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URBANISME - L’élaboration d’une législation moderne pourra endiguer les dégâts Colloque juridique pour assurer la mise en œuvre du schéma directeur de l’aménagement du territoire

Le schéma directeur d’aménagement du territoire au Liban a déjà fait l’objet de plusieurs présentations dans nos colonnes. Ce schéma, qui a « un rôle réglementaire », n’entravera pas les initiatives privées. Il les canalisera au service de tous, et permettra un développement économique et une gestion de l’espace durable. Pour empêcher toute spéculation au niveau du terrain et endiguer la dégradation galopante du paysage, l’espace sera organisé en zones agricoles, industrielles ou touristiques. Cette stratégie a pour but de protéger les cultures, de préserver les parcs archéologiques et leurs abords, de valoriser les richesses naturelles et de programmer, à long et moyen terme, l’ensemble des installations économiques ou techniques du pays (infrastructures routières, portuaires, téléphone, électricité, réseau de distribution des eaux, etc). En ce qui concerne les pratiques illégales qui se manifestent avec éclat dans le domaine public maritime, devenu privatisé sur de très larges portions, le schéma prévoit le démantèlement des installations illégales du domaine public maritime et le libre accès du public à ce domaine. Mais aussi un ensemble de mesures qui doivent converger pour redonner au pays une façade maritime agréable et attractive. Toutefois, il est impossible d’atteindre les objectifs fixés dans le schéma d’aménagement si on ne se dote pas des outils nécessaires à son application. Aussi, un colloque juridique portant sur la législation du littoral, de la montagne et des zones naturelles se tient depuis hier à l’hôtel Radisson, Aïn el-Mreisseh. Durant trois jours, les experts vont exposer, d’une part « les principaux projets de réglementation en cours d’étude, dans un essai de coordination entre les différentes administrations compétentes, et d’autre part l’évaluation de la pratique des normes à l’épreuve des institutions et des faits », a indiqué Me Raphaël Sfeir, avocat au barreau de Beyrouth et spécialiste du droit libanais de l’environnement, qui a fait le point de la situation avec une revue des textes en cours et des projets à l’étude. Un instrument décisif Organisé par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), en collaboration avec l’IPP (Planification des investissements publics, programme financé par l’Union européenne), le colloque a pour objectif de « préparer la législation de demain pour que le Liban puisse se doter d’outils, et assurer une meilleure gestion de son environnement, de son urbanisation et de ses ressources », a souligné Jean-Luc Klein, team leader du IPP MSC-CDR. Étaient présents à la séance inaugurale MM. Yaacoub Sarraf, al-Fadl Chalak et Joseph Abdel Ahad, respectivement ministre de l’Environnement, président du CDR et directeur général de l’urbanisme, ainsi qu’un grand nombre de spécialistes urbanistes et juristes. Soulignant l’importance de ce schéma directeur dans « un pays rebelle à toute planification », où le chaos s’est installé dans tous les domaines, rognant sur l’environnement et le paysage, al-Fadl Chalak a rappelé que « le projet est axé principalement sur le développement équilibré des régions, et l’exploitation optimale et durable des ressources ». S’annonçant d’emblée contre toute politique de privatisation, le président du CDR a révélé que deux milliards de dollars constituant le fonds de ses caisses permettraient au CDR de « programmer des investissements publics ». Lançant un appel pour « prêter main forte à ce projet pour lequel nous devons tous œuvrer », le ministre de l’Environnement a souligné que l’adoption du schéma directeur d’aménagement du territoire est une « urgence » et un « instrument décisif » pour une politique de sauvegarde. « On a accusé l’Administration de négligence. En réalité, on l’a empêchée d’agir », a déclaré pour sa part le directeur général de l’urbanisme. Joseph Abdel Ahad, qui célébrait hier sa dernière journée de fonction publique, a insisté sur l’application d’une « législation moderne, permettant de supprimer les infractions et non de les régulariser ». Mettant en exergue les « concepts erronés » de la propriété foncière, les exceptions aux règles générales introduites par le législateur pour augmenter le coefficient d’exploitation et les infractions sur les domaines maritimes publics, Abdel Ahad a rappelé qu’au terme de 40 ans d’efforts, les plans d’urbanisme établis par l’État ne couvrent que 10 % du territoire. Les 90 % autres sont régis par l’article 17 de la loi de construction fondée sur le principe de la « constructibilité généralisée ». C’est-à-dire que tout terrain est constructible, qu’il soit agricole, forestier, qu’il soit en zone inondable, sur le littoral ou à 2 000 mètres d’altitude. Une prise de conscience Pourquoi en est-on arrivé là ? Après la présentation d’un bilan juridique comprenant une revue de textes et une évaluation de l’application des normes, Me Raphaël Sfeir explique : « La fraude et la corruption se sont transformées en mode de gestion des affaires publiques (…) D’une manière hypocrite, les textes prévoient des accommodements (avec la règle), ou des régimes dérogatoires et d’exception aux principes énoncés par les mêmes textes, ou encore quand les règles ne peuvent pas être appliquées, ce n’est pas le projet qui doit être revu, c’est le texte qui cesse d’être mis en application. Lorsqu’une opposition locale s’élève contre un projet autorisé contrairement aux normes en vigueur et portant atteinte à un espace à protéger, c’est la loi qui est contournée en modifiant les textes par étapes (…) Mais il ne suffit pas de stigmatiser ces faits. Notre colloque vise à contribuer à une prise de conscience, à œuvrer pour remédier à cet état de choses par une législation adéquate. » Les experts poursuivront leurs travaux aujourd’hui et présenteront leurs recommandations demain, jeudi. Rappelons pour conclure que le CDR, en collaboration avec la Direction générale de l’urbanisme (DGU), avait confié l’étude du schéma directeur de l’aménagement du territoire à Dar al-Handassa-Chaer, la société française Iaurif (Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région Île-de-France) et à divers organismes libanais, parmi lesquels le Centre national de télédétection du CNRS, le Consulting and Research Institute, l’AAA, l’Urbit et l’Ecodit. May MAKAREM
Le schéma directeur d’aménagement du territoire au Liban a déjà fait l’objet de plusieurs présentations dans nos colonnes.
Ce schéma, qui a « un rôle réglementaire », n’entravera pas les initiatives privées. Il les canalisera au service de tous, et permettra un développement économique et une gestion de l’espace durable. Pour empêcher toute spéculation au niveau du...