Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

FINANCES - Entretien avec le ministre Jihad Azour « Le redressement doit débuter en 2006 »

Dans un entretien accordé à «L’Orient-Le Jour», le ministre des Finances, Jihad Azour, affirme que la situation financière et budgétaire est stabilisée d’ici à la fin de l’année. Quant à 2006, elle devra être la première année de mise en application d’un plan à moyen terme de redressement non seulement financier, mais également économique et social, dit-il. Le ralentissement économique va-t-il conduire à un dérapage de la situation budgétaire en 2005 ? Non. J’ai veillé à une meilleure maîtrise des finances publiques, surtout en ce qui concerne le solde primaire (NDLR : opérations hors service de la dette). Du côté des recettes, le ministère s’assure que toutes les recettes dues sont collectées à temps. J’espère que la dernière partie de l’année permettra de compenser un peu le manque à gagner des premiers mois. Mais on a d’ores et déjà enregistré des progrès grâce à l’amélioration de la collecte de l’impôt sur le revenu qui est de 130 %. Par ailleurs, la taxe sur les taux d’intérêt est désormais une source de revenus substantielle, puisqu’elle représente 1,5 fois l’impôt sur les salaires. Elle est devenue le deuxième impôt sur le revenu après l’impôt sur les sociétés, et rapporte plus de 300 milliards de livres. Quant aux dépenses courantes, elles ont été réparties selon une procédure standard de façon à les programmer régulièrement d’ici à la fin de l’année. La priorité est donnée aux factures régulières, les autres étant étalées dans le temps, sachant que les dépenses à caractère social ont également la préséance. Enfin les dépenses d’investissement ont été réduites au maximum. Dans son dernier rapport sur le Liban, la Banque mondiale recommande d’éviter l’accumulation des arriérés, allez-vous y parvenir cette année ? Pour éviter d’accumuler des arriérés, il faut réduire les reports de crédits d’une année sur l’autre. Le ministre Élias Saba a commencé à le faire, mais il va falloir formaliser l’interdiction à travers un amendement de la loi sur la comptabilité publique. Cette année, une bonne partie des arriérés sont en voie de règlement : ceux dus aux expropriés ont fait l’objet d’un décret, ceux dus aux hôpitaux sont en cours de paiement, ainsi que ceux dus aux municipalités. En ce qui concerne la CNSS, le Trésor a versé 240 milliards de livres au titre de sa dette pour les années précédentes et 290 milliards pour cette année. Le problème n’est certes pas résolu pour autant, mais il y a encore des divergences à propos de la valeur de ces arriérés. Quel sera l’impact en 2005 de la hausse du pétrole sur le budget, que ce soit à travers les transferts à EDL ou la subvention du prix de l’essence ? Les transferts à EDL représenteront entre 1 100 et 1 200 milliards de livres cette année. Quant à l’impact de la subvention des prix de l’essence, il sera de 350 à 400 milliards de livres : au lieu de percevoir 13 000 livres pour chaque 20 litres d’essence vendus, le Trésor ne perçoit plus que 700 livres. Quelle est votre estimation pour le déficit global en 2005 ? Le déficit global ne devrait pas se creuser cette année, notamment grâce à une baisse de 300 à 400 milliards de livres du service de la dette. Nous devrions dégager un excédent primaire de 2,5 % du PIB. Quant à la dette, elle devrait augmenter de 2,3 %. Les besoins de financement sont assurés en devises d’ici à la fin de l’année et, en livres, ils sont pratiquement couverts jusqu’en décembre. Nous disposons d’un bon niveau de liquidités pendant trois mois minimum, ce qui permet d’éviter toute répercussion sur les taux d’un quelconque phénomène extérieur d’une part et d’éviter de devoir recourir à un financement de la Banque centrale comme en début année, d’autre part. Si la situation est stabilisée d’ici à la fin de l’année, qu’en est-il pour 2006 ? Sommes-nous dans la même situation alarmante qui avait précédé la tenue de la conférence de Paris II en novembre 2002 ? La situation des finances publiques est meilleure qu’en 2002, à la fois grâce à