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Histoire - Projet d’exécution sommaire de Hitler, animosité à l’égard de De Gaulle et volonté de laisser Gandhi mourir de faim Winston Churchill se révèle sous un jour nouveau et peu reluisant

Winston Churchill, Premier ministre britannique de 1940 à 1945 puis de 1951 à 1954, considéré comme un héros en Grande-Bretagne et l’un des architectes de la victoire des Alliés sur l’Axe pendant la Seconde Guerre mondiale, se révèle sous un jour nouveau et peu reluisant dans des archives britanniques rendues publiques dimanche. Selon des notes prises par le secrétaire-adjoint du cabinet, Sir Norman Brook, lors d’une réunion du cabinet britannique en décembre 1942, M. Churchill envisageait d’exécuter le Führer allemand Adolf Hitler sur la chaise électrique, sans procès, et d’exécuter sommairement les dirigeants nazis une fois qu’ils seraient capturés. « Réfléchissez que si Hitler tombe entre nos mains, nous le mettrons très certainement à mort », déclarait M. Churchill. La pendaison était le moyen utilisé en Grande-Bretagne pour la peine capitale, mais M. Churchill semblait préférer la chaise électrique, envisageant même, peut-être avec ironie, d’en importer une des États-Unis. « L’instrument, la chaise électrique, pour des gangsters, on peut sans doute l’obtenir dans le cadre du Lease Lend », l’accord par lequel les Américains livraient des armes aux Britanniques, avait dit M. Churchill. En avril 1945, la fin de la guerre approchant, le cabinet britannique se penchait sur la question de savoir si Hitler et les principaux dirigeants nazis devaient être jugés ou exécutés sans procès. « Je suis d’accord qu’un procès serait une farce », estimait M. Churchill. « Toutes sortes de complications apparaissent dès que vous admettez un procès équitable », ajoutait-il, estimant toutefois qu’il fallait trouver un accord sur ce point avec les Alliés. Il faut « exécuter les principaux criminels comme des hors-la-loi, si aucun allié ne les veut », disait-il encore. Il apparaît rapidement que les Américains, comme les Soviétiques, veulent que les dirigeants nazis soient jugés. Vaincu militairement, Hitler s’est suicidé le 30 avril 1945 dans son bunker à Berlin, avec sa maîtresse Eva Braun et une dizaine de ses compagnons. Une vingtaine de dirigeants nazis ont été jugés entre novembre 1945 et octobre 1946 pour crimes contre l’humanité à Nuremberg, en Allemagne. En outre, l’animosité de M. Churchill à l’égard du général de Gaulle, considéré comme un homme d’une « ambition insensée », apparaît clairement dans ces documents. Alors que les Britanniques lui avaient refusé l’autorisation d’aller en mars 1943 rendre visite aux Forces françaises libres, Charles de Gaulle, qui avait trouvé refuge en Angleterre en 1940 après l’invasion allemande, s’était plaint d’être traité en prisonnier de guerre. La réponse de Winston Churchill avait été qu’il fallait dire « franchement » au chef de la Résistance française de faire ce qu’on lui demandait. « Et l’arrêter s’il cherche à partir, par exemple sur un destroyer français. Des mesures de sécurité doivent être prises pour l’en empêcher », indiquent les notes prises par Sir Norman Brook. La visite de De Gaulle risquait, selon les Anglais, de gêner les négociations en cours entre les États-Unis et le général Giraud, préféré des Américains. En revanche, le chef des travaillistes, le futur Premier ministre Clement Attlee, avait recommandé la prudence : « Ne mettez pas tous vos espoirs sur (Giraud) comme s’il était très bien. Rappelez-vous que le nom de De Gaulle est associé en France à l’esprit de Résistance, l’homme qui n’a jamais renoncé, etc. Les vues des États-Unis ne sont pas fiables, ils ne connaissent rien à la France. » En 1945, M. Churchill affirmait qu’il n’y avait « aucun espoir de relations de confiance avec la France tant que nous ne serons pas débarrassés de De Gaulle ». Or de Gaulle entrait cette année-là à Paris en libérateur et prenait la tête du gouvernement provisoire. Plus tard, élu chef de l’État, il allait opposer par deux fois son veto à la candidature de la