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Actualités - OPINION

Nécessaire adaptation

Le temps semble avoir suspendu son vol autour d’Israël et de l’Autorité palestinienne. Toujours groggy quatre jours après la victoire écrasante du Hamas, le monde, de Gaza à Tel-Aviv en passant par Washington ou Paris, reprend lentement ses esprits alors que les stratégies élaborées par les différentes parties doivent être révisées et adaptées à la nouvelle donne. Le Hamas, d’abord, doit tirer les conséquences d’une victoire dont il n’avait vraisemblablement pas prévu l’ampleur. Propulsé aux commandes, le Mouvement de la résistance islamique doit désormais assumer « toutes ses responsabilités envers notre peuple dans tous les domaines, politique, sécuritaire, économique et national », comme l’a souligné le négociateur palestinien Saëb Erakat. Doté d’une expérience nulle en matière de gouvernance, le Hamas se voit donc contraint d’établir les grandes lignes d’une politique nationale et de satisfaire les aspirations colossales d’un peuple usé à force d’espérer, en vain, des jours meilleurs. Un électorat dont le Hamas doit bien comprendre qu’il a porté ses représentants au pouvoir sur un programme national politique et économique, et non par adhésion à une stratégie de résistance tenant du suicide collectif. Vis-à-vis de la communauté internationale, le Hamas doit également acquérir un minimum de crédibilité. L’un des moyens d’atteindre ce but étant, comme le prouvent les appels répétés en ce sens venant des quatre coins du monde, d’effacer de sa charte la mention faisant référence à l’éradication d’Israël. Si cette option semble difficilement envisageable aujourd’hui, il est bon de se souvenir que le Hamas n’a pas fait référence à cette mention lors de la campagne électorale, qu’il respecte globalement une trêve depuis plusieurs mois et que, à titre de référence, l’OLP de Yasser Arafat avait su revoir son discours destructeur vis-à-vis d’Israël lors des accords d’Oslo. De l’autre côté du miroir, le Fateh, après des décennies au pouvoir, doit faire face à la colère et à la déception de ses militants qui s’expriment violemment dans les rues de la bande de Gaza. Acculé, le Fateh serait bien avisé de profiter de son expulsion électorale dans l’opposition pour lancer les réformes internes qui, un temps seulement nécessaires, sont désormais indispensables à sa survie politique. Côté israélien, passé le choc immédiat, la tendance semble être à la retenue, prônée d’ailleurs par le ministre sans portefeuille Tsahi Hanegbi. À quelques mois des législatives israéliennes, les différents responsables politiques ne peuvent réellement se permettre une escalade. Sur la scène internationale, il est grand temps de tirer les leçons de cette stratégie bancale visant à multiplier les appels retentissants à la démocratie au Grand Moyen-Orient, tout en continuant de soutenir à bout de bras et à grand renfort de dollars des régimes corrompus. Un processus qui, ironie du sort, favorise la montée en puissance, par les urnes, de mouvements précisément peu friands de valeurs démocratiques. L’on s’interroge également sur la politique à mener en matière d’aide financière à l’Autorité palestinienne. Couper les vannes pour cause d’« islamisation terroriste » du pouvoir serait assurément contre-productif. Outre le fait que ceci plongerait une population occupée dans un désarroi accru, cette stratégie inciterait en outre le Hamas à frapper plus fort encore aux portes de régimes ayant beaucoup moins de scrupules à soutenir le Mouvement de la résistance islamique… Ces questions, toutes plus sensibles les unes que les autres, seront abordées par les parties concernées dans les jours, semaines et mois à venir. Reste une certitude : ces élections auront rappelé à ceux qui voulaient l’oublier qu’Israël et la Palestine sont bien le cœur palpitant de cette région tourmentée. À ce titre, la victoire des islamistes du Hamas et leur capacité ou non à transformer l’essai à l’épreuve du pouvoir promettent d’avoir des conséquences dont il est impossible aujourd’hui de déterminer l’ampleur. Émilie SUEUR
Le temps semble avoir suspendu son vol autour d’Israël et de l’Autorité palestinienne. Toujours groggy quatre jours après la victoire écrasante du Hamas, le monde, de Gaza à Tel-Aviv en passant par Washington ou Paris, reprend lentement ses esprits alors que les stratégies élaborées par les différentes parties doivent être révisées et adaptées à la nouvelle donne.
Le Hamas,...