Rechercher
Rechercher

Actualités

Yémen - Sumayya Ali Rajja, la première candidate à l’élection présidentielle de septembre Pour la première fois, une femme veut défier Ali Abdallah Saleh

«Je me suis portée candidate pour toutes les femmes du Yémen », lance Sumayya Ali Rajja, la première femme à avoir annoncé sa candidature à l’élection présidentielle de septembre au Yémen. C’était le 5 décembre. Depuis, une dizaine d’autres personnes, dont deux femmes, ont également manifesté l’intention de participer au scrutin, mais la plupart de ces candidats virtuels ne sont pas pris au sérieux. Bien qu’il ait annoncé l’an dernier qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat, personne ne doute que le général Ali Abdallah Saleh, inamovible président depuis 1978, époque où il y avait deux Yémen (il dirigeait alors le Nord), sera candidat à sa succession et sera facilement réélu pour sept ans. Dans ce pays misérable de la péninsule arabique où les femmes, dans leur immense majorité, ne se déplacent que vêtues du « sharshaf » – tenue formée d’une longue robe noire allant jusqu’aux chevilles et d’un voile noir cachant tout le visage sauf les yeux –, la décision de Mme Rajja de se lancer dans la bataille a fait un certain bruit. Née à Taïz (Sud) il y a 51 ans dans une famille étonnamment moderne pour le lieu et l’époque, Mme Rajja a l’habitude de jouer les précurseurs. « Nous avons été les premières femmes modernes au Yémen à sortir sans “sharshaf” », dit-elle à propos de ses trois sœurs et d’elle-même, dans une interview à l’AFP à son domicile, un appartement cossu de Sanaa qui lui sert de QG électoral. Elle ira ensuite étudier aux États-Unis et travaillera pour la télévision yéménite, avant de vivre pendant dix ans en France à la suite de son mariage avec un Français. Mère de deux enfants, elle est rentrée en Yémen en octobre après son divorce. Contrairement aux affirmations officielles, Mme Rajja, qui porte un simple foulard sur la tête, assure que la condition des femmes yéménites a régressé au cours des vingt dernières années et explique que c’est « en partie » la raison de sa candidature. « J’essaie d’attirer l’attention sur le fait que vous ne pouvez pas cacher la moitié de votre population », explique-t-elle. Pour devenir candidate, Mme Rajja devra toutefois obtenir en juin les voix de 5 % des membres du Parlement et du Majlis al-Choura (Conseil consultatif). Le parti gouvernemental ayant 229 des 301 sièges du Parlement et les membres du Majlis étant nommés par le pouvoir, c’est donc en fait le chef de l’État qui décidera si Mme Rajja pourra faire campagne contre lui. Celui-ci pourrait aider une rivale potentielle, parce qu’il a besoin d’elle pour que l’élection ait des apparences démocratiques, selon Mme Rajja. Pour sa part, un diplomate estime que « le président s’amusera à montrer au monde qu’il y a une femme qui peut être candidate ». Mme Rajja reconnaît que les apparences sont contre elle. « Des femmes viennent me voir et me disent : “Le président vous a demandé de faire ça, n’est-ce pas ?” » Elle assure financer sa campagne sur ses fonds propres, avec un budget de 200 000 dollars, et grâce au travail bénévole d’une demi-douzaine de conseillers. En tout cas, Mme Rajja ne mâche pas ses mots à l’encontre du pouvoir, dénonçant « un système de prébendes ». Quand on lui dit qu’une femme n’a aucune chance d’être élue dans un pays machiste comme le Yémen, elle réplique qu’au contraire, « la plus grande crainte » du pouvoir, « c’est la nomination d’une femme ». Car le Yémen, dit-elle dans une allusion à la reine Bilquis (la légendaire reine de Saba) et à la reine Arwa, qui régna après l’arrivée de l’islam, « est un pays de reines ».
«Je me suis portée candidate pour toutes les femmes du Yémen », lance Sumayya Ali Rajja, la première femme à avoir annoncé sa candidature à l’élection présidentielle de septembre au Yémen.
C’était le 5 décembre. Depuis, une dizaine d’autres personnes, dont deux femmes, ont également manifesté l’intention de participer au scrutin, mais la plupart de ces candidats...