Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

ASSOCIATIONS - Au centre de quartier, à Sin el-Fil, des activités en fonction des besoins de la population L’Afel, ou comment transformer l’avenir des enfants victimes de la misère (photos)

« S’il n’y avait pas eu l’Afel, je ne serais pas à l’école aujourd’hui. » « Avant de venir au centre de Sin el-Fil, nous avions souvent faim, à la maison, mon frère et moi. » « Grâce à l’Afel, j’ai pu accepter les problèmes de ma famille et je sais désormais que je peux changer ma vie. » De jeunes adolescents, pris en charge depuis des années par l’Association du foyer de l’enfant libanais (Afel), au centre de quartier de Sin el-Fil, formulent ces petites phrases – comme pour se donner espoir et courage –, en racontant leur histoire lourde à assumer. Tous les jours, après l’école, 102 enfants et adolescents, âgés entre 4 et 16 ans, se retrouvent dans ce centre relevant de l’Afel. Ici, un repas chaud leur est servi. Des moniteurs, des enseignants et des volontaires les aident à faire leurs devoirs. Des activités d’éveil (théâtre, dessin, chant, et informatique) sont ensuite prévues. Ici, on peut également trouver une oreille attentive aux histoires qu’on raconte et que personne n’écoute à la maison. Parce que tous les enfants n’ont pas eu la chance de naître sous une bonne étoile ou d’avoir des parents qui les aiment correctement, il y a un peu moins de trente ans, une association a vu le jour pour faire la différence. Créée en pleine guerre, pour venir en aide à l’enfant et à sa famille, l’Afel a réussi, au fil des ans, à transformer la vie de la plupart des enfants qu’elle a accueillis. Le centre de quartier de Sin el-Fil a été mis en place en 1979. Il était le premier du genre au Liban. Situé à proximité des quartiers pauvres de Nabaa et de Bourj Hammoud, le centre accueille au cours de la journée des enfants démunis, en danger de délinquance, parfois victimes de sévices et de maltraitance... Bref, des tout-petits appartenant à des familles à problèmes. Le centre vient également en aide à leurs parents, essayant de comprendre leurs problèmes et tentant de les réhabiliter, par exemple en leur trouvant un emploi ou encore en les encourageant à effectuer des cures de sevrage et de désintoxication. D’année en année, le centre de Sin el-Fil de l’Afel a développé ses activités, selon les besoins des habitants de la zone. Sur le plan des jeunes, un club a été créé afin qu’ils se retrouvent en week-end. Des colonies de vacances sont prévues en été hors de la ville. Pour les adultes, depuis quelques années, des conférences portant sur divers thèmes, notamment le sida, le mariage, les problèmes des adolescents, sont régulièrement prévues. Des cours d’alphabétisation sont également assurés. Un atelier protégé pour les mamans des enfants de l’Afel a également été mis en place. Il aide les femmes les moins nanties à s’assumer. Un service complet d’aide dans le cadre de la famille a été prévu. Partenariat avec le ministère des Affaires sociales Cette année, grâce aux diverses activités du centre de Sin el-Fil, l’Afel a été sélectionnée pour être le partenaire du ministère des Affaires sociales dans deux domaines. La présidente de l’association, Simone Wardé, indique à ce sujet que « pour la première fois cette année, un service d’aide en famille, à l’instar du service du centre de quartier de Sin el-Fil, a été créé par le ministère. Comme nous sommes sur le terrain depuis 1976, nous avons été sélectionnés ». « C’est la première fois que le ministère des Affaires sociales signe un contrat dans ce cadre avec une ONG », relève-t-elle. Évoquant le deuxième partenariat, Mme Wardé note qu’il « s’agit d’un nouveau service d’aide, relevant du ministère, pour la prévention de la délinquance et de la maltraitance contre les enfants et les femmes ». « L’Afel est très heureuse d’avoir signé ces deux contrats, parce que d’une part c’est une reconnaissance du travail que nous faisons depuis des dizaines d’années, et d’autre part parce que cela donne une pérennité à notre travail », explique-t-elle. Énumérant encore quelques activités effectuées en 2004, la présidente de l’Afel évoque un projet relatif au travail des enfants, mis en place conjointement avec l’Organisation mondiale du travail, huit ONG à Nabaa et plusieurs ministères. « Le centre de Sin el-Fil ne se résume pas uniquement à l’accueil des enfants en danger de délinquance et à l’écoute de leurs parents, précise Mme Wardé. Il faut penser à un tout. C’est-à-dire que nous assurons une aide scolaire et médicale, nous aidons les familles à payer le loyer, à entreprendre des démarches pour que les enfants obtiennent une carte d’identité, ou encore nous envoyons des caisses de nourriture en attendant que les familles deviennent financièrement autonomes. Il