La presse française exhale son amertume

«Cruel », « Regrets éternels », « Si près du rêve », « Le rêve brisé » : la presse nationale était particulièrement amère hier matin après la défaite de la France en finale du Mondial de football dimanche à Berlin. « Bravo quand même », titre en une l’Humanité, « Zidane a marqué, puis s’est fait expulser », écrit le quotidien communiste, qui, comme la plupart des titres, veut pardonner à Zinedine Zidane son coup de tête contre Marco Materazzi, qui lui vaudra l’expulsion à la 110e minute. « Zizou, merci, merci pour tout », estime Pierre Laurent dans son éditorial, mais Claude Droussent dans L’Équipe, est plus dur et demande au capitaine de l’équipe de France « comment cela a-t-il pu arriver à l’homme que vous êtes ? », tout en se montrant compréhensif : « Je vous imagine très malheureux ce matin », ajoute l’éditorialiste du quotidien sportif. Libération (gauche) opte pour « Cruel » en grandes lettres au-dessus d’un Zidane photographié de dos, les mains sur la tête, et explique dans son éditorial que « depuis un mois, la France rêvait avec Zidane. Ce matin, elle se réveille avec Chirac. France, terre de contraste, qui, même quand elle joue au ballon, n’arrive plus à dominer le monde ». L’Équipe cultive l’amertume et étale sa tristesse. « Regrets éternels », titre le journal, qui consacre les deux tiers de son édition à l’événement, avec à chaque page, un chapeau lourd de sens : « Zidane, la sortie ratée » ; « On rêvait d’une autre fin » ; « La consternation et les larmes » ; « Aux larmes citoyens », ou encore « Le périple inachevé ». « Le rêve brisé des Bleus », titre Le Figaro (droite) dans ses pages sportives en louant la performance italienne. « L’Italie assomme la France », analyse le quotidien : « Comme en 1982 après le scandale du Totonero (autour de paris truqués), le triomphe italien a un parfum de rédemption. » Le journal populaire Le Parisien fait sa une sur un simple « Merci ! ». La presse quotidienne régionale montre dans l’ensemble le même visage, à l’image du Dauphiné Libéré qui titre « La France assommée ». « Hier, Zinedine Zidane est redevenu mortel. L’histoire était si belle. La fin, on l’oubliera », écrit le quotidien. « Cruelle issue », titre en une La Montagne, au-dessus d’une photo de l’arbitre attribuant un carton rouge à Zidane. « On pleure ce matin d’un côté des Alpes. On rit de l’autre. Mais qu’importe, la fête a été belle », estime le journal auvergnat. « Cruel » est le terme qui revient le plus souvent également dans les journaux du sud, à l’image de La Provence, de Corse-Matin et de Nice-Matin. Pour La Marseillaise, cette finale est un « rêve envolé ». « Tirs maudits », souligne la Dépêche du Midi, qui n’oublie cependant pas de remercier les Bleus qui « ont fait rêver tout un pays en lui donnant l’occasion de faire la fête ». Pour le Midi Libre, le coup est passé « si près... », ce que confirme le quotidien lyonnais Le Progrès avec un « Si près du but ». « La France n’est pas championne du monde pour la deuxième fois. Pire, elle a fini la prolongation sans son héros », écrit le journal. Sud-Ouest insiste également sur la « sortie manquée » de l’ancien joueur des Girondins de Bordeaux. « Ce qui laisse un goût amer, c’est moins cette défaite de justesse que la sortie manquée de Zidane, sur un coup de sang et un coup de tête malheureux ». La Voix des Sports évoque également « le rêve brisé » et estime que « l’artiste était trop turbulent, mais il était d’abord tout simplement humain, avec ses forces et ses faiblesses ». Le Télégramme de Brest insiste d’ailleurs sur l’intervention du 4e arbitre. « Quelque part, ce n’est pas illogique : pour l’image du football, il n’eut pas été bon qu’un tel geste ne fût pas sanctionné. Mais quelle hypocrisie ! Si l’arbitrage vidéo existe, il faut le dire ! » Pour Ouest-France, « c’est trop dur », et pour L’Alsace, « les Azzurri ont brisé un rêve ». Enfin, une fois n’est pas coutume, l’hebdomadaire du rugby Midi Olympique, qui paraît tous les lundis, consacre sa une au Mondial de foot avec une photo de Zinedine Zidane levant les bras au ciel et en gros titre « La folie foot est-elle soluble dans le rugby ? ».