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Actualités - OPINION

CITOYEN GROGNON Forêt préservée dites-vous ?

Une réserve naturelle, préservée, qu’ils l’appellent, la forêt de Harissa. Mais de forêt, cette colline si belle autrefois n’a plus que le nom, dévorée qu’elle est par le béton, les routes, les constructions qui n’en finissent pas de pousser comme des champignons. Le terme « préservé » ne semble plus être aujourd’hui employé que pour la frime ou pour la rime. C’est pareil. Ça fait si joli de dire « Harissa, forêt préservée ». Ça fait bien, surtout, à l’heure où les pays tirent fierté de leurs sites naturels. Mais qu’importent la syntaxe et les jeux de mots ! Ce qui importe surtout, c’est qu’il y a quelques décennies, il était difficile de détourner son regard de cette colline si belle, si verte, au sommet flirtant avec les nuages, aux pieds pataugeant dans la mer. Une colline protégée par la Vierge. Une colline parsemée de maisons traditionnelles aux toits rouges, bâties en pierre du pays. Un véritable régal pour les yeux qu’elle était à l’époque, la forêt de Harissa. Un paysage de rêve, à faire pâlir d’envie les plus beaux sites du monde. Bien avant les incendies de forêts périodiques, après lesquels émergeaient, en moins de rien, nombre de constructions aussi laides qu’incongrues. Bien avant l’aménagement de la route, dont le large sillon blanc a aujourd’hui l’aspect d’une ride profonde dans un visage divin. Bien avant l’afflux des promoteurs à la recherche de gains juteux. Aujourd’hui, les bulldozers, les bétonneuses et autres machines au service de l’homme ont détruit ce qui reste de verdure dans ce qui était un coin de paradis. De ce que l’on pouvait appeler autrefois une forêt, il ne reste plus que quelques irréductibles taches vertes, quelques arbres fiers qui tentent de survivre entre le béton et l’asphalte. Quelques arbres protégés qu’une loi de « non-edificandae » datant de 2001 interdit de déraciner, de couper, de brûler ou d’abîmer. Mais alors, pourquoi ces étendues vertes continuent-elles de rétrécir comme peau de chagrin ? Pourquoi, çà et là, de récentes plaques blanches, synonymes de nouveaux chantiers de construction, entachent-elles un paysage déjà plein de cicatrices indélébiles ? Les réponses fusent. On s’embrouille dans d’interminables explications. On se justifie. On rejette la faute sur un tiers, une municipalité ou un ministère. On comprend alors que certains villages échappent à la législation. On devine aussi que d’anciens permis de construire sont actuellement en cours d’exécution. Mais personne ne réagit. Les responsables ferment les yeux. En attendant qu’ils trouvent encore d’autres prétextes pour continuer de défigurer un des plus beaux sites du Liban. Anne-Marie El-HAGE
Une réserve naturelle, préservée, qu’ils l’appellent, la forêt de Harissa.
Mais de forêt, cette colline si belle autrefois n’a plus que le nom, dévorée qu’elle est par le béton, les routes, les constructions qui n’en finissent pas de pousser comme des champignons.
Le terme « préservé » ne semble plus être aujourd’hui employé que pour la frime ou pour la...