut Comité de secours a également contribué à relâcher la tension sur les supermarchés. Du côté des importateurs et distributeurs de produits alimentaires, la progression de la demande a connu une évolution similaire à celle des supermarchés. Ainsi, chez Transmed, on estime que la demande a été multipliée par trois la première semaine du conflit, avant de diminuer et d’atteindre un niveau inférieur à la normale pendant la dernière semaine de juillet. Ce rythme d’évolution de la demande est confirmé par Mohammad el-Baba, grossiste et distributeur de produits alimentaires : « Les dix premiers jours, nous avons écoulé une quantité qui correspond à un mois d’activité. Aujourd’hui, le niveau des ventes est revenu à la normale. » D’une manière plus générale, Joseph Aour, président du syndicat des importateurs de produits alimentaires, estime que la demande a quadruplé, voire quintuplé au début du blocus. Mais d’autres importateurs, qui ont préféré garder l’anonymat, tempèrent ces chiffres. Pour eux, la hausse de la demande de la part de certains supermarchés est seulement venue compenser la baisse, voire l’arrêt des ventes vers les régions les plus touchées par les bombardements, où beaucoup de commerces, d’hôtels et de restaurants sont fermés. Une demande différente Les supermarchés qui ont accepté de communiquer font aussi état d’un changement dans la nature de la demande. Les consommateurs se dirigent désormais exclusivement vers les produits alimentaires de base, à l’exemple du pain, du riz, des conserves, du lait et de l’eau minérale. En revanche, « les produits de luxe comme le fromage français sont beaucoup moins demandés, les gens craignant une mauvaise réfrigération. Ces produits voient ainsi leur prix baisser », indique Joseph Aour. Il n’en est pas de même pour toutes les denrées. Il est difficile d’établir avec précision une liste de celles qui sont le plus concernées par la hausse des prix. Cela varie en effet en fonction de l’accessibilité des régions. Flambée des coûts Désormais, les prix des produits sont affectés en tout premier lieu par les coûts de transport. Ceux-ci ont évolué de manière exponentielle. Ils ont été multipliés par dix en moyenne, quelle que soit la distance à traverser. « Le coût du transport d’un conteneur du port jusqu’au dépôt – soit un trajet d’une vingtaine de minutes – est passé de 60 à 600 dollars », indique Mohammad el-Baba. « La fuite des ouvriers syriens et égyptiens qui travaillaient dans le dépôt, et la difficulté de recruter parmi la main-d’œuvre locale créent également une pression sur les prix. Pression d’ailleurs accentuée par l’épuisement des stocks de certains produits importés, dont c’est actuellement la saison, comme le pois chiche ou les lentilles », ajoute-t-il, estimant à 20 % environ la hausse des prix qui résulte de la combinaison de ces trois facteurs. Les supermarchés n’ont pas encore répercuté toute cette hausse. Ils affirment avoir gardé leurs prix à peu près stables… pour le moment. Risque de pénurie ? Malgré l’affluence des premiers jours, le Liban disposerait toujours de stocks de produits alimentaires. Mais pour combien de temps encore ? Les estimations des importateurs et distributeurs varient entre une dizaine de jours et deux semaines tout au plus. À cela il faut ajouter que certains stocks sont inaccessibles parce que situés dans la banlieue sud de Beyrouth ou au sud du pays. Enfin, pour couronner le tout, le bombardement des ponts reliant Beyrouth au Nord a mis un coup d’arrêt aux rares importations, et surtout aux aides qui commençaient à parvenir au Liban depuis la Syrie. Pour autant, le président du syndicat des importateurs se veut rassurant. Il affirme être en contact permanent avec les ministères concernés. « Si la situation dure, des corridors commerciaux pourront être établis pour assurer l’acheminement de produits alimentaires de première nécessité », conclut-il. Les consommateurs voudraient bien partager cet optimisme. Mais les quelques fragiles « corridors humanitaires » qui commençaient à se mettre en place ont été détruits. Alors, peut-on vraiment espérer des corridors commerciaux ? Line RIFAÏ
La panique des premiers jours du blocus a cédé la place à un quasi-retour à la normale. C’est en tout cas ce qu’affirment la plupart des propriétaires ou gérants de supermarché interrogés. « Au début de la guerre, la demande a été multipliée par trois », affirme Patrick Ogden-Smith, propriétaire du supermarché Smith’s, situé à Hamra. « Avec le commencement des opérations...