l’amélioration de la gestion budgétaire et à un climat plus favorable qui permet à l’État de se financer plus facilement. Malgré le déficit de la balance des paiements, qui est d’ailleurs en voie de résorption, la situation des liquidités est bonne et l’économie n’aura pas de besoin de financement net en 2005. Nous ne subissons pas davantage de pressions sur le marché des changes, ni de baisse de réserves en devises de la BDL. Le Liban n’a donc pas besoin d’une aide financière urgente de la part de la communauté internationale ? La grande différence avec la situation qui a précédé Paris II, c’est qu’aujourd’hui il n’y a pas d’urgence. Les besoins de financement pour 2006 seront en partie assurés grâce à une opération de swap dans les prochains mois. Et nous sommes en mesure d’orienter la conférence internationale vers la programmation de réformes structurelles. Les réformes commenceront-elles avec le budget 2006 ? Oui, l’objectif l’année prochaine est d’augmenter substantiellement l’excédent primaire. Le détail des mesures n’est pas encore finalisé, mais 2006 doit être la première année d’un programme à moyen terme de redressement non seulement financier, mais également économique et social. Le gouvernement travaille à l’élaboration de ce programme qui doit identifier clairement les objectifs en matière d’évolution de la dette par rapport au PIB et d’excédents primaires. Le but est d’opérer le redressement budgétaire en évitant autant que faire se peut toute surcharge fiscale. Il existe en effet d’importants gisements de recettes, dans la simple amélioration de la collecte. Le recours à une augmentation des taux, comme ceux de la TVA ou de la taxe sur les taux d’intérêt peut être évité, à condition de prendre par ailleurs les mesures nécessaires du côté des dépenses. Ce d’autant qu’une hausse d’impôts n’est pas forcément productive en période de faible croissance, d’une part car son effet en termes de recettes est limité, d’autre part en raison de son impact potentiellement négatif sur l’activité. Tout dépendra en fait de la capacité du gouvernement à obtenir l’appui politique nécessaire à la baisse des dépenses à travers des mesures concrètes, comme la mise en œuvre d’une solution au problème de l’électricité. Quelles sont ces mesures concrètes ? Pour l’instant, le gouvernement donne l’impression de ne pas avoir défini son plan de travail… La polarisation sur les dossiers sécuritaires occulte les questions économiques et sociales. Ce qui n’empêche pas le travail de se faire discrètement. Nous sommes en phase de finalisation des options. Tous les projets concrets sont en cours de discussions et ils seront finalisés en détail d’ici à la fin de novembre pour faire l’objet de discussions au Liban, avant d’être présentés à la communauté internationale. Sur la base de ce plan, nous solliciterons les bailleurs de fonds en décembre pour qu’ils nous aident à réduire le coût du financement de la dette ; à mettre en œuvre certaines mesures structurelles et éventuellement à réduire le stock de la dette. Nous présenterons plusieurs modalités et chaque bailleur répondra en fonction de ses contraintes propres. Notre approche sera globale. L’État entre dans une période nouvelle au cours de laquelle il doit changer radicalement un certain nombre de pratiques en matière de politiques publiques. En ce qui concerne les dépenses, par exemple, il faut repenser les dépenses sociales, en s’assurant qu’elles servent vraiment des objectifs sociaux davantage qu’elles n’accommodent des objectifs politiques. Nous prévoyons également une série de réformes structurelles qui concerneront la gestion de la dette, les marchés de capitaux, le système des retraites, les privatisations, etc. Propos recueillis par Sibylle RIZK
Dans un entretien accordé à «L’Orient-Le Jour», le ministre des Finances, Jihad Azour, affirme que la situation financière et budgétaire est stabilisée d’ici à la fin de l’année. Quant à 2006, elle devra être la première année de mise en application d’un plan à moyen terme de redressement non seulement financier, mais également économique et social, dit-il.
Le...