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Actualités - CHRONOLOGIE

ÉDITION - « The Beirut Spring », édité par Ghassan Tuéni et Eli Khoury Chronologie (superbement) illustrée d’une année historique

Elles sont belles, belles à pleurer, les photographies réunies entre deux couvertures rouge sang de «The Beirut Spring, Independence» 05. Publié par Dar an-Nahar et Quantum Communications, il est dédié à Samir Kassir, à Gebran Tuéni et aux autres martyrs libanais. On l’a appelée «place des Martyrs» pour les martyrs qui y ont été pendus par Jamal Bacha le 6 mai 1916. Neuf décades plus tard, on l’a appelée «place de la Liberté», pour le million de Libanais qui s’y sont rassemblés, unis par un même rêve de souveraineté, un même désir d’indépendance. En guise de prologue – «Ceci n’est pas un substitut de préface», prévient-il – le patriarche Ghassan Tuéni commente la première photo de l’ouvrage. Un cliché en noir et blanc moutonneux dont il fait «la description existentielle et historique». L’image montre des soldats ottomans posant avec fierté et arrogance (à en juger par l’expression des visages) devant les cadavres pendus de martyrs libanais sur la place qui porte leur nom. Tirée de la collection de Michel Fani, auteur d’Une histoire de la photographie au Liban, cette photo n’a jamais été publiée au Liban. «Hier comme aujourd’hui, la révolte des intellectuels pour l’indépendance a été scellée et imbibée de sang. Les cibles, hier comme aujourd’hui, sont des hommes de lettres, des écrivains, des intellectuels , des leaders de l’opinion publique. En 1915, les journalistes Mahmoud Mahmasani, Abel Karim el-Khalil, Gergi Haddad et Petro Paoli ont été pendus pour avoir osé mettre en doute la suppression des libertés». «Quatre-vingt-dix ans plus tard, ajoute Tuéni, le journaliste Samir Kassir est assassiné pour faire taire le clairon qui appelle inlassablement à la liberté au Liban comme dans les pays arabes. Six mois plus tard, on a réservé à Gebran Tuéni, collègue de Samir et député de Beyrouth – également mon fils – le même sort terrible…» Et de poursuivre: «Les Ottomans pensaient écrire, avec ces actes-là, l’épilogue du mouvement d’indépendance. C’était en fait le prologue d’un mouvement qui a culminé, phase après phase, pour se matérialiser un certain 14 mars 2005 lorsque plus d’un million de Libanais ont scandé les mêmes idéaux que ceux qui ont été lancés, jadis, sur le chemin de la potence.» Voilà, le ton est donné. L’ouvrage suit son chemin et présente ensuite, de manière chronologique, les événements qui se sont succédé depuis l’adoption, par le Conseil de sécurité de l’ONU, de la résolution 1559. D’abord l’attentat contre Marwan Hamadé, «la déclaration de guerre». Viennent ensuite des successions de dates et d’événements, cités en bref, énumérant les faits majeurs de la période préassassinat de Hariri. Puis c’est le cataclysme du 14 février, l’épais champignon de fumée noire, la vision apocalyptique noyée de cendres, le regard hagard et les larmes d’impuissances des secouristes, les corps déchiquetés. Puis les caveaux creusés, les funérailles populaires, le recueillement sur le «darih». La douleur se transforme en rage. Rage de vivre, rage de liberté. Cette rage prend forme le 14 mars, lors de la grande manifestation surnommée «Intifada de l’indépendance». Le drapeau libanais est roi. Brandi comme une arme, il se décline sous toutes les coutures. En bandeau sur la tête, en cape nouée autour du cou, il devient chapeau, tatouage et même coiffure. Le foulard rouge et blanc, symbole de la intifada, le ruban bleu, les «pin’s»… C’est le printemps de Beyrouth. Les journaux du monde titrent sur l’événement en une. La presse libanaise et internationale (de larges extraits sont reproduits ici) . L’événement, les troupes syriennes se retirent du pays. Et la série noire continue. Les attentats se succèdent. Samir Kassir et Gebran Tuéni. Un même combat, un même sort. «Mais ils ne se tairont jamais, le Nahar poursuit sa bataille.» Après chaque attentat, des scènes devenues funestement familières. La douleur des familles (particulièrement émouvante, Yasma Fleyhane enlaçant son fils), les veillées aux chandelles, les portraits des martyrs, les «pin’s» à l’effigie du disparu… Voilà presqu’un an que le chaud et le froid soufflent sur le pays. Presqu’un an que le Liban est ballotté entre «printemps» prometteur, «été» «hot» (ement) meurtrier, «automne» menaçant et «hiver» morose. L’album que voilà en résume un grand chapitre, celui consacré à la révolution rouge et blanche. Rouge pour le sang et blanche pour l’espoir. Un espoir que les enfants de la révolution – (ceux-là qui œuvraient en silence, dont les portraits sont publiés ici sous le label «private faces») mais aussi les autres, tous ceux qui ont rêvé d’un Liban meilleur – refusent de laisser tomber. Double format À signaler que cet ouvrage est disponible en deux formats. Le premier, couverture souple, est accompagné d’un CD-Rom contenant une vidéo des manifestations du 14 mars. Il existe également en édition de luxe, dans un coffret contenant la panoplie du parfait manifestant: un drapeau, une écharpe rouge et blanche et des «pin’s». Maya GHANDOUR HERT

Elles sont belles, belles à pleurer, les photographies réunies entre deux couvertures rouge sang de «The Beirut Spring, Independence» 05. Publié par Dar an-Nahar et Quantum Communications, il est dédié à Samir Kassir, à Gebran Tuéni et aux autres martyrs libanais.

On l’a appelée «place des Martyrs» pour les martyrs qui y ont été pendus par Jamal Bacha le 6 mai 1916. Neuf...