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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - Jusqu’au 3 février, à la galerie Janine Rubeiz Les images du Caire de Chant Avedissian, un manifeste politique teinté d’histoire

En 2000, il a mis un point final à sa production artistique, «pour, dit-il, céder la place à la génération montante» et parce qu’il se sentait «las». Chant Avedissian, artiste égypto-arménien, aux œuvres figurant en bonne place dans plusieurs musées et collections publiques (The British Museum, National Museum of Scotland, la Banque mondiale et la Smithonian Institution à Washington, l’Institut du monde arabe à Paris….), est, comme tous les grands sensibles, révolté par l’état actuel du monde. «Fatigué de toutes ces guerres traversées en cinquante-cinq ans d’existence», chagriné par l’injustice, le sexisme, la barbarie qui règnent sur toute la planète, notamment en Irak, il a tiré sa révérence, ne se sentant plus capable «de continuer à peindre comme si de rien n’était». Mais s’il a déposé les armes, Chant Avedissian n’en continue pas moins à intéresser les amateurs, les collectionneurs et les éditeurs d’art. À l’occasion d’une publication récente consacrée à ses images du Caire (Chant Avedissian. Cairo Stencils, éditions Saqi), la galerie Janine Rubeiz (Raouché, immeuble Majdalani) expose, jusqu’au 3 février, une trentaine de ses œuvres (surimpression d’images sur fonds traités au pochoir) traitant bien évidemment de son thème de prédilection: les icônes de la culture populaire cairote. Pour ce natif du Caire, tous les chemins artistiques mènent à la célébration d’une culture populaire de l’Égypte moderne: spécifique, bigarrée, mélange de glamour et de révolution, de patrimoine et de politique… Et surtout dominée par le pouvoir de l’image. Mélangeant allègrement dans ses mixed-médias les procédés «occidentaux» (acquis lors de ses études de beaux-arts à Montréal – 1970-73 – et d’impression à l’École nationale supérieure des arts décoratifs à Paris –1974-76) et les motifs et influences pharaoniques, ottomanes, géométriques islamiques et japonisantes, Avedissian élabore des tableaux hauts en couleurs, représentant tout ce qui peut figurer au Panthéon de l’Égypte des années cinquante et soixante. Des divas et vedettes de l’âge d’or de la chanson et du cinéma égyptiens, aux figures politiques marquantes, en passant par les images de propagande sociale véhiculées par les médias de l’ère nationaliste, le visiteur de l’exposition plonge dans un univers restituant, à la fois, la nostalgie et l’énergie du Caire cosmopolite des années cinquante. De Asmahan à Dalida Des années qui auront vu éclore des changements politiques et sociaux déterminants. Celui de l’impact des médias sur les foules n’étant pas des moindres. Un impact qui commence par l’idolâtrie de «toutes ces artistes féminines qui ont porté la révolution sur leurs épaules. Leyla Mrad, Samia Gamal, Faten Hamama qui, dans ses derniers films, a beaucoup milité pour les droits de la femme et, bien entendu, la grande militante qu’était Oum Kalsoum», signale le peintre. Lequel représente, d’ailleurs, l’Astre de l’Orient aussi bien en chanteuse devant son auditoire, qu’en symbole de la combattante égyptienne. À noter que dans la série intitulée Divas, Feyrouz, Sabah, Dalida côtoient les Égyptiennes «pures et dures» comme Hind Rostom ou Asmahan, ainsi que les légendaires Farid al-Atrache et Abdel Halim Hafez. Bien entendu, dans le registre des icônes politiques, allant du roi Farouk à Anouar al-Sadate, Abdel-Nasser tient une place à part. D’autant que son ombre se perçoit dans les compositions tirées de la vie quotidienne à cette époque, à l’instar d’une Ève votant ou d’une représentation de la famille moderne réunie autour du poste radio, le fameux transistor qui diffusait les discours du «raïs»! Divisé en trois volets, portraits de vedettes, de politiques et scènes de la vie en société, l’accrochage offre ainsi une sorte de regard historique teinté de fantaisie sur la grande période de l’Égypte moderne. «Tout devient politisé, même l’art», regrette Avedissian. Qui signe pourtant à travers ces images un manifeste politique. À découvrir. Zéna ZALZAL
En 2000, il a mis un point final à sa production artistique, «pour, dit-il, céder la place à la génération montante» et parce qu’il se sentait «las». Chant Avedissian, artiste égypto-arménien, aux œuvres figurant en bonne place dans plusieurs musées et collections publiques (The British Museum, National Museum of Scotland, la Banque mondiale et la Smithonian Institution...