Mila M. au Quartier des Arts

Avec sa grande affiche «Quartier des Arts», Saifi Village est un lieu éclectique, une île coincée entre le parking de la mosquée al-Amine (celle où reposent Rafic Hariri et ses compagnons) et celui de la cathédrale arménienne du ring. Les passants qui traversent ce havre, entre galeries d’art, de design et d’antiquités, savent qu’il s’y niche aussi les boutiques de mode les plus pointues de la ville. C’est donc ici, dans la ruelle du vieux «Souk a’nnajjarine», le souk des menuisiers, que Milia M. a installé son espace. Cette jeune créatrice n’est plus à présenter depuis le temps qu’avec sa complice, Magida, elle s’est lancée dans le créneau difficile du prêt-à-porter féminin. Inlassablement, elle dessine, croque, pique et coud jusqu’à obtenir ces lignes décalées, déstructurées, souvent inspirées de l’histoire du costume. L’hiver, ses silhouettes japonisantes aux couleurs sombres, ses mailles et ses cols en renard teinté de fluo ont fait fureur. Elle revient pour la belle saison avec des tops en soie d’une légèreté savoureuse, imprimés comme à l’aquarelle, et des tee-shirts en coton léger qui revisitent le tie and dye. Dans ce long couloir en béton brut qui débouche sur la lumière d’un jardin intérieur, les couleurs suspendues aux cintres habillent aussi le décor. Il y a quelque chose des coulisses d’un théâtre dans le boudoir, à l’angle, meublé d’un pouf géant en velours grenat. Diva on en sort, et en diva on vous accueille, parce que vous êtes le personnage clé de cette somptueuse mise en scène. Vous reviendrez pour le bonheur, pour cette expérience qui ressemble à un voyage. Et vous aurez le sentiment de faire partie de ces happy-few, jaloux de leur territoire, habitués du marché bio du samedi et amateurs d’insolite, qui fuient les aires commerciales pour découvrir dans Saifi Village ce que Beyrouth ne peut offrir nulle part ailleurs.