Grande-Bretagne au Marché commun. S’il se méfiait de De Gaulle, M. Churchill avait une bonne opinion de Staline, révèlent ces archives. Après une rencontre avec le dirigeant soviétique à Moscou, il donne son avis au cabinet en août 1942 : « Un grand homme, d’une grande sagacité », avait estimé Winston Churchill, encore considéré comme le plus important Britannique de tous les temps, selon une grande enquête de la BBC réalisée en 2002. Par ailleurs, M. Churchill a un moment envisagé de laisser mourir Gandhi si ce dernier faisait une grève de la faim alors qu’il était prisonnier des Britanniques durant la Seconde Guerre mondiale. Des documents datant de janvier 1943 montrent à quel point le Premier ministre britannique et son gouvernement étaient embarrassés par l’action du Mahatma, devenu une icône pour les masses indiennes encore sous la domination de la couronne britannique. Gandhi avait été placé en détention dans le palais de l’Aga Khan à Poona (État de Maharashtra) en août 1942, après avoir condamné l’engagement de l’Inde dans la lutte contre l’Allemagne nazie et appelé à la désobéissance civile. Mais M. Churchill et son gouvernement craignaient que celui qui est devenu le symbole de la lutte pacifique, et qui a mené l’Inde à l’indépendance en 1947, n’entame une grève de la faim en prison. Ils répugnaient par-dessus tout à accepter tout ce qui pouvait apparaître comme une victoire de leur adversaire, selon les notes de Sir Norman Brook. Le vice-roi des Indes, Lord Linlithgow, avait, dans ses messages à Londres, indiqué qu’il était « fermement favorable à laisser (Gandhi) mourir de faim ». Mais d’autres, comme Lord Halifax, ancien secrétaire au Foreign Office et ambassadeur aux États-Unis, avaient mis en garde le cabinet au lendemain de l’arrestation de Gandhi. « Quels que soient les inconvénients à le laisser sortir, sa mort en détention serait pire », avait-il écrit. Sir Stafford Cripps, ministre de la Production aéronautique, et qui n’était pas parvenu à un accord avec Gandhi pour que celui-ci soutienne la guerre contre l’Allemagne, était sur la même ligne. Le Mahatma « est une telle figure semi-religieuse que sa mort entre nos mains serait un grand coup et un grand embarras pour nous », indiquait-il au cabinet. Mais M. Churchill se disait prêt à laisser mourir Gandhi s’il entamait une telle action. « Je le garderai là-bas et le laisserai faire ce qu’il veut », déclarait le Premier ministre britannique. « Mais si vous le laissez sortir parce qu’il fait une grève (de la faim), alors laissez-le sortir maintenant », ajoutait-il, en insistant pour que toute décision apparaisse comme une victoire de son gouvernement. Les ministres ont finalement décidé que si Gandhi entamait une grève de la faim, ils étaient prêts à le libérer sur la base de principes humanitaires. Mais pour autant, cette libération ne devait pas apparaître comme une victoire du Mahatma, insistaient-ils. Le « cabinet est très ferme sur le principe d’une libération en cas de grève (de la faim) », écrit ainsi dans un style haché Sir Norman Brook dans ses notes, mais « préférerait libérer comme un geste de grâce car détenu 6 mois, et nous l’avons battu ». Gandhi n’a finalement été libéré qu’en 1944, alors que sa santé déclinait et que les autorités britanniques craignaient qu’il ne meure en prison. Le Mahatma est mort le 30 janvier 1948 à l’âge de 78 ans, l’année qui a suivi l’indépendance de l’Inde, assassiné par un brahmane fanatique. Datant de 1942 à 1945, ces documents conservés aux archives de Kew, dans l’ouest de Londres, sont les premières minutes détaillées de discussions des cabinets gouvernementaux britanniques à être publiées. Ils peuvent être consultés sur le site www.nationalarchives.gov.uk

Winston Churchill, Premier ministre britannique de 1940 à 1945 puis de 1951 à 1954, considéré comme un héros en Grande-Bretagne et l’un des architectes de la victoire des Alliés sur l’Axe pendant la Seconde Guerre mondiale, se révèle sous un jour nouveau et peu reluisant dans des archives britanniques rendues publiques dimanche.
Selon des notes prises par le secrétaire-adjoint du...