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Actualités - OPINION

2006 sera l’année de l’alliance des civilisations

Par Adnan NASRAWIN* Deux initiatives internationales de haut niveau ont été entreprises à la fin de l’année 2005 pour reconstruire une logique de dialogue et d’alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman, et pour faire face au terrorisme et à l’extrémisme dans le monde. La première de ces initiatives était la proposition qu’avait lancée le président du gouvernement espagnol, Jose Luis Rodriguez Zapatero, devant l’Assemblée générale de l’ONU et qui a été adoptée officiellement comme initiative internationale de l’ONU le 14 juillet 2005. Le but de cette proposition était de promouvoir une alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman, dans le but de faire mentir la pseudo-prophétie de Samuel Huntington selon laquelle le choc des civilisations serait inévitable entre les deux parties. M. Zapatero a placé son initiative dans le cadre du rôle qu’a joué son pays, l’Espagne, comme terre de coexistence pendant huit siècles entre les trois religions monothéistes chrétienne, musulmane et juive ; ce qui lui donne un rôle important pour convaincre aujourd’hui les parties intéressées de l’Occident et du monde arabo-musulman pour travailler à cette alliance. Cette initiative du président du gouvernement espagnol pour une alliance des civilisations répondait aux inquiétudes exprimées à maintes reprises depuis le 11 septembre 2001 par des chefs d’État et des dirigeants de l’Occident et du monde arabo-musulman de voir ériger un mur de haine et d’incompréhension entre les deux parties avec des conséquences incontrôlables. Cette inquiétude a été exprimée du côté occidental par le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi, qui avait déclaré à ce propos : « Il serait terrible si un conflit éclatait entre l’islam et l’Occident, entre nous et 1,2 milliard de musulmans. Ce serait vraiment une catastrophe. » Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, avait coparrainé cette proposition du président du gouvernement espagnol en affirmant dans une déclaration au journal français Le Monde du 14 octobre 2005 : « La raison la plus importante pour laquelle nous voulons devenir membre de l’Union européenne est d’aider pour réussir une alliance des civilisations. » Le secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, a adopté officiellement cette proposition d’alliance des civilisations le 14 juillet 2005, qui est devenue depuis une initiative mondiale sous l’égide des Nations unies, ce qui lui a donné un caractère international, multilatéral, de dimension globale et loin de toute interprétation hégémonique. Pour montrer que cette alliance des civilisations avait un caractère international, le secrétaire général de l’ONU a nommé, le 2 septembre 2005, un groupe international de haut niveau composé de 19 personnalités du monde entier, coprésidé par M. Federico Mayor, ancien directeur général de l’Unesco, connu mondialement pour son rôle pionnier dans la diffusion de la culture de la paix et la solidarité internationale dans le monde, et M. Mehmet Eyadin, ministre dans le gouvernement turc et professeur de théologie dans son pays. Ce groupe de haut niveau comprend entre autres l’ancien président iranien Mohammed Khatami, cheikha Mozah, épouse de l’émir de Qatar, M. Mustapha Niasse, ancien Premier ministre du Sénégal, envoyé spécial de l’ONU en RDC et au Togo, M. André Azoulay, conseiller spécial du roi du Maroc Mohammed VI, l’archevêque Desmond Tutu d’Afrique du Sud, prix Nobel de la paix, Mr Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères français, et le Dr Ismaïl Seragueddine, président de la Bibliothèque d’Alexandrie. Ce haut comité a été chargé par le secrétaire général de l’ONU de faire un rapport à la fin de 2006 avec ses propositions concrètes pour promouvoir l’alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman. Il tiendra quatre réunions avant de remettre son rapport à M. Annan. La première réunion de ce groupe de haut niveau a eu lieu du 27 au 29 novembre 2005, à Palma de Majorque, en présence du président du gouvernement espagnol et du Premier ministre turc. À cette occasion, M. Zapatero avait déclaré : « Les rivalités d’autrefois entre empires turc et chrétiens se sont transformées en association positive, et nous devons tarir les sources de l’extrémisme et mettre fin aux malentendus. » De son côté, M. Erdogan a confirmé que ce groupe de haut niveau aidera « à promouvoir l’alliance des civilisations entre les pays musulmans et non musulmans », affirmant qu’« il s’investira personnellement dans le projet ». La deuxième réunion du Comité de haut niveau aura lieu à Doha (Qatar) à la fin de février 2006. Il est à noter que ce comité a eu le soutien de chefs d’État européens et arabes ; le président français Jacques Chirac a déclaré à ce propos que l’alliance des civilisations « est une urgence de notre temps ». La deuxième initiative internationale qui a suivi les travaux de la première réunion du comité, à Palma de Majorque, et qui donne à espérer que l’année 2006 sera l’année de dialogue et d’alliance entre les civilisations est venue du sommet extraordinaire qui a réuni 57 chefs d’État et de gouvernement des États membres de l’Organisation de la conférence islamique, à La Mecque, en Arabie saoudite, à l’invitation du roi Abdallah, les 7 et 8 décembre 2005. Dans une déclaration appelée « Déclaration de La Mecque », les chefs d’État et de gouvernement musulmans ont affirmé leur engagement collectif à réfuter les risques d’un choc des civilisations et à manifester leur volonté ferme de promouvoir le dialogue et la coopération entre la civilisation musulmane et la civilisation universelle. Cette Déclaration de La Mecque affirme à ce propos : « La civilisation islamique fait partie intégrante de la civilisation universelle ; elle repose sur les valeurs de dialogue, de modération, d’équité, de justice, de bienfaisance publique et de tolérance qui sont considérées comme des idéaux supérieurs à tout le genre humain et se trouvent aux antipodes du fanatisme, du repli sur soi, de l’intolérance, de l’hégémonisme et de l’exclusion. » Les chefs d’État et de gouvernement musulmans ont affirmé à travers la Déclaration de La Mecque leur volonté d’ouvrir le dialogue entre la civilisation islamique et la civilisation universelle, y compris bien sûr la civilisation occidentale, ce qui laisse croire leur volonté ferme de coopérer avec le Comité de haut niveau pour promouvoir une alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman. Cette Déclaration de La Mecque affirme à ce propos : « Il importe tant d’approfondir toutes ces notions (de dialogue, de modération, de justice et de tolérance…) dans notre discours islamique tourné tant vers l’intérieur que vers l’extérieur. » Les chefs d’État et de gouvernement musulmans ont affirmé que le terrorisme « n’est nullement l’apanage d’une religion (...), qu’il ne peut y avoir aucune justification ou aucune motivation au terrorisme sous toutes ses formes ou manifestations ». Ainsi le Comité international de haut niveau de l’ONU pour l’alliance des civilisations et la Déclaration de La Mecque au nom de 57 chefs d’État et de gouvernement des pays musulmans ouvrent la porte aux espoirs que l’année 2006 sera l’année de l’amorce d’une alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman pour promouvoir la paix et la compréhension entre les deux parties. * Conseiller auprès du Comité international de haut niveau sur l’alliance des civilisations.
Par Adnan NASRAWIN*

Deux initiatives internationales de haut niveau ont été entreprises à la fin de l’année 2005 pour reconstruire une logique de dialogue et d’alliance des civilisations entre l’Occident et le monde arabo-musulman, et pour faire face au terrorisme et à l’extrémisme dans le monde.
La première de ces initiatives était la proposition qu’avait lancée le...