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Festival al-Bustan - Un concert de grande qualité pour mélomanes chevronnés Zad Moultaka, le clavier ludique et jubilatoire

Un concert formidable pour un public formidable ! Avec Zad Moultaka qui ne fait jamais rien comme personne, la surprise était de taille à l’auditorium Émile Boustany (Beit-Méry) où ont résonné au clavier des airs de Mozart, de Haydn et du compositeur de Zarani, avec, en prime, attribution et distribution de prix. Non, on ne radote pas, on ne confond pas les plans et ce n’était pas une kermesse ! Mais bien un concert de grande qualité pour mélomanes chevronnés en compagnie d’un pianiste brillant au talent éminemment ludique et jubilatoire. Voilà une approche bien inédite pour un concert indubitablement « mozartien » qui, en plus de ses indéniables qualités d’interprétation et d’un programme intelligemment concocté (quoique un peu court), a laissé l’auditoire actif, amusé et ravi. En dépit de certains chromatismes à la netteté peu fiable (probablement fatigue du voyage), ce ne fut certainement pas un concert ronronnant et conventionnel au sens étriqué du terme. Pull au col roulé et pantalon noir pour le compositeur d’Anachid qui s’installe au clavier en déstructurant des sonates pour piano de Mozart et de Haydn. Douze mouvements lâchés sur les touches d’ivoire comme pour une rencontre « Blind Date » avec le public... Bien sûr, il y a là de quoi sonder et tester les connaissances de chacun. Rude épreuve de soi-même parfois… Même les plus fervents mélomanes, mordus au cœur par le génie de Salzbourg et du père de la Symphonie, ont eu des moments de doute. Jouer un morceau de musique classique sans en révéler le compositeur ni l’œuvre interprétée et demander à l’auditeur d’en deviner tout simplement le compositeur est un jeu certes innocent mais qui jette le doute dans bien des certitudes. Et mine de rien secoue en douceur des valeurs qu’on croit solidement établies dans les sensibilités et les impressions de chacun… D’autant qu’entre Mozart et Haydn se tissent des liens de complicité, d’inspiration, de partage d’une époque aux influences et tendances musicales communes. Deux musiciens de génie qui se sont croisés. Né vingt-quatre ans avant Mozart, Haydn devait mourir à soixante-dix-sept ans tandis que le compositeur de La flûte enchantée, né en 1756, devait s’éteindre à trente-cinq ans. Des prix au service de la culture Pour ce bref parcours où deux musiciens hors pairs se sont rencontrés bien furtivement, voilà donc Zad Moultaka cheminant allègrement entre presto et adagio, entre andante et allegro ; et le public tentant de découvrir, à travers la narration sur clavier, la voix de Mozart ou Haydn, en cochant la bonne réponse sur la grille d’un petit papier distribué au public, ramassé à l’entracte, et rémunéré pour les cinq premiers gagnants par des prix à la fin du concert ! Nous y reviendrons d’ailleurs ! Petit entracte et reprise avec la Sonate en d majeur HOB XVI : 37 de Haydn. De l’aveu même de Zad Moultaka, et contre toute attente (il est presque unanimement convenu que la musique du divin Mozart est une vraie panacée), le pianiste est séduit par l’extrême « inventivité » du compositeur de la Symphonie d’Oxford. Verve rythmique inépuisable et saisissante fluidité mélodique pour une narration toute en « inventivité », admirablement soulignée par un interprète au comble du bonheur d’être ce passeur entre partition et émotion du public. Moment très attendu où, outre ses talents d’interprète, Zad Moultaka dévoile ceux de sa composition. Une œuvre courte mais à la fois intense et tendre : Hommage à Luc Ferrari, musicien italien installé en France à l’humour fracassant. Pour évoquer les notes pleines de facéties de Luc Ferrari, Zad Moultaka a parlé des chaussures rouges que ce septuagénaire aimait porter. Le musicien libanais, toujours d’une grande sobriété vestimentaire – en jeans et pull sombre –, a sans doute été marqué par ce détail extravagant ! Entre des sonorités de piano enregistrées et l’interprétation live, Moultaka alterne rythmes et mélodies aux dérives modernes maîtrisées, le tout à partir de bribes de phrases de Haydn. Cette partition garde l’auditeur délicieusement aux aguets d’autant que les bruits de la nature, le tonnerre, le coassement des grenouilles et le chant des grillons font irruption avec un naturel déroutant et s’en vont tout aussi naturellement. Comme un rêve… Et restent ces bribes de phrases de Haydn comme interprétées par deux pianos… Étonnant Zad Moultaka d’une simplicité géniale. Applaudissements et un bis. Mozart à l’honneur bien sûr. Puis place aux gagnants, comme promis. À noter, parmi les lauréats, la présence de jeunes mélomanes. Belle et édifiante jeunesse imprégnée de culture. Le premier prix (une croisière) est attribué à Alexandre Semaan. Le second prix à Hiram Obeid, le troisième et quatrième à Jean Gibran et Georges Khalaf. La bouteille de champagne, cinquième prix, revient à Nadine Mokdessi. Oui, c’est bien elle la dynamique metteur en scène dont la pièce Un vrai bonheur démarre incessamment au théâtre Monnot. N’en doutez pas, musique et théâtre font un excellent ménage. Et généreuse comme à son habitude (on sait combien son soutien aux œuvres caritatives et humanitaires est efficace), Nadine Mokdessi, ivre déjà de musique, offre en toute amitié et complicité artistique, « son » champagne à Zad Moultaka tenant sagement en bord de scène une bouteille de vin offerte, selon la bonne tradition, par le Festival d’al-Bustan. Edgar DAVIDIAN
Un concert formidable pour un public formidable ! Avec Zad Moultaka qui ne fait jamais rien comme personne, la surprise était de taille à l’auditorium Émile Boustany (Beit-Méry) où ont résonné au clavier des airs de Mozart, de Haydn et du compositeur de Zarani, avec, en prime, attribution et distribution de prix. Non, on ne radote pas, on ne confond pas les plans et ce n’était pas une...