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Actualités - CHRONOLOGIE

Loubié, village interdit aux journalistes

C’est à 13h30 samedi dernier qu’Ahmad Mansour, le tueur de l’Unesco, qui avait assassiné le 31 juillet 2002 huit de ses collègues à la mutuelle des enseignants, a été enterré dans son village natal de Loubié (caza de Zahrani). Dès l’arrivée de la dépouille mortelle, des personnes en civil affirmant qu’elles étaient originaires du village et qu’elles étaient proches de Mansour ont barré la route aux journalistes. Selon des témoins oculaires habitant le village de Saksakiyé, à proximité de Loubié, des jeeps de l’armée avaient accompagné la dépouille mortelle jusqu’à la frontière du village pour éviter d’éventuels débordements. Un grand nombre d’habitants des localités voisines ont pris part aux funérailles. « Ahmad Mansour, tout le monde le connaissait, il faisait le bien, jusqu’à présent nous n’arrivons pas à comprendre qu’est-ce qui l’a poussé à commettre cet abominable crime », disent-ils. Certains d’entre eux, qui ont requis l’anonymat, rapportent les propos tenus, peu après l’enterrement, par la famille Mansour, affirmant « qu’elle ressent qu’elle a été lâchée par certains pôles du pouvoir ». Quelques heures après les funérailles, les journalistes n’étaient toujours pas les bienvenus à Loubié. À l’entrée de la maison d’Ahmad Mansour, où les femmes recevaient les condoléances au rez-de-chaussée, des proches, le visage éprouvé par la douleur, invitaient les correspondants de presse à revenir plus tard. « Que Dieu les aide à surmonter cette terrible épreuve », chuchotent-ils. Deux jeunes hommes assis devant la maison, montant presque la garde, se lèvent et nous obligent à monter en voiture. Une raison pour faire un tour dans ce charmant petit village du Liban-Sud et de rendre visite au moukhtar de la localité. À l’instar de la plupart des bourgades du caza de Tyr et de Zahrani, à Loubié, de petits drapeaux du mouvement Amal flottent au-dessus de plusieurs maisons. Peu avant notre arrivée à la maison d’Ali Khalil, le moukhtar du village, beau-père du tueur de l’Unesco et qui avait quelques jours auparavant indiqué à la presse qu’il « regrette d’avoir donné sa fille en mariage à Mansour », une vieille Mercedes nous barre le chemin. Son chauffeur nous invite encore une fois à partir. Un autre véhicule arrive, ses occupants mettent pied à terre et devant notre insistance décident de parler mais à condition que nous quittions les lieux au plus vite. « La famille est très éprouvée, nous avons peur pour votre sécurité », affirment-ils. « L’exécution était une injustice. C’est vrai Ahmad a tué huit personnes mais au Liban-Sud, dans la zone anciennement occupée, des agents d’Israël qui ont assassiné des centaines de personnes ont été jugés, emprisonnés et remis en liberté au bout de deux ans », indique le quidam qui vient de descendre de la voiture. Il affirme qu’il se prénomme Mohammad et qu’il est originaire du village. Il veut parler « d’autres crimes, de la fraude et de la corruption ». « D’ailleurs, si le gouvernement s’était occupé de la situation économique du pays, Ahmad Mansour n’aurait pas commis son crime », ajoute-t-il. Mohammed parle des dernières heures de Mansour, qui « est père de quatre enfants âgés entre 19 et 6 ans et qui avait vu sa fille aînée et son épouse vendredi, à la veille de son exécution ». « Il ne s’attendait pas à être exécuté, il a cru jusqu’à la dernière minute qu’il serait gracié », ajoute-t-il. Ahmad Mansour croyait qu’il bénéficiait du soutien de certains pôles du pouvoir; d’ailleurs n’avait-il pas accroché, dans le passé, un poster géant de deux mètres par quatre du chef du Parlement Nabih Berry à l’entrée de sa maison, selon les rumeurs qui circulent dans les villages voisins. Mohammed indique d’ailleurs que « tous les habitants du Liban-Sud veulent montrer qu’ils prêtent allégeance au chef du Parlement ». Un habitant du village, surpris par le groupe qui discute devant sa maison, s’approche. Le chauffeur de la Mercedes s’impatiente, nous oblige encore une fois à monter en voiture. L’habitant qui requiert l’anonymat tient à préciser : « Nous sommes humainement solidaires d’Ahmad Mansour, même si nous pensons aussi aux familles des victimes ». Et de chuchoter : « Parmi tous ceux-là (désignant les personnes qui nous entourent et qui ont regagné leurs voitures) je suis le seul originaire du village. » Le chauffeur de la Mercedes interpelle notre interlocuteur, Mohammed, qui s’est mis derrière le volant de sa voiture : « Youssef, montre-leur le chemin du retour, je les suivrai jusqu’à Saksakiyé. » Mohammed s’appelait donc Youssef et les habitants de Loubié et des villages voisins ne seraient pas des menteurs. Pat. K.

C’est à 13h30 samedi dernier qu’Ahmad Mansour, le tueur de l’Unesco, qui avait assassiné le 31 juillet 2002 huit de ses collègues à la mutuelle des enseignants, a été enterré dans son village natal de Loubié (caza de Zahrani).
Dès l’arrivée de la dépouille mortelle, des personnes en civil affirmant qu’elles étaient originaires du village et qu’elles étaient...