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Actualités - OPINION

Démocratie où es-tu ?

Les principales factions maronites viennent de se mettre d’accord, avec la bénédiction du patriarche, sur la nomination d’un remplaçant au député de Baabda-Aley, Edmond Naïm, décédé. Il paraît que cela représente une grande victoire pour la démocratie libanaise puisqu’il nous permet d’éviter une bataille électorale. Si l’idéal démocratique avait été d’éviter toute campagne électorale pour pourvoir les sièges parlementaires, alors il faudrait remplacer les élections par des « caucus » à l’américaine. Cela permettra à l’intelligentsia politique qui est directement concernée de nommer par consensus les représentants respectifs de chaque communauté. Dans ces conditions, le suffrage universel, qui est en principe la pierre angulaire du système démocratique, sera considéré comme dépassé. Au lieu de laisser au peuple le soin d’élire ses représentants, c’est l’élite politique qui, agissant comme une vraie oligarchie, décidera dans le plus grand mépris du peuple. Mais il n’est pas question de me montrer plus démocrate que les représentants de l’oligarchie et de m’attacher à des principes purement abstraits. Ce qui m’intéresse dans le cas particulier dont je parle, c’est ce qu’il révèle de positif plutôt que ce qu’il révèle de négatif. Ceux qui ont vraiment voix au chapitre dans le choix d’un représentant de la communauté maronite, ce sont les maronites eux-mêmes. Sous ce rapport, la nomination par consensus entre maronites est bien plus logique que des élections où des non-maronites participent au choix d’un maronite. Quand je parle de « logique », je me situe, bien entendu, dans la logique du système communautaire, qui est jusqu’à nouvel ordre le système constitutionnellement reconnu au Liban et qui consiste à répartir les sièges parlementaires sur une base communautaire. Cela veut dire que nous sommes représentés au Parlement en tant que communautés et non pas en tant que citoyens à l’état pur. Chez nous, les communautés sont des corps intermédiaires entre les citoyens et l’État. Elles remplissent des fonctions incontournables dans des domaines bien précis, notamment dans celui du droit relatif au statut personnel et dans celui de la représentation politique au niveau parlementaire. Il est vrai que l’article 27 de la Constitution déclare que le député représente la nation tout entière. Ce qui est sous-entendu ici, c’est qu’il ne représente ni sa communauté ni sa région géographique. Cet article remonte à 1926. Il adopte une idéologie bien intentionnée mais boiteuse que nous avons importée de l’étranger sans aucun sens critique. En effet, la logique la plus élémentaire nous engage à ne pas confondre la notion de représentation et la notion de fonction ou charge. L’ambassadeur du Liban à l’ONU représente le Liban et non pas le monde tout entier. C’est l’ONU qui a une dimension mondiale. De la même manière, le député maronite de Bécharré représente les maronites de cette ville. La fonction qu’il remplit au Parlement, par contre, concerne les questions législatives de dimension nationale. Il serait donc bon de jeter à la poubelle l’article 27 de la Constitution. Cela est nécessaire si nous voulons passer de la confusion à la clarté. Méfions-nous des bonnes intentions, surtout quand elles se rapprochent dangereusement de la bêtise. Voilà, à mon avis, le point par lequel devrait commencer tout renouveau libanais dans le domaine des sciences politiques. Mon but n’est pas d’endoctriner, mais de provoquer la réflexion. La vérité, dit le proverbe, sort de la bouche des enfants. Il faut donc croire que nos dirigeants sont de grands enfants, quand il leur arrive de confirmer, sans s’en rendre compte, la thèse savante que je soutiens. Joseph CODSI Professeur à l’Université pour tous – USJ
Les principales factions maronites viennent de se mettre d’accord, avec la bénédiction du patriarche, sur la nomination d’un remplaçant au député de Baabda-Aley, Edmond Naïm, décédé. Il paraît que cela représente une grande victoire pour la démocratie libanaise puisqu’il nous permet d’éviter une bataille électorale. Si l’idéal démocratique avait été d’éviter toute...