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Dysfonctionnement structurel, corruption, déficit : le secteur de la santé souffre d’un mal chronique La réforme de la CNSS, un premier pas vers la refonte totale du système

Classée parmi les dossiers les plus prioritaires, la réforme de la Caisse nationale de sécurité sociale devrait incessamment faire l’objet d’une réunion extraordinaire du Conseil des ministres, à moins d’être reportée, une fois de plus, à cause des échéances politiques qui semblent mobiliser les responsables politiques, reléguant les dossiers socio-économiques au second plan. Dans un rapport accablant, un comité d’experts formé à la demande du Premier ministre, Fouad Siniora, a proposé des recommandations pour l’adoption de mesures radicales de réforme au plan des textes législatifs, de l’administration et de la gestion de la Caisse et des Finances. Des propositions qui ont été revues et corrigées par un comité ministériel regroupant les ministres concernés (Travail, Santé, Finances, Économie) ainsi que les experts indépendants à l’origine du premier rapport. Ainsi est né le fameux document n° 4 dans lequel ce comité préconise un plan de réforme majeur du fonctionnement et des modes de prestations de la Caisse (voir encadré) introduisant ainsi, et pour la première fois, un système de contrôle actuariel qui serait effectué par des experts indépendants qui figureraient parmi les membres du conseil d’administration. S’il est rigoureusement appliqué, ce plan de réforme, qui a fait l’objet de moult négociations et débats, devrait en principe révolutionner le fonctionnement de la CNSS, un pas majeur vers une réforme globale attendue sur le plan des prestations sociales dans leur ensemble et surtout au niveau du secteur de la santé. Certes, les problèmes dont souffre la CNSS sont multiples : textes de lois inadaptés, absence d’un plan économique et financier pour parvenir à un équilibre financier, dépenses fonctionnelles relativement élevées, bureaucratie paralysante, hiérarchie administrative lourde et complexe, le tout entraînant un déficit chronique et un service défectueux dont se plaignent les partenaires de la CNSS et, en premier, les bénéficiaires. Ainsi, la réforme de cette institution est devenue d’autant plus urgente que les enjeux financiers de part et d’autre sont énormes, rendant de plus en plus difficile la relation entre l’État, les assureurs, les médecins et les hôpitaux, pris dans l’engrenage d’un cercle vicieux dont plus personne ne sortira indemne si le chaos persiste. La CNSS souffre d’un déficit chronique qui l’empêche d’honorer ses dettes auprès des hôpitaux (près de 400 milliards de livres libanaises à la date du 31 décembre 2005). Pour sa part, l’État doit également des sommes importantes à la Caisse qui les récolte au compte-gouttes. Celle-ci n’est toujours pas parvenue à établir un système rigoureux de collecte des contributions auxquelles échappent une grande partie des employeurs devenus maîtres dans l’art de se dérober à leurs obligations. Autant de dysfonctionnements qui se répercutent tout le long de la chaîne, faisant une victime majeure : l’assuré. Cependant, il serait erroné d’envisager ce dossier sous le seul angle de la nécessité de réformer la CNSS, une initiative incontournable mais non suffisante qui devrait être accompagnée d’une vision globale pour l’ensemble du secteur de la santé, impliquant une révision de l’ensemble de la relation entre partenaires publics et privés, tels que les hôpitaux et les prestataires des services de soins et de matériels médicaux qui participent, d’une manière ou d’une autre, à ce chaos généralisé. Les accusations de mauvaise gestion, de dilapidation et de fraude sont monnaie courante dans ce milieu où chacun essaye d’ignorer ses responsabilités en rejetant la balle dans l’autre camp. Or les maux dont souffre ce secteur sont désormais connus de tous les partenaires qui semblent enfin prêts – officiellement du moins – à envisager une solution en profondeur. « Le problème est en premier et en dernier lieu structurel. Cela s’applique à l’ensemble du système qui doit être revu dans une optique globale », martèle Walid Ammar, directeur général du ministère de la Santé. Pour cet expert en économie de la santé, le seul moyen de lutter contre la corruption et la mauvaise gestion est la modernisation du secteur pris dans son ensemble. Un avis que partage le ministre de la Santé, Mohammad Khalifé, qui planche depuis deux ans sur un plan de réforme globale aux niveaux fonctionnel, financier et administratif. Un plan qui devrait permettre à long terme un accès de tous à des soins médicaux de qualité. Envisagée sous cet angle, la réforme devrait affecter l’ensemble du secteur : unification des codes et des tarifs des actes médicaux, définition d’un protocole pour chaque type de soin, renforcement du contrôle a priori et a posteriori, prévention et politique de santé scolaire. Après avoir tiré pendant longtemps à boulets rouges sur les assureurs publics (ils sont six en plus du ministère de la Santé), le syndicat des hôpitaux privés a enfin reconnu que la crise est générale et qu’elle ne saurait être résolue que dans le cadre d’une refonte totale du système. Celle-ci passe nécessairement par une décision politique. « Nous faisons tous des erreurs. Nous sommes également responsables de la corruption qui gangrène ce secteur. Malheureusement, c’est le citoyen qui en paye le prix au bout du compte sachant toutefois qu’il participe souvent, de manière directe ou indirecte, à cette fraude endémique », admet le président du syndicat, Sleimane Haroun. Ce dernier espère que le Conseil des ministres – qui semble cette fois-ci déterminé à s’attaquer au problème – puisse entreprendre une action radicale « à condition, dit-il, qu’elle soit accompagnée d’un suivi rigoureux ». Un défi de taille qui mettra à l’épreuve la volonté de réformes annoncée à cor et à cri par le gouvernement. Jeanine JALKH
Classée parmi les dossiers les plus prioritaires, la réforme de la Caisse nationale de sécurité sociale devrait incessamment faire l’objet d’une réunion extraordinaire du Conseil des ministres, à moins d’être reportée, une fois de plus, à cause des échéances politiques qui semblent mobiliser les responsables politiques, reléguant les dossiers socio-économiques au second...