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Réunion préparatoire du Sommet latino-arabe : enjeux et perspectives

Par Hyam MALLAT Le Brésil a fixé à début septembre la réunion préparatoire du Sommet des pays d’Amérique latine et des pays arabes pour débattre de la Déclaration de Brasilia avant la tenue du Sommet latino-arabe en 2005. Un document préparatoire à ce sujet a été élaboré, et il est significatif d’y relever les enjeux et les perspectives. C’est d’abord la réunion d’un sommet entre des pays ayant des géographies, une histoire, des patrimoines et des cultures extrêmement diversifiés et qui ont eu, dans l’histoire contemporaine, pour caractéristique commune une importante émigration arabe principalement libanaise, syrienne et palestinienne, vers l’Amérique latine. Ces émigrés se sont constitué, au prix d’un labeur et de sacrifices considérables, des positions dans le monde politique, socioéconomique et culturel directement centrés au service de ces pays d’accueil qui, avec la seconde génération – c’est-à-dire pratiquement durant la première moitié du XXe siècle – sont véritablement devenus leurs pays d’adoption. Dès lors, la vision de ces émigrés, bien assimilés, envers leurs pays d’origine est sentimentale – avec parfois des options d’investissement limités. Mais sur le plan public, l’appartenance au pays d’accueil et d’adoption est totale et ne semble pas devoir souffrir de réserves, exception faite d’un contact humain, familial et social de compréhension et de coopération. C’est dire l’ambiguïté et la complexité de la situation qui pourrait se présenter lors de la tenue d’un sommet de cette importance où le continent sud-américain – qui a généreusement et sans réserve accueilli l’émigration en provenance des pays arabes – pourrait bien considérer qu’il a des droits à une reconnaissance de ces pays envers son hospitalité. Si nous abordons cette question du sommet par cette approche rapide des liens politiques et humains qui rapprochent les pays latino-américains et arabes les uns des autres, c’est bien à cause de la gravité des questions inscrites à l’ordre du jour de la réunion préparatoire de septembre. À lire le projet de déclaration, on ne peut que constater et reconnaître la complexité, la diversité, et surtout l’ampleur et l’envergure des politiques et des actions envisagées. Celles-ci s’articulent toutefois en fonction d’objectifs que nous pouvons thématiser comme suit: 1- La reconnaissance de la nécessité de soutenir la confiance et la compréhension mutuelles pour la réalisation de la coexistence pacifique entre les nations: ce principe, qui, d’ailleurs, ne saurait souffrir d’exception de principe, vise à multiplier les échanges entre les cultures et les religions pour un monde bâti sur la tolérance et la non-discrimination. Si nous disons que ces principes ne souffrent pas de réserves, c’est bien parce que la réalité politique et sociologique du monde contemporain est tout autre, constituant même à la limite un véritable défi dans ce double domaine de la culture et de la religion. Ces deux éléments fondamentaux de l’existence ont été tellement oubliés, galvaudés et négligés que leur formidable émergence depuis quelques années prend les allures d’une véritable explosion où chaque pays tente de prouver ses qualités de dialogue et de tolérance, alors que la culture même de cette tolérance, est une affaire de vie et de choix de société. En somme, sans une bonne compréhension de la culture et de la religion de chacun, il ne saurait exister d’échanges fiables et de longue crédibilité dépassant les slogans et les clichés d’usage. 2- C’est dire que ce thème est directement lié à ce que la Déclaration tente de promouvoir avec les visées de coopération entre les pays d’Amérique latine et les pays arabes, dans le domaine du combat pour le développement et d’éradication de la pauvreté et de la faim. Il s’agit là d’options à caractère universel touchant à l’existence car point de dialogue, de compréhension et de coopération entre des sociétés où la faim et la pauvreté sont choses de la vie. 3- Ainsi donc, ce que cette Déclaration présente en matière de défense des droits de l’homme, de respect du droit international, de non-prolifération des armes de destruction massive exige une bonne compréhension du contenu même de ces choix, cette compréhension étant à la mesure de chaque État pour traduire dans les faits des recommandations et des orientations qui seraient de pure forme sans une structure institutionnelle politique et administrative adéquate et crédible. 4- C’est pourquoi la Déclaration tente de présenter des options de transformations et de mutations avec la prise en compte des possibilités d’extension des échanges commerciaux, touristiques et de promotion des investissements entre les pays arabes et les pays d’Amérique latine, vu les potentialités et les ressources dont sont dotés ces pays. C’est dans cet esprit que la Déclaration suggère d’une part la construction d’entrepôts dans chacun des pays pour la commercialisation des produits mutuels et, d’autre part, la création d’un fonds d’investissement entre les pays arabes et ceux d’Amérique latine pour fonder des sociétés commerciales ayant pour but des projets mutuels. 5- Plus encore, la réforme du système monétaire international devrait conforter les marchés financiers internationaux et initier un processus de solution à la dette des pays en développement. On constate bien par ce bref sommaire des sujets abordés dans la Déclaration qu’il s’agit de thèmes et de choix visant à faire partager les soucis et les objectifs par tous les pays dans le cadre d’une coopération fondée sur l’adaptation de la politique de développement durable. Mais plus encore, cette déclaration revêt également un aspect politique évident avec la recommandation visant à respecter la souveraineté régionale et l’intégrité territoriale des pays, et l’adoption des voies pacifiques pour la résolution des conflits. Pour cela, la Déclaration reconnaît que pour renforcer la capacité de la communauté internationale à affronter les défis à la paix et à la sécurité, il y a lieu de revigorer les instances multilatérales, dont surtout les Nations unies avec une révision de la composition du Conseil de sécurité pour une meilleure représentativité. En réalité, ce point est inscrit à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée générale des Nations unies qui débuteront le 14 septembre à New York, et cette question se pose depuis un certain temps sans que les débats n’aient conduit à un accord constructif sur ce sujet d’une intense sensibilité. C’est dire que la réunion préparatoire au Sommet des pays arabes et d’Amérique latine se trouve confrontée à une prise de position sur une question dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle exige des concertations approfondies entre tous les partenaires mondiaux. Au-delà donc des objectifs qui reviennent à l’essence même de la politique de développement durable (lutte contre la pauvreté, la faim, la régulation du système financier mondial, l’intensification des échanges commerciaux et touristiques...) et même d’une politique tout court (telles la résolution des conflits armés par la négociation, la défense des droits de l’homme...), la Déclaration constitue également, dans son volet relatif à la révision de la composition du Conseil de sécurité des Nations unies, une option fondamentale en matière de politique internationale, ouvrant la voie à une négociation diplomatique des plus complexes pour en identifier les aspects – et sans doute également tous les enjeux.
Par Hyam MALLAT
Le Brésil a fixé à début septembre la réunion préparatoire du Sommet des pays d’Amérique latine et des pays arabes pour débattre de la Déclaration de Brasilia avant la tenue du Sommet latino-arabe en 2005. Un document préparatoire à ce sujet a été élaboré, et il est significatif d’y relever les enjeux et les perspectives.
C’est d’abord la réunion d’un...