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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE Permettra-t-on à Hariri de renaître de ses cendres dans l’opposition ? Les Libanais sommés de choisir entre la légalité internationale et la tutelle syrienne

Qu’elle soit le prolongement d’une force et d’une assurance retrouvées, ou l’impulsive, la défensive transcription d’un instinct de survie multisollicité depuis quelque temps par l’isolement de son pays, l’équation Assad a été délivrée samedi à Damas devant les émigrés syriens. Premiers destinataires : les Libanais. Qui ont écopé d’un retentissant « Ou bien... ou bien... » qui ressemblait beaucoup plus à une indiscutable objurgation qu’à une déclinaison esthétique du concept kierkegaardien. La communauté internationale, ensuite, qui a assurément entendu la première réaction officielle et on ne peut plus publique du régime syrien à la 1559 : une déclaration de guerre pataude contre la guerre des pressions planétaires, assortie d’une mise en garde solennelle contre les volcans à peine endormis de la région. Et, enfin, les Syriens, qui ont eu le privilège de bénéficier – était-ce volontaire ? – d’une justification présidentielle de la reconduction de l’ami libanais pour contrer « l’interventionnisme international et hypocrite » –, le tout avec un savant dynamitage à la clé de l’immémoriale théorie de l’œuf et de la poule. Sans oublier l’insensé rappel de la philantropie thérésienne de la Syrie au Liban. L’équation, aussi simpliste et réductrice soit-elle, n’en reste pas moins étonnamment simple. Et dangereuse. Puisque, selon Bachar el-Assad, qui s’oppose à la reconduction d’Émile Lahoud s’oppose ainsi à la Syrie elle-même, tout en allant gonfler les rangs des zélotes de la résolution 1559 de l’Onu. En d’autres termes, c’est en deux temps et trois mouvements, en quelques phrases lapidaires, que le n° 1 syrien a décidé d’anéantir, officiellement cette fois, publiquement, la juste mesure, le bon dosage, la nuance et la modération. Et la raison. L’ultrasyrien et très prompt Nasser Kandil s’est vite plu à décoder la singulière mathématique syrienne : « Après le discours du président Assad, le Liban est désormais divisé en deux camps. Celui qui appuie la résolution 1559 de l’Onu et celui qui défend les relations libano-syriennes et la résistance », a-t-il décrété, s’autorisant au passage l’administration d’une folklorique et ubuesque leçon de patriotisme à un Walid Joumblatt, pas fâché sans doute d’avoir là une sympathique (et rare) occasion de sourire, en ces temps anthracites, troubles, glauques et grouillants de scandaleuses menaces, d’inacceptables sanctions – pas seulement politiques. Ainsi, après qu’ils eurent déployé, par le truchement d’un grand nombre d’hommes politiques véritablement représentatifs, tous les efforts visant à imposer, en lieu et place d’une internationalisation dont on entrevoit aujourd’hui les très lourdes conséquences, une salutaire libanisation, les Libanais n’ont plus désormais, si l’on se base sur l’équation Assad, que deux choix. Ou bien devont-ils veiller à ne pas marginaliser le Liban, à ne pas l’installer, à l’image d’un État hébreu pistonné ad giorno par la superpuissance US, dans l’illégalité internationale ; ou bien devront-ils cautionner une tutelle syrienne qui nuit et qui nuira, tant à Beyrouth qu’à Damas, avec lequel ils continuent de souhaiter les meilleures, les plus équilibrées des relations. Sachant que dans ce cas-là, c’est aux très désagréables conséquences d’une résolution encore plus dure que la 1559, et qui ne concernerait plus que la seule Syrie, qu’ils devront faire face. En attendant, c’est vers un prochain gouvernement de confrontation, un cabinet de guerre encore plus monochrome, que le Liban semble se diriger – à moins d’improbable miracle. Et dans ce cas, seul un immédiat plongeon dans l’opposition pourrait sauver Rafic Hariri d’une lente agonie politique intérieure. L’y autorisera-t-on ? Rien n’est moins sûr. Les observateurs ont vu dans le discours 2004 de Bachar el-Assad un écho certain à celui prononcé par son prédécesseur, son père Hafez el-Assad en 1976, justifiant l’entrée des troupes syriennes au Liban. Sauf qu’hier, la couverture internationale (malgré les réserves de l’URSS) ressemblait à un chèque en blanc signé au profit du défunt maître de la Syrie. Aujourd’hui, de pieuses intelligences évoquent ainsi non plus un écho, mais un pendant (de sortie, de retrait) au discours paternel d’il y a 28 ans. C’est le document fondateur de trois nouvelles décennies de stratégique symbiose, rétorquent les autres. Les temps changent, les boucs émissaires demeurent ? Peut-être, mais malgré les ridicules efforts des uns et des autres, les Libanais, eux, Nasrallah Sfeir et Walid Joumblatt en tête, ont tourné la page. Et compris, contrairement à hier, que si leur territoire pourrait servir de terrain idéal aux guerres des autres, c’est sans eux qu’elles se feraient. Ziyad MAKHOUL
Qu’elle soit le prolongement d’une force et d’une assurance retrouvées, ou l’impulsive, la défensive transcription d’un instinct de survie multisollicité depuis quelque temps par l’isolement de son pays, l’équation Assad a été délivrée samedi à Damas devant les émigrés syriens. Premiers destinataires : les Libanais. Qui ont écopé d’un retentissant « Ou...