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Actualités - OPINION

LE POINT Politiciens, disent-ils

Observez-le, ce théâtre d’ombres, qui se veut, à Dieu ne plaise, la projection de nos vies sur l’écran du monde. Pitoyable dans son inconsistance, insupportable dans sa prétention. Des exemples, il y en a, en veux-tu en voilà. Voyez donc George W. Bush qui se démène pour convaincre les Américains, et avec eux le reste de la planète, que sa guerre contre le terrorisme, entamée au triple galop, après un certain 11-Septembre, d’abord en Afghanistan, ensuite en Irak, elle est déjà à moitié gagnée. Oubliant d’ajouter, à supposer que cela soit vrai, qu’il lui reste à remporter la deuxième phase de la bataille, la plus ardue. En attendant, et pour peu que l’on veuille rester terre à terre, force est de constater qu’à chaque aube qui se lève, les États-Unis sont tenus d’emprunter un milliard de dollars pour s’acquitter de leur facture pétrolière. Ou encore Tony Blair, bien moins sémillant qu’il ne cherche à paraître, contesté par les sujets de Sa Gracieuse Majesté et jusqu’au sein de son propre parti, harcelé par son chancelier de l’Échiquier qui piaffe d’impatience en attendant de lui ravir la place et ne lui laissant même pas l’occasion de donner le change en ces mois où son avenir est en train de se jouer. Regardez encore Jacques Chirac, soudain en panne d’idées, lui qui en avait plein la tête, mais aussi de dauphins, maintenant que le préféré d’entre eux a baissé les bras, ayant jugé sans doute complète sa collection de gaffes. Qui d’autres ? Ah oui, Vladimir Poutine, le KGBiste-judoka fourvoyé dans l’univers autrement plus impitoyable de la vie publique, faux Pierre le Grand et qui se révèle être un ayatollah slave émettant des fatwas, assorties de roubles sonnants et trébuchants, à l’encontre des illuminés Irakiens – après les indépendantistes tchétchènes - coupables d’avoir trucidé quatre de ses diplomates. Un échelon plus bas, et sur deux autres continents, l’Afrique et l’Asie, le tableau n’est guère plus réjouissant. Le sida, la famine, les guerres avec leurs cortèges de « nettoyages » (ethniques, religieux...), un sous-développement non plus rampant mais galopant désormais, le déni de toute forme de ce qu’il est convenu de parer du nom de démocratie sont en train de ravager les trois quarts de la planète Terre, fauchant chaque année des millions de vies humaines. Pendant que les maîtres des destinées de ces contrées assistent impuissants - quand ils ne sont pas complices ou, plus grave, acteurs directs – à la plus grande tourmente de l’histoire de l’humanité. Les maigres oboles versées, comme pour se donner bonne conscience, par les États riches atterrissent le plus souvent dans des comptes, secrets uniquement pour leurs destinataires originels, mais dont la toute-puissante Amérique connaît parfaitement les numéros maintenant que l’on sait tout, ou presque, sur la maison Swift. Cette longue, cette pénible énumération, bien incomplète, pour dire quoi ? Simplement ceci : avec le naufrage de nombre de grands et beaux principes, qui firent jadis la gloire du Siècle des Lumières, c’est à l’échec patent d’une certaine idée que l’on se faisait de la politique que nous sommes en train d’assister. Et avec elle, bien entendu, des politiciens, dans le sens étriqué (ô combien !) du terme. D’où la désaffection à l’égard de ceux-là d’une très grande partie de l’opinion publique. C’est que, désormais, il a autre chose à faire, le monde, que suivre dans leurs errances ces otaries, un temps savantes et aujourd’hui pérorantes, qui s’acharnent encore à essayer de nous débiter une salade devenue insipide. Quand, la bave aux lèvres, elles ne s’écharpent pas – suivez notre regard... – sans pour autant réussir par leurs invectives à intéresser qui que ce soit. Bien sûr qu’il y eut un temps, pas si lointain, où l’exaltation était au rendez-vous à chaque fois qu’étaient évoquées de nobles causes censées produire de grands effets. Las ! La potion ne prend plus, non pas que les thèmes aient perdu de leur impact mais parce que, banalisés et mal défendus par ces piètres avocats que sont les hommes politiques, ils sont devenus comme autant de monnaies dépréciées dont personne ne veut plus. Sans doute aussi que la bérézina du communisme, dans les années quatre-vingt, celle sans doute à venir du capitalisme en attendant la fin, à plus long terme, de tous les ismes y sont pour beaucoup mais la débâcle est essentiellement d’ordre politique. Elle appelle à une révision déchirante de pas mal d’idées reçues et au renvoi à leurs chères études de tous ceux qui se sont arrogé le droit régalien de veiller sur notre devenir. L’erreur de tout ce beau monde aura été de ne pas voir combien l’exercice de la chose publique peut être un implacable révélateur dont il importe constamment de se méfier. La tragédie est que nous soyons, nous pauvres sujets, les uniques victimes de cette erreur. Christian MERVILLE
Observez-le, ce théâtre d’ombres, qui se veut, à Dieu ne plaise, la projection de nos vies sur l’écran du monde. Pitoyable dans son inconsistance, insupportable dans sa prétention. Des exemples, il y en a, en veux-tu en voilà. Voyez donc George W. Bush qui se démène pour convaincre les Américains, et avec eux le reste de la planète, que sa guerre contre le terrorisme, entamée au...