faut compter aussi avec le travail de l’assistante sociale auprès des familles, le suivi psychologique, l’orientation et le travail de formation », note Mme Wardé. « La réhabilitation financière des familles est plus facile, c’est la réhabilitation morale qui est plus délicate et plus longue », lance-t-elle. Pouvoir changer de vie Les jeunes adolescents rencontrés au centre de Sin el-Fil de l’Afel ont fait un très long chemin. Ils appartiennent à un milieu pauvre, enfants de filles-mères, de familles disloquées, ou de parents irresponsables. Tous ont appris à assumer le problème et à gérer leur vie à l’école ou avec leurs amis. Tarek, enfant battu, douze ans, est fana d’informatique. D’ailleurs, c’est à l’Afel, après les leçons, qu’il pianote sur l’ordinateur. Il affirme être « depuis toujours » au centre de Sin el-Fil. Un brin agressif, il raconte : « C’est ici que j’ai appris à être gentil, à me faire des amis, à me faire entendre sans chahuter. » « Sans l’Afel, je serais resté un enfant dissipé et hyperactif », dit-il. Farah, treize ans, vit dans une petite maison avec ses grands-parents, ses tantes, ses oncles et sa mère. Ses parents sont en instance de divorce. Elle n’a pas vu son père, alcoolique, depuis plusieurs mois. D’ailleurs, elle ignore où il habite. « Ma mère m’a amenée au centre pour qu’on m’aide dans mes leçons », dit-elle. « Avant, j’aimais rester seule par peur que les gens apprennent mon histoire. Ici, j’ai compris que ce n’est pas à cause de moi si ça va mal à la maison », poursuit-elle. « S’il n’y avait pas l’Afel, je ne serais pas à l’école maintenant. C’est aussi grâce à l’association que j’ai appris à avoir confiance en moi et à savoir que je peux changer mon propre avenir, raconte-t-elle. Et puis grâce aux visites régulières de l’assistante sociale, la vie à la maison est en train de changer. » Maya, 14 ans, cadette d’une famille de trois enfants, vit avec son père. Il y a quelques années, la mère de Maya a quitté la maison. Depuis, c’est à l’Afel qu’elle rentre après l’école, avant de retrouver, en soirée, son père, actuellement au chômage. « S’il n’y avait pas l’Afel, j’aurais été carrément dans la rue, à mendier, je n’aurais pas été scolarisée et j’aurais probablement crevé de faim », dit Maya, calmement, en vous fixant du regard. « Avant de venir au centre de Sin el-Fil, nous avions souvent faim à la maison mon frère et moi, raconte-elle. Grâce au centre, nous rapportions tous les soirs avec nous de quoi manger, une fois rentrés. » « Avant d’être prise en charge par les monitrices, je passais mon temps à pleurer, à me poser des questions sans réponses, à m’inquiéter pour mon petit frère... tout a changé maintenant », indique Maya, qui croit en un meilleur avenir. « Je sais que quand je serai adulte, je ne commettrai pas les mêmes erreurs de mes parents et je ne choisirai pas des chemins faciles pour me procurer de l’argent », indique-t-elle. Le centre de Sin el-Fil n’est pas le seul de l’Afel à accueillir des enfants miséreux et en danger de délinquance. L’association dispose d’un centre d’accueil en internat à Jouar et de deux centres de rattrapage scolaire, destinés aux enfants retardés scolairement pour des raisons diverses. En un peu moins de trente ans, l’association a réussi à transformer la vie des enfants miséreux, leur donnant la chance de devenir des adultes équilibrés. Et pour réussir, il faut donner beaucoup d’amour, voir de la bonté dans tout être humain, et surtout avoir la foi. Vous pouvez aider l’Afel Le budget annuel de l’Association du foyer de l’enfant libanais (Afel) s’élève à 650 000 dollars par an. « Cette somme n’est pas facile à trouver », indique la présidente de l’association, Simone Wardé, lançant un appel à la générosité et à la solidarité de tous. « Si petite que soit votre donation, elle sera toujours bien accueillie. Un proverbe libanais ne dit-il pas : un petit caillou soutient une amphore », note-elle. L’Afel a aussi besoin de volontaires, qui ont des qualifications (éducateur, psychomotricien, psychologue, médecin, avocat...) ou qui ont du temps libre pour participer à l’animation des activités auprès des enfants (colonies de vacances, études du soir, ateliers de jeux, sorties...). Pour plus d’informations, contactez le siège de l’Afel aux 01/481690, 01/494411, 03/823215. Pour vos dons : BNPI, Achrafieh, compte numéro : 128 249 52. BEMO, Dora, compte numéro : 03 00 366 002194. Patricia KHODER

« S’il n’y avait pas eu l’Afel, je ne serais pas à l’école aujourd’hui. » « Avant de venir au centre de Sin el-Fil, nous avions souvent faim, à la maison, mon frère et moi. » « Grâce à l’Afel, j’ai pu accepter les problèmes de ma famille et je sais désormais que je peux changer ma vie. » De jeunes adolescents, pris en charge depuis des années par l’Association du...