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Actualités

Bienvenue au pays des droits de l’homme !

La scène se passe à l’aéroport Rafic Hariri à Beyrouth. Une centaine de ressortissantes sri lankaises et philippines défilent à travers le hall d’arrivée, en file indienne, solidement encadrées d’agents de la Sûreté générale. Les jeunes femmes sont bousculées, parquées dans un coin d’une trentaine de mètres carrés, où elles s’entassent, bagages compris… Le tout derrière une pancarte où l’on peut clairement lire : « Salle d’attente des bonnes ». À l’heure où dans d’autres pays, on les désigne pudiquement comme « des agents d’entretien », nous nous serions largement suffi d’un nettement plus modeste employées de maison. Mais bon, admettons que là n’est pas le point essentiel de l’affaire et passons. Les jeunes femmes, donc, fatiguées du long voyage et par plus de deux heures d’attente à l’arrivée, discutent entre elles. Banal, diriez-vous ? Ce n’est pourtant pas de cet œil-là que les agents de la SG voient les choses. Pour eux, il s’agit plutôt d’insoumission, voire de rébellion. Cela vaudra à quelques-unes, en sus d’un méchant regard noir, une réprimande en bonne et due forme. L’une d’entre elles, une quarantenaire bien mise, essuiera une larme au coin de l’œil. Elle doit se dire qu’elle n’est pas au bout de ses peines, et elle n’a souvent pas tort. Car si la plupart savent ce qui les attend, ainsi que les conditions de travail parfois scandaleuses auxquelles elles vont devoir se résigner, elles ne savent pas, par contre, sur qui elles vont tomber. Si elles ont de la chance, elles débarqueront dans une maison où on leur aura prévu un lit, dans une chambre bien à elles, et où on leur parlera poliment, sans jamais leur manquer de respect. Mais il y a les autres, nettement moins chanceuses, qui dormiront trois ans durant sur un matelas jeté à même le sol au milieu de la cuisine. Il y en a qui se verront attribuer une assiette, une fourchette et un verre rien qu’à elles (chance !) pour éviter qu’elles ne « souillent » les affaires des patrons. Il y en a qui seront insultées à la moindre incartade. Il y en a qui travailleront 15 heures par jour. Il y en a qui se feront houspiller par des enfants de deux ans dont elles auront la charge du matin jusqu’au soir. Il y en a qui se verront rationner la nourriture, voire interdire l’accès libre au réfrigérateur et aux placards verrouillés. Il y en a. Malheureusement. Bien plus qu’on le croit. Les Libanais vont-ils enfin comprendre qu’il est honteux, de nos jours, de faire preuve d’autant de racisme ? Car il faut dire les choses comme elles sont. C’est bien de racisme qu’il s’agit. Peut-on expliquer autrement le fait que dans la plupart des complexes balnéaires, la baignade est interdite aux accompagnatrices (de couleur) des enfants ? Peut-on expliquer autrement que dans certains clubs, le personnel soit en principe interdit, mais que les aides libanaises ou syriennes (donc blanches) soient quand même acceptées ? Ce n’est certes pas en observant le comportement honteux du « service d’accueil » à l’aéroport que les gens vont s’encourager à changer enfin leurs comportements… La décision doit venir des autorités compétentes. Les choses doivent obligatoirement changer, sous peine de voir le Liban rester encore longtemps dans le peloton de tête des pays désespérément en voie de développement, abonnés perpétuels aux manquements flagrants au respect des droits de l’homme. Joumana Debs NAHAS
La scène se passe à l’aéroport Rafic Hariri à Beyrouth. Une centaine de ressortissantes sri lankaises et philippines défilent à travers le hall d’arrivée, en file indienne, solidement encadrées d’agents de la Sûreté générale. Les jeunes femmes sont bousculées, parquées dans un coin d’une trentaine de mètres carrés, où elles s’entassent, bagages compris… Le tout...