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Actualités - ANALYSE

analyse Dix-sept députés pourraient changer le paysage politique libanais Dans la seconde circonscription du Nord, une bataille déterminante pour le nouveau Parlement

Si les élections du Mont-Liban et de Zahlé ont provoqué un renversement de la vapeur et un changement des équilibres politiques, c’est la bataille du Nord qui déterminera la physionomie du nouveau Parlement. D’ailleurs, toutes les parties impliquées dans cette bataille ont mobilisé au maximum leurs forces. Du jamais vu au Liban depuis au moins trois décennies. Et le ton des discours électoraux a atteint un degré de passion et de violence assez inquiétant. C’est surtout dans la seconde circonscription du Liban-Nord, celle qui regroupe Tripoli, Zghorta, Minié, Batroun et Koura, que le scrutin électoral s’annonce le plus serré. Les électeurs chrétiens et musulmans y sont en nombre pratiquement égal, et ils doivent choisir 17 députés. Ce qui donne à cette circonscription une configuration qui ressemble à celle de Baabda-Aley, où la bataille a été très dure et l’écart de voix entre les élus et les perdants assez petit. La liste de la Décision du peuple, fruit de l’alliance entre le courant aouniste et Sleimane Frangié, compte essentiellement dans cette circonscription, comme dans celle de Baabda-Aley, sur le vote des chrétiens. D’ailleurs, depuis les résultats électoraux du Mont-Liban et de Zahlé, les électeurs chrétiens du Nord semblent assez motivés pour se rendre aux urnes. Même les personnes originaires du Nord et résidant à Beyrouth affirment, selon les sondages, être prêtes à se rendre dans leurs villages pour y déposer leurs bulletins. Ce qui ne se produisait pas dans les précédentes élections. De plus, selon certaines informations, des émigrés originaires du Nord seraient en train de débarquer au Liban pour participer aux élections. La liste Aoun-Frangié mise sur la mobilisation chrétienne Mais il faut une très grande mobilisation chrétienne pour que la liste de la Décision du peuple soit assurée de la victoire car, toujours selon les sondages, seule une mobilisation extraordinaire des électeurs chrétiens peut constituer un apport considérable de voix en faveur de cette liste. D’autant que la liste rivale, appelée la liste de la Réforme et de la réconciliation, parrainée par Saad Hariri, Mohammed Safadi, Kornet Chehwane et les Forces libanaises, bénéficie au départ d’un nombre non négligeable de voix chrétiennes, notamment au Koura, grâce à l’actuel député, membre du bloc Hariri, Farid Mkari, et aux Forces libanaises. À Zghorta, les voix sont partagées entre l’ancien ministre Sleimane Frangié, qui bénéficierait actuellement d’un regain de popularité depuis son alliance avec le général Aoun et sa réconciliation avec Omar Karamé, et Nayla Moawad, qui y a de nombreux partisans. Quant au caza de Batroun, les divers sondages donnent le candidat aouniste Gebrane Bassil favori, mais cheikh Boutros Harb (de la liste de la Réforme et de la réconciliation) a aussi toutes ses chances. C’est toutefois à Tripoli que la bataille sera déterminante, puisque cette ville reste le plus grand réservoir de voix dans cette circonscription. La capitale du Nord est une cité complexe aux équilibres délicats et qui pourrait réserver bien des surprises. Depuis quelques années, le leadership y est partagé entre l’actuel député Mohammed Safadi, qui y est très populaire, et Omar Karamé, qui dispose d’un paquet de voix non négligeable (aux alentours de douze mille voix, selon les estimations). Mais il y a aussi la Jamaa islamiya, qui pourrait avoir près de 10 000 voix, et, depuis 2000, le courant Hariri, dont l’influence n’a cessé d’augmenter ces derniers temps. De plus, certains quartiers de Tripoli et des villages de Minié étant des régions défavorisées, où le taux de misère est très élevé, le facteur financier pourrait jouer un rôle déterminant dans le processus électoral. En principe, la liste de la Réforme et de la réconciliation part favorite à Tripoli, mais les dés sont loin d’être jetés. La déclaration de Omar Karamé, mardi, est suffisamment ambiguë pour laisser entendre que ses proches pourraient renoncer à la décision de boycott. Karamé a affirmé que ses partisans devraient respecter la décision de boycott, alors que les sympathisants sont libres de voter ou non. Mais comme il n’a pas de parti structuré, on ne saisit pas la différence entre les partisans et les sympathisants. Ce sont les urnes qui permettront de décoder ces subtilités linguistiques. Même ambiguïté chez la Jamaa islamiya, dont une délégation s’est rendue hier chez le général Aoun et a salué son programme électoral. C’est dire que le suspense est encore entier, et la présence de Saad Hariri, en permanence à Tripoli depuis mardi, est un indice suffisamment clair de l’enjeu vital que constitue la bataille du Nord. Le 19 juin, c’est l’avenir du Liban pour les prochaines années qui se jouera dans les urnes. Scarlett HADDAD
Si les élections du Mont-Liban et de Zahlé ont provoqué un renversement de la vapeur et un changement des équilibres politiques, c’est la bataille du Nord qui déterminera la physionomie du nouveau Parlement. D’ailleurs, toutes les parties impliquées dans cette bataille ont mobilisé au maximum leurs forces. Du jamais vu au Liban depuis au moins trois décennies. Et le ton des...